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Renseignements marocains : Dans le carré d’or des meilleurs services du monde


Rédigé par Nizar DERDABI Mardi 13 Décembre 2022

Les services de renseignements marocains, habitués à travailler dans l’ombre, sont mis en avant par le classement d’un centre de recherche français sur le renseignement, qui distingue les meilleurs services d’Intelligence dans le monde.



Le travail de l’ombre des services de renseignement fait souvent l’objet de mythes et d’histoires invraisemblables d’agents secrets aux capacités surhumaines que les films d’espionnage entretiennent à foison. Pourtant, la mission que remplissent ces services est d’une importance capitale pour anticiper les menaces contre la sécurité de l’Etat et défendre les intérêts supérieurs de la nation.

Néanmoins, dans cette galaxie opaque et souvent fantasmée des services de renseignement à travers le monde, une question revient fréquemment : que valent vraiment ces services dont l’activité reste secrète et confidentielle et quels sont les meilleurs services de renseignement à travers le monde ? Le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (Cf2R) s’est essayé à cet exercice délicat en établissant dans une publication de novembre 2022 une ébauche de classement et en s’appuyant pour cela sur l’analyse d’anciens cadres dirigeants du renseignement français qui ont souhaité garder l’anonymat.

Sans surprise, les grandes puissances mondiales ont vu leurs services de renseignement truster les premières places de ce classement (USA, Russie et Chine) qui distingue les services de renseignement marocains parmi les services étrangers les plus performants.

Un classement véritablement objectif ?

Alors qu’il est plus facile de classer les capacités militaires des forces armées des différentes puissances mondiales en prenant comme indicateur l’effectif des militaires, le volume des armes et des équipements militaires (avions de chasse, navires de guerre, chars d’assaut…) et la fiabilité de la logistique, la comparaison capacitaire des différents services de renseignement de par le monde est un exercice beaucoup plus hasardeux et subjectif. D’abord parce que les effectifs et moyens de ces services sont soigneusement tenus secrets (même si les services de renseignement connaissent approximativement les données des services adverses) et que les opérations réussies ou les renseignements recueillis ne sont pas toujours rendus publics.

Ainsi, le rendement de ces services ne peut être objectivement évalué que par leurs responsables et gouvernants. Et ensuite parce que chaque pays a sa propre architecture des services de renseignements qui peut englober des services de renseignement intérieurs, des services de renseignement extérieurs, des services de renseignement militaires, voire des services de renseignements économiques et financiers.

Il est ainsi plus pratique d’évaluer les capacités de la « communauté du renseignement » d’un pays qui regroupe l’ensemble des services et des forces vives des différents acteurs du renseignement qui permettent à un gouvernement d’avoir une vision plus globale et exhaustive des menaces contre ses intérêts.

Le CIA et le FSB rejoints dans le peloton de tête par les services chinois

Les années d’extrême rivalité entre les USA et la Russie qui remontent à la période de la Guerre Froide ont logiquement participé à façonner les services de renseignement les plus puissants au monde : le « Central Intelligence Agency » (CIA) et le « Komitet Gossoudarstvennoï Bezopasnosti » (KGB).

La chute de l’URSS en 1991 qui a entraîné la dissolution du KGB a consacré la suprématie des services de renseignement américains qui ont vu la montée en puissance de la « National Security Agency » (NSA), chargée exclusivement du Renseignement Electronique (aussi appelé SIGINT : Signal Intelligence), en plus des activités de la CIA.

Par la suite, le Service de sécurité de la fédération de Russie (FSB), héritier de l’ancien KGB, a redonné ses lettres de noblesse au renseignement russe et constitue depuis des années une redoutable agence de contre-espionnage et de police secrète à la fois. C’est d’ailleurs à partir du poste de directeur du FSB que Vladimir Poutine a été propulsé en décembre 1999 à la fonction de Président de la Fédération de Russie par intérim, avant de poursuivre son règne d’unique et véritable patron de la Russie jusqu’à nos jours.

Ce parcours de Poutine nous éclaire de toute évidence sur le fait que le renseignement est au centre du pouvoir. C’est ce qu’a d’ailleurs compris le Parti Communiste chinois qui déploie des ressources nancières et technologiques très importantes pour ses services de renseignement afin d’assouvir ses ambitions de superpuissance.

