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Culture

Tony Bennet, un crooner pas Gaga


Rédigé par Anis HAJJAM le Lundi 31 Juillet 2023

Atteint de la maladie d’Alzheimer depuis 2016, le chanteur américain refuse de mettre fin à sa carrière. Il meurt à l’âge de 96 ans vendredi 21 juillet à New York. Il aura grandement séduit Franck Sinatra, son mentor, avant d’inscrire son nom dans le Great Song Book. Un parcours de plus de sept décennies, 70 albums et 19 Grammy Awards.



Tony Bennet doit son 4e et dernier numéro 1 à un duo avec Lady Gaga.
Tony Bennet doit son 4e et dernier numéro 1 à un duo avec Lady Gaga.
En 2006, alors âgé de 80 ans, l’artiste ressent comme une urgence. Il enregistre un album de duos avec Elton JohnCéline DionStingMichael BubléGeorge MichaelStevie WonderBarbra Streisand. Il sort l’année suivante un live en y invitant Christina Aguilera. Entreprise grotesque ? Non lorsqu’on sait qu’il fait ses premiers pas dans la musique populaire, de masse donc, avant d’enlacer le jazz. Miles Davis annonce bien à une période tardive de sa carrière (1985) que l’avenir du jazz se positionne dans la pop, en empruntant « Time after Time » à Cyndi Lauper. Tollé chez les puristes, mais le trompettiste va plus loin en reprenant « Human Nature » du groupe Toto avec la voix de Michael Jackson. Tony Bennet, lui, enfonce le diapason en s’associant à des chanteuses telles Lady Gaga, Faith Hill, Mariah Carey ou Queen Latifah. En revanche, on comprend mieux sa démarche quand il fait appel à Aretha Franklin, Amy Winehouse ou Norah Jones. En 2018, il signe d’autres duos avec la Canadienne Diana Krall avant de retrouver en 2021 Lady Gaga (décidément !) pour une série de reprises de standards de jazz de Cole Porter. Son mentor, Frank Sinatra, qui n’assiste pas à ces fluctuations, dit en 1965 dans un entretien accordé au magazine américain Life : « Tony Bennet est le meilleur chanteur du secteur. Il m’excite quand je le regarde. Il m’émeut. C’est le chanteur qui fait passer ce que le compositeur a en tête et probablement un peu plus. »
 
Chanteur, peintre, acteur

Aux commandes d’un parcours de plus de 70 ans couronnés de 19 Grammy Awards pour 70 albums, Tony Bennet naît au Queens à New York en 1926. Il est vite happé par les performances de l’artiste de music-hall Al Jolson, du musicien de jazz et poète Bing Crosby et de la chanteuse et actrice Judy Garland, mère de Liza Minnelli. La voix de Louis Armstrong lui fait également tourner la tête. Adolescent, il est admis dans la High School of Industrial Art de New York. A 18 ans, Tony Bennett est enrôlé dans l'armée de terre des États-Unis  au cours des dernières étapes de la Seconde Guerre mondiale. Deux années plus tard, après avoir traversé la France et l’Allemagne, il rentre à la maison, se consacrant au chant et à la peinture. En 1951, il sort ce qui devient son premier grand succès « Because of You ». Il est produit par le célèbre musicien, chanteur et chef de chœur Mitch Miller. Il se classe numéro 1 aux Etats-Unis comme plus tard « Rags to Riches » (1953) et « Stranger in Paradise » (1955). Son quatrième et dernier numéro 1, il n’en jouit qu’en 2014 pour « Cheek to Cheek » interprété en duo avec Lady Gaga. En 1962 , le chanteur français Sacha Distel compose « Marina », un thème destiné à illustrer « L'Orgueil », un tableau du réalisateur Roger Vadim  dans le film à sketches « Les sept péchés capitaux ».

En 1963, le thème est confié au parolier Jack Reardon. La chanson, intitulée « The Good Life », est ensuite proposée à Tony Bennet. Sa sortie est un évènement et devient une référence du crooner. Le texte dit en substance : « La belle vie, faite de plaisirs, semble être l'idéal (…) Tu ne seras pas vraiment amoureux si tu ne prends aucun risque, sois franc envers toi-même, ne fais pas semblant avec l'amour. » Sacha Distel enregistre sa version en français, « La Belle vie », la même année. Les succès pour Bennet s’enchaînent jusqu’à l’explosion du rock qui lui vaut un douloureux passage à vide, les Beatles étant dans les parages. Il a cette malheureuse phrase adressée comme un appel de détresse à sa famille : « Il semble que les gens ne veulent pas entendre la musique que je fais. » L’un de ses fils le prend en charge et le fait jour dans des collèges et de petites salles de spectacles de New York. Dans les années 1980 et 1980, Tony Bennet se refait une santé auprès d’un public jeune sans pour autant triturer le style musical qui le caractérise depuis ses débuts. De lui-même, l’interprète de « I Left my Heart in San Francisco » dit qu’il est « un ténor qui chante comme un baryton ». La scène et l’auditoire sont ses seules raisons de vivre. En 2006, celui qui préfère laisser un catalogue à succès plutôt que des disques à succès déclare à l’agence Associated Press : « J’aime divertir le public, lui faire oublier ses problèmes. Je pense que les gens sont touchés s’ils entendent quelque chose de sincère et d’honnête, avec peut-être un peu d’humour. J’aime simplement faire en sorte que les gens se sentent bien quand je joue. » Chanteur, peintre et acteur jouant essentiellement son propre rôle, Tony Bennet est ce brodeur de standards devenus mythiques.
 
 Anis HAJJAM
 
 
 
 
 
 
 



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