​Mission INSARR 2025 : l’AIEA confirme l’excellence opérationnelle du réacteur TRIGA Mark II

Cette reconnaissance dépasse la simple validation technique : elle consolide le rôle stratégique du Maroc comme acteur crédible et responsable du nucléaire civil, capable de conjuguer performance opérationnelle, rigueur scientifique et rayonnement international. Elle souligne également la position du Royaume comme centre régional d’excellence scientifique et technologique, apte à soutenir la recherche, l’innovation et le développement durable à l’échelle africaine et mondiale, tout en jouant un rôle moteur dans le transfert de compétences nucléaires vers les pays du continent.

La mission INSARR s’inscrit dans le programme Integrated Safety Assessment of Research Reactors, un processus destiné à évaluer la sûreté et la performance des réacteurs de recherche selon des critères harmonisés au niveau international. Sollicitée par le Maroc, cette mission avait pour objectif d’obtenir une évaluation indépendante du niveau de sûreté du TRIGA Mark II et de mesurer l’efficacité des efforts entrepris au cours des dernières années.

Pendant cinq jours, une équipe pluridisciplinaire d’experts venus d’Argentine, de Bulgarie et de France, accompagnée d’un spécialiste de l’AIEA, a conduit une série d’analyses approfondies, incluant l’inspection des installations, l’examen des procédures internes, la revue de la documentation réglementaire et technique, ainsi que des échanges détaillés avec les ingénieurs, opérateurs et responsables impliqués dans l’exploitation du réacteur.

Cette démarche intégrative a également mobilisé les représentants du ministère de la Transition énergétique et du Développement durable et de l’Agence Marocaine de Sûreté et de Sécurité Nucléaires et Radiologiques (AMSSNuR), reflétant la cohérence et l’efficacité du système national de gouvernance nucléaire. Les experts ont examiné l’ensemble des aspects critiques de la sûreté, notamment la gouvernance, l’exploitation, l’analyse de sûreté, la maintenance, la gestion du vieillissement des équipements, la radioprotection, la conduite des expériences et la préparation aux situations d’urgence.

Cette évaluation exhaustive témoigne de la volonté du Maroc d’inscrire ses installations nucléaires dans une dynamique d’amélioration continue et de conformité durable aux standards internationaux.
 

Mis en service en mai 2007, le TRIGA Mark II est un réacteur de type piscine à eau légère d’une puissance de 2 MW, conçu pour répondre à des besoins scientifiques, industriels et médicaux en constante évolution. Il contribue notamment à la production de radio-isotopes essentiels tels que l’iode-131 et le technétium-99m, indispensables au diagnostic et au traitement de nombreuses pathologies, tout en soutenant des programmes de recherche fondamentale et appliquée.

Le réacteur permet également la réalisation d’analyses par activation neutronique, utilisées dans la géologie, l’environnement ou l’industrie, la conduite d’essais sur des matériaux avancés, ainsi que la formation spécialisée de chercheurs, d’ingénieurs et d’étudiants marocains et africains.

Sa reconnaissance internationale est confirmée par sa désignation comme Centre International basé sur les Réacteurs de Recherche (ICERR) et par son intégration au programme Internet Reactor Laboratory (IRL), deux distinctions qui renforcent sa vocation à diffuser l’expertise scientifique marocaine à l’échelle continentale et mondiale, et à soutenir activement la coopération scientifique Sud–Sud.
 

Depuis sa mise en service, le TRIGA Mark II a fait l’objet d’audits réguliers lors de missions internationales en 2006, 2008, 2009, 2014 et 2019, illustrant une culture institutionnelle fondée sur la transparence, la responsabilité et la recherche permanente de l’excellence.

Comme l’a souligné le chef de mission de l’AIEA, Joseph Christensen, en sollicitant cette nouvelle évaluation, le Maroc réaffirme son engagement à placer la sûreté au cœur de l’exploitation du réacteur. Cette approche s’inscrit dans une logique de gestion structurée, intégrant systématiquement les recommandations issues des missions précédentes et les retours d’expérience internationaux.

La mission INSARR 2025 a permis de confirmer la capacité du réacteur à fonctionner selon des standards élevés, et de démontrer la stabilité des processus internes grâce à une organisation claire et à une équipe expérimentée.

Les experts de l’AIEA ont mis en évidence plusieurs éléments clés, témoignant de la maturité technique et organisationnelle du réacteur :
 

❖ Un système de management structuré, aligné sur les référentiels internationaux, garantissant la traçabilité des activités et une prise de décision rationnelle.
❖ Des programmes de maintenance et de contrôle appliqués avec rigueur, assurant la fiabilité des équipements et la prévention des incidents.
❖ Une montée en compétence continue du personnel, soutenue par des formations régulières et par une participation active aux programmes internationaux.
❖ Une radioprotection maîtrisée, garantissant la sécurité des travailleurs, du public et de l’environnement.
❖ Une intégration cohérente des volets sûreté et sécurité, facilitant la coordination opérationnelle et la gestion des risques.
 