Ainsi, le ministère de la Sécurité de l’Etat, « Guoanbu » en chinois, ne cesse de développer ses activités aux quatre coins du monde afin de servir les intérêts chinois, aussi bien sur le plan politique et sécuritaire que sur le plan économique à travers notamment le projet de Route de la Soie.

Tout juste derrière ces trois grandes puissances du renseignement, on trouve les services du « Secret Intelligence Service » britannique, la Direction Générale de la Sécurité Extérieure française (DGSE) ainsi que le Mossad israélien. Ces services de renseignement disposent d’une capacité d’intervention mondiale (renseignement et action clandestine), mais ne couvrent pas en permanence la totalité du globe.

Les services marocains : des compétences sollicitées par les pays étrangers

La communauté du renseignement du Maroc trouve sa place dans ce classement parmi des puissances européennes telles que l’Allemagne, l’Italie ou l’Espagne ou bien arabes comme l’Egypte, l’Arabie Saoudite et l’Algérie. Pour l’auteur de la publication du Cf2R, « les budgets et effectifs de ces pays sont similaires ou inférieurs à ceux de la « classe 2 » mais plusieurs de ces États pourraient la rejoindre dans les années à venir ».

Il ajoute que ces pays de la 3ème catégorie, dont fait partie le Maroc, sont capables de concentrer leurs moyens sur leurs objectifs géographiques ou thématiques et peuvent donc être ponctuellement aussi efficaces que les grandes puissances qui ont une vocation à couvrir toutes les régions du globe. Mais ce qui distingue particulièrement les services de renseignement marocains des autres c’est la renommée qu’ils ont acquise dans la lutte contre les réseaux terroristes.

En effet, il ne se passe pas une année sans que des responsables sécuritaires ou politiques étrangers ne saluent la collaboration des services marocains pour le démantèlement de cellules terroristes à l’étranger. C’est ce qui s’est passé lors des attentats du Bataclan en novembre 2015 avec la localisation des auteurs de l’attaque sur la base d’informations livrées par le Maroc à la France, mais aussi plus récemment, en janvier 2021, lorsque le FBI a arrêté un soldat américain qui avait prêté allégeance à Daech, avant qu’il n’exécute un attentat à New York, grâce à des renseignements fournis par la DGST.

Les services marocains sont aussi actifs à l’étranger comme ça a été le cas pour l’otage allemand libéré au Mali il y a quelques jours grâce à des médiateurs marocains. Si le Royaume du Maroc constitue un îlot de sécurité et de stabilité au sein d’une région très instable et en proie aux menaces de terrorisme et de criminalité transfrontalière, c’est en grande partie grâce aux capacités de ses services à anticiper les menaces en s’appuyant sur des ressources humaines très qualifiées qui travaillent dans l’ombre pour l’intérêt suprême de la nation.



Nizar DERDABI

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Renseignements marocains : Dans le carré d’or des meilleurs services du monde

Cf2R


Classement des services de Renseignement ?
 
Pour faire le classement le plus objectif possible des meilleurs services de renseignement au monde, le Cf2r a opté pour cinq grandes catégories :

1. Les puissances mondiales en matière de renseignement qui maîtrisent l’ensemble des « INT » (SIGINT, MASINT, IMINT, GEOINT, HUMINT, OSINT) disposent de capacités d’action mondiales (renseignement et action clandestine), à savoir : les Etats-Unis, la Russie et la Chine ;
2. Les puissances qui disposent d’une capacité d’intervention mondiale (renseignement et action clandestine), mais ne couvrent pas en permanence la totalité du globe, même si leur État a une vocation mondiale, à savoir : Royaume-Uni, Israël, France ;
3. États qui disposent de services de qualité, maîtrisant plus ou moins tout ou partie des « INT », mais ne couvrent qu’une zone d’action limitée correspondant à leurs intérêts directs, leur État n’ayant qu’une vocation régionale : Allemagne, Italie, Espagne, Corées, Japon, Maroc, Algérie, Turquie, Égypte, Arabie Saoudite, Iran, Inde, Pakistan ;
4. États qui disposent de capacités de renseignement limitées, privilégiant généralement la sécurité intérieure. On trouve notamment dans cette catégorie les autres Etats européens, en dehors des puissances déjà citées ;
5. États qui disposent de capacités de renseignement très limitées, voire inexistantes, notamment en Afrique, en Asie, au Moyen Orient.

