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Walid Regragui, Cœur de Lion


Rédigé par Nizar DERDABI le Mercredi 14 Décembre 2022



Walid Regragui, Cœur de Lion
Tout le peuple marocain retient son souffle. Et avec lui c’est également tout le monde arabe et le continent africain qui se tiennent debout derrière cette valeureuse équipe des Lions de l’Atlas pour essayer de leur transmettre leur force et leur foi en leur victoire.

Alors que l’équipe nationale marocaine se prépare à relever le défi de battre les champions du monde en titre, l’équipe de France menée par le meilleur joueur de la planète Kylian Mbappé, les experts de la planète football essayent encore de déchiffrer le secret qui se cache derrière la réussite des Lions de l’Atlas. Est-ce le succès d’une équipe constituée de joueurs très bons techniquement sur le plan individuel qui ont réussi à se sublimer collectivement sous l’impulsion d’un entraineur national, la réussite d’un game plan qui se base sur une défense regroupée et un pressing de tous les instants qui parvient à neutraliser le jeu offensif adverse, l’apport phénoménal des supporters dans les gradins ou tout simplement les « dieux du football » qui penchent en faveur du Maroc pour qu’à chaque fois les tirs des attaquants adverses soient repoussés par les poteaux de Yassine Bounou ?

Walid Regragui : le Head coach et le facteur X

Il y a un peu de tout ça à la fois ! Mais pour moi, le facteur X, l’élément déterminant derrière cette dynamique de victoires est incontestablement Walid Regragui. Critiqué d’emblée dès sa prise de fonction pour son manque d’expérience internationale alors que les journalistes et supporters marocains espéraient un profil avec plus de références mondiales pour enfin concrétiser par des titres l’immense potentiel dont recèle l’équipe du Maroc. Des entraîneurs stars comme le portugais André Villas-Bollas qui a déjà coaché des équipes habituées à jouer la Champion’s League comme le club de Chelsea par exemple ? Walid Regragui a répondu par la meilleure des manières à cette incertitude exprimée par les amateurs de ballon rond marocains. Il s’est tout simplement attelé à la tâche : « Je suis arrivé en pompier de service il y a trois mois. J'ai beaucoup voyagé, j'ai beaucoup travaillé avec les joueurs, on a fait beaucoup de vidéo, de tactique, de travail pour qu'ils comprennent vraiment ce que je veux ».

Tout est dit dans cette déclaration du coach Walid. En un temps record, il a tissé des liens avec ses joueurs cadres en se déplaçant pour les voir jouer dans leurs clubs et discuter avec eux les yeux dans les yeux. Ce qui explique la grinta des joueurs prêts à mourir pour lui sur le terrain et la complicité évidente entre tous les joueurs et le staff. Il a ensuite passé des journées à peaufiner la tactique la plus adaptée aux capacités techniques de ses joueurs. Et enfin, il a exposé ses idées et sûrement beaucoup échangé avec ses joueurs pour choisir le meilleur visage que doit adopter l’équipe. Résultat : on assiste à une équipe soudée sur le terrain, disciplinée dans l’application des consignes et surtout imprégnée de l’esprit de combativité et d’abnégation nécessaires pour la réalisation d’un tel parcours en Coupe du Monde.

Après, ce qui saute aux yeux, c’est la dimension mentale qu’a prise l’équipe au fur et à mesure que la compétition avançait. Car les dimensions techniques, tactiques et stratégiques ne sont pas suffisantes à elles seules pour réaliser un tel parcours. Le Maroc est arrivé en demi-finale en ayant franchi un des parcours les plus difficiles de l’Histoire de la compétition : les 2ème et 3ème de la dernière Coupe du Monde (Croatie et Belgique), suivis par l’Espagne et le Portugal qui comptent parmi les équipes les plus dangereuses offensivement. Et pour parvenir à réaliser pareille série de victoires dans une compétition qui bouffe aussi intensément le physique et le mental comme peut l’être la Coupe du Monde, la dimension mentale est le facteur qui fait toute la différence.

La force mentale, c’est ce qui permet de dépasser les limites physiques quand les batteries sont à plat car on a avalé des kms de courses à haute intensité et remporté des dizaines de duels âpres et disputés. La force mentale, c’est ce qui permet de supporter la douleur et les crampes et de jouer malgré la blessure, comme ce fut le cas de Hakimi, Saîss et Mazraoui. Le mental c’est ce qui permet de gérer le stress et la tension liés à ce type de match pour ne pas être dépassé par l’enjeu et faire les mauvais choix de passe ou de marquage défensif. Le mental, c’est ce qui permet de rester dans le match après avoir raté une occasion franche ou subi une avalanche d’occasions de but en continuant à appliquer les consignes et à ne pas céder aux provocations adverses ou aux erreurs de l’arbitre. La force mentale, enfin, c’est ce qui permet de ne pas avoir le pied ou le bras qui tremblent lorsqu’il faut tirer un pénalty ou faire l’arrêt ou le tacle fatidique qui sauvera l’équipe.

Comment atteindre l’état de grâce ?

