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Quels pré-requis en matière de digitalisation pour le Maroc ?


Rédigé par AB le Vendredi 2 Août 2019




La cybersécurité, incontournable priorité de l’Etat et du secteur privé
La connexion à haut débit, une nécessité fondamentale
Investir massivement dans les infrastructures et technologies

 

Plusieurs initiatives stratégiques ont été lancées en vue d’accélérer la transformation numérique du Maroc et d’inscrire le pays dans une démarche de «Nation Digitale». Néanmoins, le bilan semble mitigé, certaines initiatives ayant échoué ou ont été carrément abandonnées. C’est ce qui  ressort, en tout cas, d’une récente étude intitulée « Le Maroc, la Future Digital Nation africaine? », co-publiée par le magazine « La Tribune Afrique » et le cabinet Mazars.

Parmi les initiatives qui n’ont pas été à la hauteur des ambitions, l’étude cite le Plan Maroc Numérique 2013 qui a montré ses limités relatifs, entre autres, aux retards pris sur plusieurs projets, et aux problèmes identifiés au niveau de la gouvernance et du pilotage…

Pour pallier à cette situation, poursuit la même source,  le Plan Maroc Numérique 2020 a pris le relai afin d’assurer la continuité de l’impulsion créée par le précédent projet.  Structuré autour de 3 piliers et de 9 initiatives, il se base sur une démarche plus inclusive portant sur la coordination entre les différents intervenants de la chaîne numérique et ambitionne d’accélérer la transformation numérique du Maroc, de renforcer son positionnement comme hub numérique régional et de surmonter les freins systémiques comme la gouvernance ou les compétences.

C’est dans ce contexte, poursuit l’étude, que l’Agence de Développement du Digital (ADD) a vu le jour en décembre 2017 comme «organe d’exécution de la stratégie du gouvernement dans l’application de la stratégie Maroc Digital ». Malheureusement, le résultat escompté n’a pas été atteint. L’étude estime que les retards accumulés par le Plan Maroc Numérique 2013 ont creusé le « fossé numérique», qui reste encore substantiel au Maroc et qui entraine une baisse progressive dans les classements internationaux. Suite à une progression historique de 38 places en 2014, le Maroc a perdu 25 places en 2018 dans l’indice de développement de l’e-gouvernement (EDGI), publié tous les deux ans par l’ONU, ce qui le place au 110e rang sur les 193 pays analysés. 

Pour ce qui est de l’année 2019, le Maroc affiche un score de 0,6667 pour l’indice des services en ligne (OSI), 0,5278 pour l’indice de capital humain (HCI) et 0,3697 pour l’indice des infrastructures de télécommunications (TII).  Le Maroc fait ainsi partie des six pays africains affichant un haut niveau d’EDGI aux côtés du Ghana, de l’Île Maurice, des Seychelles, de l’Afrique du Sud et de la Tunisie. 

L’étude ajoute qu’à « la veille de l’échéance 2020, il semblerait que les efforts consentis dans le déploiement de la stratégie peuvent être améliorés et que le pays ne s’est pas encore engagé pleinement sur la route du numérique; parmi les causes invoquées, la résistance de certains acteurs au changement alors que les facteurs clés de succès d’une telle évolution passent inévitablement par l’implication, la coordination et l’adhésion de tous et à tous les niveaux ». 

Quels pré- requis pour le Maroc ?

Les analystes de « La Tribune Afrique » et le cabinet Mazars estiment, à cet égard, que transformer un pays en un « digital nation » est une tâche très difficile, articulée en de multiples chantiers de fond. Ils pensent que le Maroc doit poser les bases de cette transformation. Pour eux, trois piliers, déjà identifiés dans la Stratégie de l’État en matière de développement du digital et par l’ADD, sont prioritaires dans cette refondation. D’abord, penser une « digitalisation » centrée sur l’humain et ses besoins. Pour réussir  ce défi, l’étude appelle au lancement d’un plan national pour dresser l’état des lieux des services offerts aux citoyens et usagers. Puis d’identifier les solutions technologiques à ces enjeux (existantes, à développer) pour enfin prioriser les chantiers à lancer afin de digitaliser for good les services offerts aux Marocaines et aux Marocains. La réalisation de cette expression des besoins initiales, articulée avec une vision prospective portée au plus haut niveau de l’État, permettra de construire une vision Customer centric et de se poser la bonne question : la Tech, pour quoi ?

Le second pilier en question est d’investir massivement dans les infrastructures et technologies dans le but d’accélérer le développement du Maroc pour combler les lacunes actuelles. « Certains domaines sont stratégiques pour le développement d'un pays, notamment lorsqu'il est question de l'ère numérique. Ils apportent de l’innovation dans tous les aspects de la société, en passant des activités quotidiennes des citoyens aux grandes entreprises. Les nouvelles technologies stimuleront ainsi la compétitivité et pourront améliorer le développement du pays, ce qui aura une incidence positive sur son économie, ses emplois et d’autres variables sociales et économiques », souligne-t-on.