 

Objectifs et opportunités


Missions d’un service de Renseignement ?
 
Pour le compte d’un Etat, un service de renseignement est chargé en premier lieu de permettre d’avoir une connaissance et une maîtrise de l’environnement local, régional et international afin de pouvoir identifier les opportunités pour l’élaboration de sa politique et détecter les menaces qui pourraient nuire à ses intérêts. D’après la revue « Diplomatie » d’avril 2017, le service de renseignement doit remplir 5 missions principales :

• Obtenir des informations difficiles d’accès : satisfaire les besoins en informations des autorités en perçant les intentions des adversaires ;
• Détecter les menaces : repérer, identifier et évaluer les menaces et dangers contre l’intégrité territoriale, les intérêts stratégiques et la sécurité des citoyens ayant trait au terrorisme, criminalité, risque de conflit, sécurité alimentaire, énergétique, etc. ;
• Prévoir et décrypter les stratégies dissimulées : connaître les intentions et les manoeuvres secrètes de ses adversaires mais aussi ses partenaires et alliés afin de pouvoir les anticiper ;
•Neutraliser les moyens d’information et d’action adverses : altérer les moyens d’information et d’action des adversaires et concurrents afin de garder un avantage sur eux ;
• Influer secrètement sur les événements mondiaux ou régionaux : intervenir secrètement à l’étranger afin de défendre ses intérêts ou contrer les politiques occultes des autres acteurs internationaux.

 

3 questions à Sergueï Jirnov


« Les services chinois et russes essaient de s’imposer sur le continent africain »
 
Sergueï Jirnov, spécialiste en relations internationales et renseignement, ancien officier supérieur du Service des renseignements extérieurs du KGB et SVR de Russie, auteur de plusieurs livres sur le sujet, répond à nos questions.

- Le Cf2R vient de publier un article sur les capacités des meilleurs services de renseignement du monde. Ses conclusions vous semblent-elles refléter les capacités réelles des services de renseignement ?


- Oui, cet article reflète assez bien les capacités et spécificités des différents services même si cet exercice est compliqué étant donné l’opacité voulue et assumée qui entoure les activités de ces services, leurs budgets, leurs directions et leurs effectifs. Dans cet article, il y a une opinion générale qui fait consensus dans la communauté des experts. Même s’il peut y avoir des dissensions.


- Le classement des trois premières puissances vous paraît-il objectif et quel intérêt portent-elles à la région de l’Afrique du Nord ?

- Je mettrai ces trois services dans l’ordre suivant : USA, Russie, Chine. Les États-Unis par la puissance financière et technique incomparable avec tous les autres pays. La Russie à cause de sa prétention de globalité et les formes anciennes qui ne sont plus utilisées par d’autres services (par exemple, les illégaux ou clandestins), jugées comme trop chères et pas suffisamment efficaces, dans le rapport coûts-bénéfices. L’Afrique n’est pas en elle-même le centre stratégique des intérêts de ces services. Mais c’est le terrain de leurs conflits dans la lutte à la supériorité mondiale.

Particulièrement, ce sont les services chinois et russes qui essaient de s’imposer sur ce continent face aux services occidentaux en perte de vitesse. L’Afrique est particulièrement corrompue et de ce fait présente un potentiel énorme pour ces deux pays (Russie et Chine) qui sont passés maîtres de la corruption et appliquent des modes de fonctionnement et des modèles sociétaux qui leur sont très proches.

- Le Maroc est considéré comme faisant partie des pays disposant de services de qualité. L’expertise des services de renseignement marocains est d’ailleurs souvent saluée par des responsables sécuritaires de grandes puissances et par les médias étrangers.Comment expliquez-vous ce succès ?

- Principalement par une politesse, tout simplement, les grands pays en réalité méprisant par habitude les « petits services ». Mais dans la région de l’Afrique du Nord et sur le terrain des mouvances islamistes et du terrorisme, les services marocains sont parfois plus efficaces que les services des grands pays.



Recueillis par N. D.


 








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