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Automobile : Des observateurs espagnols mettent en garde contre la mise à niveau de l'industrie marocaine


Rédigé par L'Opinion Mercredi 26 Novembre 2025

Porté par des coûts compétitifs, une stratégie électrique assumée et une logistique taillée pour l’export, le Maroc s’impose comme un nouveau pôle automobile pour l’Europe. Un repositionnement industriel qui rebat les cartes face à une Espagne en perte de vitesse.



Le paysage automobile européen est en pleine recomposition, et le Maroc s’y affirme comme un acteur central. Longtemps cantonné au rôle de « chaîne d’assemblage à bas coût », le Royaume revendique désormais une ambition industrielle assumée : devenir le principal hub de production automobile du pourtour méditerranéen, en particulier pour le véhicule électrique. Une dynamique relevée par le média ibérique Motorpasión, qui constate la montée en puissance spectaculaire du secteur marocain pendant que l’Espagne, traditionnel deuxième producteur européen, peine à maintenir son rang.
 
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Au premier semestre 2025, la production marocaine a bondi de 36 %, tandis que l’Espagne accusait une baisse de 8,4 %. Le Royaume devrait frôler le million de véhicules produits à la fin de l’année, et vise 1,4 million à l’horizon 2030. Déjà premier producteur africain et cinquième exportateur de voitures vers l’Union européenne, le Maroc a expédié près de 195 000 véhicules vers le marché européen en six mois, soit 11 % des importations totales de l’UE.
 
Cette percée s’appuie sur trois leviers structurants : des coûts imbattables, une logistique ultraperformante, et un effet d’entraînement industriel assumé. L’écart salarial entre l’Europe et le Maroc est régulièrement cité : le salaire d’un opérateur français équivaut, selon le rapport, à l’emploi de dix travailleurs à Tanger. À cela s’ajoute une facture énergétique sensiblement inférieure à la moyenne européenne — un avantage crucial dans une industrie où chaque kilowattheure compte.
 
Le port de Tanger Med, véritable poumon logistique du Royaume, complète cette compétitivité. En quelques jours, voitures et composants traversent la Méditerranée pour rejoindre les marchés européens. Autour de cette infrastructure, un écosystème de fournisseurs s’est consolidé : Valeo, Gestamp, CIE Automotive, Antolin ou Teknia y produisent désormais des pièces destinées à des véhicules vendus à travers l’Europe.
 
Les constructeurs mondiaux, eux, ont massivement investi. Renault a fait de Tanger et Somaca des piliers de sa stratégie, dépassant les 400.000 véhicules assemblés en 2024, notamment les Dacia Sandero, Jogger, Renault Express et les petits modèles Mobilize. Stellantis, de son côté, a transformé l’usine de Kénitra en un site phare, lui allouant 1,2 milliard d’euros pour doubler sa capacité à 535.000 unités annuelles et intensifier la production d’électriques urbains comme l’Ami, le Rocks-e ou le Topolino.
 
Le Royaume n’entend pas se limiter à l’assemblage : il sécurise des maillons clés de la chaîne de valeur électrique. Plusieurs géants chinois des matériaux et des batteries — Hailiang, Shinzoom, BTR New Material Group — y ont annoncé des investissements majeurs, attirés par les incitations fiscales, l’accès aux matières premières critiques comme le cobalt et la proximité immédiate du marché européen. Les exportations de composants électroniques et de pièces destinées à des marques comme Tesla atteignent déjà des niveaux historiques.
 
Face à cette montée en puissance, l’Espagne traverse, selon le rapport, une phase délicate. Sa production automobile recule de plus de 5 % en 2025, ses exportations chutent de 8,6 %, et ses constructeurs souffrent de la faible demande allemande et française. À cela s’ajoutent des coûts énergétiques parmi les plus élevés d’Europe et une transition électrique plus complexe que prévu. Les acteurs espagnols s’alarment : sans baisse des charges, sans gigafactories pleinement opérationnelles, sans modèles électriques de volume et sans politique industrielle cohérente, les nouveaux projets risquent de migrer vers des zones plus compétitives. Le Maroc apparaît alors comme une alternative évidente.
 
Certaines décisions confirment déjà cette tendance. La prochaine génération des Citroën C4 et C4 X ne sera plus fabriquée en Espagne : Stellantis a choisi de transférer la production de Madrid à Kénitra dès 2029. Un signal fort pour toute l’industrie européenne : les projets suivent désormais les équations économiques les plus favorables, et le Royaume offre un terrain industriel de plus en plus irrésistible.
 
Pour autant, le rapport ibérique souligne que ce basculement n’est pas nécessairement synonyme de confrontation. La complémentarité pourrait prévaloir, notamment à travers des chaînes de valeur partagées. Renault en offre déjà l’exemple, avec des batteries assemblées en Espagne pour des modèles montés au Maroc. Ce modèle, s’il se généralise, pourrait renforcer les deux rives du Détroit.
 
Le Maroc, de son côté, avance sans ambiguïté : industrialisation, électrification, formation, montée en gamme et intégration locale. Le pays s’impose ainsi comme un acteur industriel majeur, déterminé à occuper un espace laissé vacant par l’Europe du Sud. L’Espagne s’inquiète, l’Europe observe, mais le mouvement est lancé : la machine automobile marocaine tourne désormais à plein régime, et rien n’indique qu’elle compte ralentir.



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