Sur ce registre, l’étude estime que le déploiement de la 5G est considéré comme une étape quasiment révolutionnaire pour la connectivité mobile, fournissant une base solide pour un monde « tout connecté ». Au-delà de l’augmentation de la vitesse de connexion- certes spectaculaire- la 5G est considérée comme le moteur d’un changement de paradigme sur le plan industriel, permettant l’opérationnalisation de la quatrième révolution industrielle.   Le Maroc est appelé alors à investir et se lancer dans cette technologie.

Des initiatives stratégiques à consolider

La troisième mesure préconisée pour transformer  le Maroc en un « digital nation » est de renforcer les initiatives stratégiques. « Pour répondre à l'agilité numérique requise par les activités quotidiennes des utilisateurs ainsi que par le tissu économique, la connexion à haut débit est devenue une nécessité fondamentale, s’inscrivant désormais dans l'agenda numérique du pays. Dans ce cadre, un Plan National du Haut Débit constitue un pont vers l'avenir. L'infrastructure est en effet un pré requis pour la transformation numérique, et la technologie mobile ne peut à elle seule absorber l’ensemble des usages, notamment professionnels. C’est pourquoi les réseaux doivent être mis à niveau et étendus pour faire face au trafic croissant de données - contenus en flux continu (résolution 4K et 8K), commerce électronique, médias sociaux – qui sont gérés plus efficacement par fibre optique. Ceci répond non seulement à une évolution sociétale profonde – les marocains consommant de plus en plus de biens culturels ou récréatifs à travers internet- mais également économique, puisque les entreprises échangent de plus en plus de données dont le poids connaît une courbe ascendante », estime-t-on. 

Aux côtés de la mise en place de la 5G et du développement du réseau de haut débit national, la construction de centres de données (Data Centers) et la mise en place du cloud doivent constituer une priorité nationale pour le Maroc, car ces deux éléments sont vitaux pour assurer l’essor d’une économie de l’information nationale. Les data centerspermettent la collecte de données locales, afin d’améliorer continuellement les services pour les usagers des réseaux, tout en assurant une souveraineté numérique et une sécurité accrue des données.

Safe city : un chantier aux externalités positives

Le développement rapide des technologies numériques offre de nombreuses possibilités pour rendre les villes du monde plus intelligentes – Smart cities - et partant, plus sûres afin de devenir des SafeCity. Les villes sont considérées comme intelligentes lorsque l’on investit dans le capital humain et social ainsi que dans les infrastructures de communication traditionnelles (transports) ainsi que modernes (TIC). In fine, une ville connectée dépense mieux son énergie, collecte mieux ses déchets, fluidifie les déplacements de ses citoyens et organise l’accès aux services publics de manière efficiente. De surcroît, les investissements liés aux développements de ces dimensions dans les zones urbaines rendent les villes plus sûres puisqu’elles contribuent directement à améliorer les conditions économiques. Le concept de ville sûre est donc devenu un corollaire indispensable du développement des villes intelligentes. 

Toutefois, au-delà de ces solutions technologiques, l'investissement le plus pertinent dans les technologies de sécurité publique est également le moins coûteux : la définition de normes ouvertes. 

Placer la  cybersécurité comme priorité de l’action de l’Etat et du secteur privé

L’étude estime également nécessaire de placer la cyberséurité comme priorité de l’action de l’Etat et du secteur privé. « La Cybersécurité est à la peine dans les organisations marocaines. Ainsi, plus des trois quarts des organisations ont procédé à un audit de Cybersécurité, mais la majorité ne l’a fait qu’une fois, alors que pour être efficace, un audit doit être répété. Même chose pour les simulations de cyberattaques: 63% ont déjà pratiqué une simulation, mais seule une minorité le fait sur une base régulière ». En clair, si au sommet de l’État il semble y avoir une véritable prise de conscience de l’importance cruciale de la mise à niveau du bouclier de Cybersécurité du Royaume, le message ne paraît pas être aussi bien partagé au sein des organisations publiques et privées.

De ce fait, à l’instar de l’exemple de Singapour, il apparaît nécessaire pour le Royaume de placer la Cybersécurité en priorité de l’action globale de l’État et du secteur privé. Ce rehaussement de priorité peut de surcroit créer un cercle vertueux et stratégique en permettant la constitution d’un véritable marché de la Cybersécurité à dimension africaine, en s’appuyant sur l’expertise des SSII marocaines opérant dans ce secteur ainsi que sur les multinationales opérant à partir du Maroc. De ce fait, le Maroc pourrait faire coup double: mieux se protéger tout en tirant un bénéfice économique majeur », explique l’étude.

A.CHANNAJE




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