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Conseils de Communes / Election des moins de 21 ans : constitutionnelle ou pas ?


Rédigé par Safaa KSAANI Mardi 5 Octobre 2021

Ils ont entre 18 et 21 ans et ont pu obtenir la présidence de Conseils de communes à travers le Royaume. Seul bémol : leur âge... Une réussite qui dérange certains.



De nombreux jeunes de moins de 21 ans ont réussi à détromper toutes les attentes en obtenant la présidence de Conseils de communes à travers le Royaume.

La nouvelle a été accueillie avec beaucoup d’éloges par bon nombre de Marocains qui aspirent à voir des jeunes aux manettes, mais les opposants ne manquent pas aussi. Quelques jours après la désignation de ces jeunes dirigeants, certaines voix se sont élevées dénonçant leur inéligibilité, tout en appelant à les destituer. Ceux-ci consolident leur plaidoyer en jouant la carte du vide juridique et la non-constitutionnalité de leur élection.

Or, pour Chakib El Khayari, juriste et doctorant en droit des affaires, il n’y a pas de vide juridique, mais il n’en demeure pas moins que la législation est appelée à gagner en clarté.

Retour sur les faits

Il y a une semaine, le tribunal administratif d’Oujda a annulé l’élection de la jeune présidente d’une commune rurale dans la région de Taourirt, qui n’a, en effet, que 19 ans. Selon le verdict de ladite Cour, qui s’est appuyée sur l’article 41 du code électoral, pour présider une commune, il faut avoir au moins 21 ans. A Agadir, les choses ne sont pas à l’identique.

Le tribunal administratif de la ville a rejeté la demande d’annulation d’une jeune présidente de la commune Sidi Bourja de la province de Taroudant. Ce ne sont là que les deux exemples les plus médiatisés, sachant qu’une dizaine de personnes âgées entre 19 et 21 ans ont été élues.

Qui a raison et qui a tort ? Dans son article 30, la Constitution note noir sur blanc : tout citoyen, femme et homme, a le droit de voter et de se présenter aux élections, à condition d’avoir atteint l’âge légal de la majorité et de jouir des droits civils et politiques. La Loi fondamentale du pays souligne également qu’«une loi organique fixe notamment : les conditions de gestion démocratique de leurs affaires par les régions et les autres collectivités territoriales, le nombre des conseillers, les règles relatives à l’éligibilité, aux incompatibilités (…)».

Ces articles trouvent leur continuité dans le Dahir n° 1-58-250 du 21 safar 1378 (6 septembre 1958) portant code de la nationalité marocaine, selon lequel une personne majeure est «toute personne ayant atteint l’âge de dix-huit ans grégoriens révolus». Un texte en adéquation avec le code de la famille (Moudawana).

Ceci dit, toute loi ordinaire, comme la loi 9.97 formant le code électoral, qui fixe l’âge légal à 21 ans, ne doit pas entrer en jeu, nous indique Chakib El Khayari. Depuis sa promulgation en 1997, ce code électoral a vu plusieurs de ses dispositions complétées ou modifiées.

Au point qu’aujourd’hui, le « code » ne semble plus obéir à sa finalité initiale : harmoniser une législation éparse, disparate et donc complexe, notamment en ce qui concerne la définition de l’âge légal minimum des présidents des Conseils communaux. «Ainsi, selon la Constitution, une loi organique est la seule loi éligible de fixer l’âge légal aux élections, et non pas une loi ordinaire (comme la loi n°9.97 formant code électoral) », nuance notre interlocuteur, ajoutant qu’il faut donc « s’arrêter au niveau de l’éligibilité aux élections à la loi organique n° 59-11 relative à l’élection des membres des Conseils des collectivités territoriales ».
 
Lorsque deux ou plusieurs listes ont recueilli le même reste, est élu, au titre du siège concerné, le candidat le plus jeune et qualifié selon l’ordre de classement sur la liste.

Le plus jeune élu automatiquement en cas de « désaccord »
 
Contactées par nos soins, des sources de différents Conseils nous affirment que l’élection des jeunes est vue à la hausse cette année, suite aux désaccords dans le choix des présidents, activant ainsi l’article 24 de la loi organique n°59-11 qui prévoit que «lorsque deux ou plusieurs listes ont recueilli le même reste, est élu, au titre du siège concerné, le candidat le plus jeune et qualifié selon l’ordre de classement sur la liste. En cas d’égalité d’âge, un tirage au sort désignera le candidat élu.

En cas de scrutin uninominal à la majorité relative à un tour ou en cas d’élection d’un seul membre dans le cadre d’une circonscription électorale, est déclaré élu le candidat qui a obtenu le plus grand nombre de voix».

Lorsque deux ou plusieurs candidats ont recueilli le même nombre de suffrages, le plus jeune est élu. En cas d’égalité d’âge, un tirage au sort désignera le candidat élu, également. C’est dire que les blocages émaillant les différentes communes du Royaume ont du moins servi à rajeunir la classe politique marocaine, ne serait-ce qu’au niveau local.

