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Industrie automobile : 13,9 milliards de dirhams de pertes pour le secteur automobile


Rédigé par Anass MACHLOUKH Jeudi 13 Août 2020

A l’instar des pays européens et asiatiques, le secteur automobile marocain a subi une forte régression à cause de la pandémie de la Covid-19. Policy Center for the new South décortique la situation.



Industrie automobile : 13,9 milliards de dirhams de pertes pour le secteur automobile
L ’année 2020 a été très durement ressentie par l’industrie automobile à l’échelon mondial. La pandémie Covid-19 a franchement ralenti l’activité du secteur et impacté la chaîne des valeurs. L’industrie automobile marocaine n’a pas échappé à cette dépréciation avec 40% de baisse de chiffre d’affaires dans la première moitié de l’année. C’est ce qu’a révélé Policy Center dans un rapport intitulé « Industrie automobile nationale face à la Covid-19 : faut-il se préoccuper de l’impact sur le compte courant ? », signé par le chercheur Abdelaâziz Aït Ali qui y analyse l’impact de la pandémie sur le compte courant du Maroc. 

Un contexte mondial mouvementé

La pandémie de la Covid-19 a provoqué l’arrêt de l’appareil productif dans plusieurs secteurs de l’économie mondiale. Le rapport souligne qu’avec l’entrée en vigueur du confinement dans la région de Wuhan, berceau de la pandémie, le flux de production au niveau mondial a pâti d’interruptions majeures sachant que la région est un fournisseur de premier ordre pour les constructeurs automobiles européens, américains et surtout sud-asiatiques. 

En outre, il ne s’agit pas uniquement d’un ralentissement de la production mondiale. Selon le rapport, la crise sanitaire et le confinement généralisé dans de nombreux pays a causé l’effondrement de la demande mondiale. À ce titre, en Europe, le nombre d’immatriculations de voitures a enregistré un recul de 40% en moyenne dans les cinq premiers mois de cette année par rapport à 2019 et environ 50% dans les pays les plus touchés par la pandémie, tels que l’Espagne et le Royaume Uni. 

Sur toute l’année 2020, le rapport affirme qu’il est prévu, selon les estimations, une contraction de la demande de véhicules comprise entre 14% et 22%. 

L’industrie automobile nationale vivement impactée 

L’industrie automobile marocaine est concernée par cette situation alarmante en particulier en Europe d’autant que le Maroc est fortement lié aux constructeurs européens. Le rapport de Policy Center for the new South fait état d’une contraction de l’industrie automobile nationale au regard des performances à l’exportation. 

Une chute vertigineuse des exportations

D’après le rapport, durant les trois premiers mois de l’année, les exportations du secteur automobile ont reculé de près du quart par rapport à la même période de l’année 2019, avant même que l’état d’urgence et le confinement soient décrétés dans le royaume.

Le recul a touché en particulier les produits finis, notamment ceux de l’assemblage, à hauteur de 36%, les semi-produits à 26% pour le câblage et 13% pour les produits « d’intérieur du véhicule et sièges  ». Au fil des mois, la situation a rapidement empiré. Dès la fin du mois de mai, la baisse des exportations a atteint 40% enregistrant ainsi un recul de 13,9 milliards de dirhams sur les 5 mois de l’année. 

Dans cette perspective, le rapport souligne que les exportations du secteur automobile nationale pourraient subir une perte de 33 milliards de dirhams en cas de prolongement de cette tendance baissière jusqu’à la fin de l’année, soit l’équivalent de 3% du PIB. 

Un effet pas si grave sur l’équilibre du compte courant 

Selon la même source, bien que la chute des exportations porte un coup dur à la balance commerciale, son effet sur les équilibres externes du compte courant est à relativiser. Ceci s’explique par le positionnement du Maroc en haut de la chaîne de production, faisant de lui un importateur de produits intermédiaires, surtout pour les activités d’assemblage. Par conséquent, tout ajustement à la baisse du chiffre d’affaires à l’exportation se traduirait par une réduction proportionnelle des intrants importés. D’un autre côté, la prépondérance du capital étranger dans l’écosystème de l’industrie automobile est telle que la régression de l’activité à l’exportation affecte la rentabilité des entreprises et in fine leur capacité à rapatrier leurs bénéfices. Ainsi, le compte courant est loin de se voir infliger une dégradation. 