Ces constats confirment que le TRIGA Mark II constitue aujourd’hui une plateforme régionale d’innovation, de formation et de coopération scientifique.
 

Pour consolider ces performances, l’équipe INSARR a formulé plusieurs recommandations :
 

❖ Actualisation des termes de référence du Comité de sûreté et de sécurité.
❖ Généralisation des revues périodiques de sûreté.
❖ Renforcement du programme de gestion du vieillissement des systèmes et composants critiques.
 

Une mission de suivi est programmée en 2027, afin de vérifier l’avancement des actions et de garantir la continuité opérationnelle du réacteur. Ces recommandations constituent une feuille de route claire pour maintenir un niveau d’exigence élevé et durable.
 

La production nationale de radio-isotopes médicaux, tels que l’iode-131 et le technétium-99m, revêt une importance stratégique majeure pour le système de santé marocain et la souveraineté industrielle du Royaume. Ce projet, régulièrement mis en avant dans les précédents rapports du Conseil d’administration du CNESTEN et soutenu par des investissements significatifs, constitue un levier essentiel de souveraineté sanitaire, économique et industrielle.

Trois dimensions expliquent sa centralité :
 

1. Criticité médicale : rôle crucial des isotopes dans le diagnostic et le traitement de nombreuses pathologies.
2. Vulnérabilité économique : dépendance aux marchés internationaux et volatilité des approvisionnements.
3. Opportunité industrielle : développement d’une filière radiopharmaceutique nationale compétitive, génératrice de valeur ajoutée et d’emplois qualifiés.

Le décret autorisant la construction du TRIGA Mark II reposait sur un programme à vocation socio-économique, visant à produire localement des radio-isotopes auparavant importés, tout en soutenant la recherche scientifique et la formation de compétences marocaines et africaines dans le domaine nucléaire.

Depuis sa mise en service, le réacteur a principalement assuré l’analyse par activation neutronique et la formation. La production de radio-isotopes, bien que centrale à son objectif initial, reste à opérationnaliser pleinement. La mission INSARR 2025 pourrait représenter une opportunité majeure pour accélérer la mise en production, tout en sécurisant les conditions techniques et réglementaires nécessaires à son développement effectif.

L’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) pour l’iode-131 obtenue en 2020, par le CNESTEN, a démontré la capacité du Maroc à répondre aux standards pharmaceutiques internationaux. La mission INSARR 2025 confirme la maturité opérationnelle du réacteur, la solidité du système de management et la conformité des procédures aux standards internationaux, réduisant les risques techniques et réglementaires.

Les bénéfices pourraient contribuer au renforcement de la souveraineté sanitaire et industrielle, au développement d’une filière radiopharmaceutique nationale et à la création d’emplois qualifiés, tout en soutenant la stabilité des approvisionnements.  INSARR 2025 pourrait ainsi ouvrir la voie à une montée en capacité progressive et maîtrisée de cette production stratégique.
 

Fort de sa reconnaissance internationale et de ses performances, le Maroc vise à devenir un acteur pivot du nucléaire civil en Afrique. Cette ambition se traduit par :
 

❖ Soutien aux pays voisins dans le développement de compétences nucléaires.
❖ Mise en place de programmes de formation spécialisés.
❖ Contribution à la sécurité radiologique régionale.
❖ Renforcement de la coopération Sud–Sud dans les sciences et technologies nucléaires.
 

Le TRIGA Mark II s’affirme ainsi comme un catalyseur régional de transfert de savoir-faire, de formation et de coopération scientifique, consolidant la position du Maroc comme centre d’excellence nucléaire sur le continent.

La mission INSARR 2025 marque un tournant décisif pour le programme nucléaire marocain. La reconnaissance de la maturité opérationnelle du TRIGA Mark II et de la conformité de ses procédures aux standards internationaux confirme la robustesse du modèle marocain, fondé sur la transparence, la rigueur scientifique et la professionnalisation continue.

Elle pourrait contribuer à réduire les incertitudes relatives à la production nationale de radio-isotopes médicaux et à sécuriser les conditions techniques, organisationnelles et réglementaires nécessaires à l’émergence d’une filière souveraine et résiliente. La mission INSARR 2025 pourrait ainsi soutenir une accélération progressive et maîtrisée de cette production stratégique, renforçant la souveraineté sanitaire, la stabilité des approvisionnements et le développement industriel du Royaume.

Par cette étape majeure, le Maroc réaffirme sa position d’acteur responsable, crédible et ambitieux du nucléaire civil, pleinement engagé pour un usage pacifique, sûr et structurant de l’énergie nucléaire au service de la santé, de la recherche et du développement durable.