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International

Ce que révèle le boycott de la visite de Tebboune en Chine par la presse algérienne


Rédigé par Hichem Aboud Mercredi 19 Juillet 2023

Fait sans précédent. Pour la première fois dans l’histoire, la presse algérienne ne souffle pas mot sur la visite d’Etat effectuée par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, en Chine. Après avoir annoncé son envol vers la Chine à partir de Doha où il va séjourner 48 heures, la presse algérienne, qu’elle soit gouvernementale ou privée, n’a plus donné la moindre information sur le président.



Photo: droits réservés.
Photo: droits réservés.
Alors que sa visite à Moscou, un mois plus tôt, avait fait l’objet d’une large couverture par les médias algériens celle effectuée en Chine a été superbement ignorée par l’ensemble de la presse algérienne. Au premier jour de la visite, comme l’attestent les captures d’écran des portails électroniques des grands quotidiens et de l’agence de presse (gouvernementale), pas un mot sur l’arrivée du président Tebboune en Chine ni sur ses activités. 

Même la télévision publique avec toutes ses chaînes n’a consacré à la sortie chinoise de Tebboune que quelques minutes en montrant des images de son arrivée à l’aéroport de Pékin.

Très bizarre comme attitude d’une presse totalement inféodée au régime en place. Que pourrait bien cacher ce boycott que tout le monde semble ignorer ? Tout a commencé le 9 juillet dernier par un communiqué de la Direction Générale de la Communication de la présidence de la République. Un communiqué qui « rappelle les règles de publication d'informations relatives à l'activité présidentielle ». A savoir « la publication et la diffusion d'informations prétendument liées à des activités officielles, doivent émaner exclusivement de la Direction générale de la communication de la présidence de la République. » Le communiqué termine sur un ton menaçant « la Direction générale de la communication appelle une fois de plus au strict respect des lois de la République et de la déontologie de la profession, et prévient que tout recours à d'autres sources s'agissant de l'activité présidentielle relève de la propagande et de l'infox, ce qui engage la responsabilité de l'auteur qui en répondra. » C’en était assez pour irriter les journalistes algériens déjà soumis à la censure, aux pressions de toutes sortes et à l’humiliation pour qu’une grogne profonde s’empare des salles de rédaction. Une grogne encouragée à dessein par les services de la Direction Général de la sécurité Intérieure à travers ses relais dans les salles de rédaction.

L’auteur de ce communiqué n’est autre qu’un certain Kamel Sid Saïd, le fils de l’ancien ministre des Postes et télécommunications sous le gouvernement de Mouloud Hamrouche en 1989. Un homme qui n’a jamais exercé le journalisme qu’à travers quelques chroniques publiées dans un journal dont l’audience ne dépasse pas le seuil de sa salle de rédaction et qui brille par son extraordinaire taux d’invendus malgré son très faible tirage. 

Cependant, Kamel Sid Saïd s’appuie sur ses relations avec les services de renseignements pour lesquels il sert à la fois d’indicateur et agent d’exécution des basses besognes dans les institutions le plus en vue. C’est ainsi, qu’il avait été introduit par ces mêmes services dans CEVITAL, le holding du richissime Issad Rebrab, en qualité de chef de service de communication. Sa mission consistait beaucoup plus à surveiller le patron de CEVITAL que de gérer sa communication. Ce sont ces mêmes services qui l’ont placé à la présidence de la République au lendemain de l’investiture de Tebboune. Il est nommé par décret présidentiel le 26 décembre 2019, conseiller chargé de la communication en même temps que trois autres conseillers. Mais, pour avoir plus de poids au sein de la présidence de la République, il passe du statut de conseiller à celui de Directeur Général.
En tant que DG de la communication, il donne des ordres même au porte-parole de la présidence, un certain Samir Aggoune. « Un porte-parole fantôme qui n'apparaît que pour lire des communiqués lors des remaniements des gouvernements » relèvent de nombreux observateurs. Kamel Sid Saïd fait le vide autour de lui et sa Direction Général de la Communication est une coquille vide. Elle gère à peine le portail électronique de la présidence de la république qui ne publie qu’en langue arabe et se contente de communiquées laconiques sur les rares activités du président de la République et sur les activités du DG de la communication qui se hisse au même niveau que le président.

Si ce DG de la communication se permet de se mettre au même diapason que le Président de la République en partageant avec lui le portail électronique de la présidence c’est qu’il a des parrains solides sur lesquels il peut compter. Il est leur homme de confiance. Et comment ? On ne se permet pas provoquer le boycott de la couverture médiatique d’une importante visite du chef de l’Etat si l’on ne bénéficie pas de soutiens solides dans les structures les plus influentes de l’Etat.

A voir les unes des journaux, le lendemain de la 1ère journée de la visite de Tebboune en Chine, on a du mal à croire ses yeux. Imitant l’APS, la très officielle agence de presse, le quotidien francophone numéro 1 du pays, El-Watan n’a pas publié la moindre information sur l’activité du président. D’autres quotidiens se sont contentés d’un streamer ou d’une oreille à la une préférant accorder les grandes manchettes à une déclaration insignifiante du vieux président du Conseil de la nation,  Salah Goudjil (93ans) ou aux résultats du baccalauréat.

En Chine, le boycott a été chuchoté dans l’oreille de Tebboune par certains de ses proches exaspérés par le comportement de Kamel Sid Saïd. Mais, impuissant devant les parrains de son DG de la communication, il fera la sourde oreille. Il se contentera de voir quelques photos de sa visite en Chine, sur le portail de la présidence, accompagnées d’une légende d’une ligne et demie et sans aucune vidéo. Le président Tebboune sait d’où vient le coup et ne dispose pas de courage suffisant pour entrer en confrontation avec ceux qui détiennent les véritables rênes du pouvoir.