L’esprit de la gagne qu’a réussi à insuffler Walid Regragui à ses joueurs pour réaliser pareil parcours est pour moi la véritable prouesse qui a permis aux joueurs de se transcender pendant les matchs et sortir les prestations les plus abouties de leur carrière. A titre d’exemple, les deux dernières masterclass réalisées par Azzedine Ounahi lors des matchs contre l’Espagne et le Portugal ont ébahi ses coéquipiers et son staff dans son club d’Angers, mais aussi ses coéquipiers en équipe nationale qui ne l’ont jamais vu atteindre ce niveau de performance. Donc, qu’est ce qui a déclenché ce déclic qui lui a permis d’atteindre ce niveau de performance inégalé ? Comme d’ailleurs plusieurs autres joueurs de l’équipe nationale qui se sont révélés aux yeux de la planète football en étant tous ensemble au sommet de leur art : Amrabet, Bounou, Boufal... Ce niveau de concentration extrême et d’euphorie mentale, c’est ce qu’appellent les sportifs professionnels de très haut niveau « être dans la zone ».

Novak Djokovic avait expliqué que la zone était un état de grâce, une sensation de maîtrise que tous les sportifs recherchent, mais qu'ils n'atteignent que rarement. Cet état mental où tout vous réussit, où les joueurs se sentent invincibles, l’équipe le doit en grande partie à Walid Regragui. Il a fait confiance à tout son groupe, en impliquant les remplaçants, à l’image de Attiat-Allah qui a été titulaire contre le Portugal et qui a réalisé lui aussi une des performances les plus abouties de sa vie.

Dans sa conférence de presse du 13 décembre Walid Regragui a été très clair : « On est en mission. Pas de fatigue. Demain on va courir ! ». On peut donc s’attendre sans crainte à ce que les joueurs marocains se donnent corps et âmes pour cette bataille de demi-finale. Avec l’engagement physique nécessaire, avec la tactique adéquate, avec le mental de guerrier et avec un grand cœur. Car Walid Regragui est d’abord un homme avec un grand cœur. Un cœur de Lion ! Il a foi en son équipe. Et ses joueurs le lui rendent très bien sur le terrain. Coach Walid a compris que ce n’est pas le talent tout seul qui fait la différence, mais c'est le cœur.

Une demi-finale indécise, mais un Maroc qui a les armes pour créer la surprise

Mais revenons au match qui va opposer le Maroc à la France. L’équipe de Didier Deschamps s’avance avec ses atouts offensifs, ses joueurs d’expérience dans toutes les lignes et la confiance d’un champion en titre.  Mais ce qui est sûr, c’est que Didier Deschamps ne va pas aborder ce match dans la peau du favori. Son staff va bien étudier le dispositif tactique de l’équipe du Maroc pour enfin essayer de trouver la faille qui lui permettra de percer la muraille marocaine. Et les Français ont les armes qu’il faut pour faire mal à la défense marocaine. La France est capable d’attaquer de différentes manières. Soit en passant par les côtés avec Kylian Mbappé et Ousmane Dembélé. Ou bien en essayant de casser les lignes par l’intermédiaire de Griezmann ou Rabiot, auteur d’une Coupe du Monde très réussie. Et la connexion Griezman-Giroud va encore être très sollicitée. Les Français espèrent certainement forcer la citadelle quasi imprenable du Maroc en variant leurs schémas d’attaque.

Les Français voudront certainement imposer un rythme soutenu dès le début du match pour essayer de marquer le plus rapidement possible et ne pas tomber dans un faux rythme qui favoriserait le Maroc. Si le Maroc parvient à maintenir l’égalité, plus les prolongations et la séance des tirs au but approcheront plus les Français seront nerveux car ils connaissent la valeur de Bono dans cet exercice, alors que Lloris n'est pas un spécialiste des penalties.

Pour le Maroc beaucoup d’incertitudes pèsent sur le onze qui va fouler le terrain et sur l’état de fraîcheur des titulaires. Mais ce qui est probable, c’est que le Maroc risque de commencer son match avec un bloc bas en attendant de voir les intentions et la tactique des Bleus. Car la France est une équipe de contre qui n’aime pas monopoliser le ballon. Le match verra aussi d’intenses duels dans les couloirs : Hakimi vs Mbappé et Mazraoui (ou Attiat-Allah) vs Dembélé.

Walid Regragui est conscient de la force de frappe de l’équipe de France. Et il est conscient que son équipe n’a jamais été confrontée à une ouverture du score de l’équipe adverse. Le coach va sûrement les préparer à cette éventualité. Et il ne serait pas étonnant de voir l’équipe nationale être plus entreprenante offensivement dès le début du match. Car cela pourrait perturber l’animation de jeu des Français et permettre d’ouvrir le score.

Quels seront les keys player de ce match ? Hakimi n’a pas encore marqué de but lors de ce mondial et je m’attends à une masterclass de sa part, devant son meilleur ami en club Mbappé. Ziyech devrait avoir beaucoup d’opportunités sur son aile gauche face à un Théo Hernandez beaucoup moins à l’aise défensivement que sur le plan offensif. Et je mettrai également une pièce sur un joueur qui va sortir du banc des remplaçants (Sabiri, Chaîr ou Zarouri) pour prendre la place de joueurs déjà usés physiquement et donner la possibilité à un jeune joueur de faire parler ses qualités et son insouciance.

Souhaitons bonne chance et bon courage à nos valeureux Lions de l’Atlas.

Dima Maghrib !
 



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