Safaa KSAANI

 

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Conseils de Communes / Election des moins de 21 ans : constitutionnelle ou pas ?

Saïdia


Iman Meddah, présidente de commune à 19 ans
 
Iman Meddah, étudiante à l’Institut Supérieur des Professions Infirmières et Techniques de Santé (ISPITS) d’Oujda, a réussi à devenir la plus jeune présidente de la commune de Saïdia lors de l’élection des présidents des collectivités territoriales, vendredi 1er octobre, avec une moyenne de 9 voix.

Iman, qui a 19 ans, s’était présentée aux élections sous les couleurs du Parti de l’Istiqlal. Elle est parmi les plus jeunes élus ayant obtenu la présidence de Conseils de communes à travers le Royaume.

Motivés, les jeunes élus ont indiqué dans des déclarations à la presse que leurs mandats électifs ne les empêcheront pas de poursuivre leurs études et qu’ils oeuvreront à résoudre les problèmes du quotidien des habitants de leurs communes.

Bureaux communaux

Elections sous haute tension

 
Le processus de constitution des Bureaux des communes et arrondissements est loin d’être une promenade de santé. Ces élections connaissent des lenteurs, et sont, dans certains cas, émaillées d’incidents violents. Là où l’élection des Bureaux de villes comme Casablanca, Marrakech et Agadir se sont déroulées dans le calme et de manière rapide, ce même processus dans la capitale n’a abouti qu’après des semaines de négociations marquées par des altercations, des disputes ou encore des menaces de mort ayant poussé la police à intervenir.

Une situation qui s’est également reproduite à Tanger, où l’un des conseillers communaux a subi une tentative d’enlèvement en plein jour et qui plus est sur le parvis du Conseil de la ville.

Une élection qui a finalement dû se tenir sous la protection des forces de l’ordre et qui a failli dégénérer en bagarre générale à plusieurs reprises. Des incidents qui renseignent sur le degré de tensions qui règnent lors de sessions marathoniennes où les équilibres issus des urnes réduisent la marge de manoeuvre des différents partis. Une situation de blocage qui oblige ces derniers à courtiser, voire dans certains cas à forcer l’adhésion des petites formations dont les voix peuvent faire basculer l’élection d’un côté comme de autre.

Une situation qui est loin de se limiter aux grandes villes, mais qui s’étend à l’ensemble du territoire. La prolifération des médias numériques, notamment les sites locaux, a permis de rapprocher les Marocains des coulisses du processus électoral.
 

3 questions à Nabil Adel

Conseils de Communes / Election des moins de 21 ans : constitutionnelle ou pas ?


« Aujourd’hui, on parle de plus en plus d’intégrer les jeunes dans la politique »

 
Le membre du mouvement politique « Maân » nous livre sa lecture de la forte mobilisation de jeunes de moins de 21 ans dans les communes et de ses conséquences, à la lumière des élections du 8 septembre.


- Les élections communales, régionales et législatives du 8 septembre ont connu une nouvelle dynamique grâce à la participation remarquable des jeunes de moins de 21 ans. Comment expliquez-vous ce nouveau phénomène ?

- L’idée d’intégrer les jeunes à la chose publique n’est pas mauvaise. C’est d’ailleurs ce qui est souhaité depuis longtemps. Mais il ne faut pas présenter des jeunes parce qu’ils sont jeunes, mais pour qu’ils apportent du nouveau. Ce à quoi nous avons assisté aux récentes élections, c’est d’abord une forte précipitation. Des candidats ont présenté leurs candidatures à la 90ème minute. Fatalement, beaucoup de candidatures passent entre les mailles du filet. C’est un choix fait par des partis politiques. Aujourd’hui, on parle de plus en plus d’intégrer les jeunes dans la politique.


- Actuellement, des élections de certains jeunes présidents de communes sont annulées. A qui incombe cette responsabilité ?

- C’est le parti lui-même qui assume la responsabilité, puisqu’il est censé vérifier les critères d’éligibilité des personnes qui le représentent. Mais aussi le ministère de l’Intérieur qui valide in fine les candidatures. Je pense qu’il aurait pu arrêter cela, avant d’arriver à la justice. Mais, globalement, l’idée d’intégrer des jeunes à la politique est plutôt bonne pour les confronter à la chose publique, mais en prenant en compte ces détails.


- A quel point ces annulations pourraient-elles affecter les jeunes et les plus âgés ?

- A partir du moment où l’on sait qu’une personne n’a pas les compétences ou la maturité ou le sens de la responsabilité requis pour gérer une commune, on sait d’emblée qu’elle sera « la marionnette » des personnes plus âgées qu’elle. On risque également de perdre confiance en nos jeunes. Quand on présente un jeune qui a moins de 21 ans et qui passe par une expérience douloureuse, ça le marque à vie ! Ceci contribue à ce que les jeunes se détachent de la chose politique.

 
Recueillis par S. K.

 







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