La nécessité de mesurer la contribution du secteur aux rentrées de devises

Le rapport a attiré l’attention sur l’importance de prendre en considération l’actionnariat étranger dans l’évaluation de la contribution nette du secteur automobile aux entrées de devises. Selon la même source, en 2019, celle-ci a représenté plus de 1,6% du PIB. 

Ainsi, l’effet net de la chute des exportations du secteur sur le compte courant est moindre, en raison du contenu important en importations des exportations du secteur et du retour sur investissement rapatrié partiellement ou totalement.

En outre, le rapport recommande de dégager la part de la valeur ajoutée domestique contenue dans les exportations du secteur automobile et en déduire la part du travail et celle du capital qui sera éventuellement rapatriée à l’étranger. Par conséquent, il en ressort que la part de la valeur ajoutée associée au facteur capital est cinq fois plus importante que celle du travail, soit la plus élevée dans l’économie marocaine.

Dans cet ordre d’idées, le rapport préconise la mise en place d’un système statistique plus riche pour éclairer les décideurs dans l’élaboration des politiques industrielles plus réfléchies.

Privilégier le capital national

Le rapport met l’accent sur la nécessité d’intégrer les investissements nationaux dans le secteur automobile tout en reconnaissant que Les IDE resteront toujours le principal vecteur de partage et de transfert de la technologie et la meilleure approche pour pénétrer les chaînes de valeurs mondiales. Ceci est indispensable afin de constituer une immunité contre les chocs externes.

Pour parvenir à cette fin, l’entrepreneur national est amené à prendre le relais et à se positionner au cœur de l’industrie automobile, à consolider sa présence dans les activités de sous-traitance de premier et second rang et d’en constituer ainsi un jalon de croissance pérenne pour l’économie marocaine, conclut le rapport. 

Dans le sillage de la dépression que connaît l’économie mondiale à cause de la pandémie de la Covid-19, l’industrie automobile a été ébranlée par la baisse de la demande et la chute des exportations. C’est ainsi que le rapport met en exergue la nécessité de réduire la dépendance nationale vis-à-vis de l’investissement étranger en s’ouvrant davantage sur le capital national tout en restant attaché au transfert de la technologie. Signé par Abdelaâziz Aït Ali, le rapport est paru le 7 Aout sur le site de Policy Center for the new South. 

Anass MACHLOUKH

 

Repères

Augmentation des IDE dans le secteur automobile ces dernières années
L’industrie automobile marocaine a franchi un nouveau cap dans son processus d’évolution avec l’implantation de Renault en 2012. Depuis, l’engouement pour l’investissement dans le secteur ne s’est pas démenti et plusieurs opérateurs internationaux ont préféré s’installer au Maroc pour desservir l’activité de l’assemblage. Les Investissements Directs Etrangers dans le secteur ont atteint en moyenne 3 milliards de dirhams sur la période d’après 2012, tandis qu’ils ne représentaient que 900 millions de dirhams entre 2010 et 2011.
Actionnariat étranger et impact sur la rentrée de devises
Le rapport de Policy Center for the new South a mis la lumière sur l’impact de l’actionnariat étranger sur la rentrée de devises. Il en ressort que le Maroc n’impose pas de restrictions sur le rapatriement des bénéfices et des dividendes des investisseurs étrangers. Ce qui induit, en quelque sorte, « une fuite » de devises équivalente à 1,6% du PIB en moyenne entre 2014 et 2019, et parfois même l’équivalent des entrées nettes des IDE au Maroc. Pour la seule année 2019, par exemple, ces revenus ont surpassé le montant des IDE. 
Suspension de la chaîne de production des constructeurs asiatiques
Pendant la pandémie, en Corée du Sud, quelques constructeurs ont suspendu provisoirement leurs chaînes de production dès les deux premières semaines de février en raison de rupture de stocks, avant même la propagation à grande échelle de la pandémie dans le pays. Certains opérateurs japonais ont subi le même sort, ils ont décidé de geler leur production pour le même motif au lendemain de l’arrêt de la production dans la province de Wuhan.