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Présidentielle turque : Un avantage pour Erdogan loin de décourager l’opposition


Rédigé par L'Opinion Dimanche 28 Mai 2023

Les bureaux de vote ont ouvert dimanche en Turquie pour un second tour inédit des élections présidentielles entre le président actuel, Recep Tayyip Erdogan, et son principal opposant, Kemal Kılıçdaroğlu.



Présidentielle turque : Un avantage pour Erdogan loin de décourager l’opposition
Le président Erdogan a exhorté samedi les électeurs à se rendre massivement aux urnes pour le second tour de la présidentielle, dont il apparaît. En face, l’opposant Kiliçdaroglu et ses partisans refusent de jeter l’éponge.

L'opposant Kemal Kiliçdaroglu espérait que les difficultés économiques, la baisse du niveau de vie face à l'inflation galopante, les défaillances de l'Etat lors du séisme meurtrier de février permettraient de tourner la page du "sultan" Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans.
Mais le président sortant s'est bâti une solide avance lors du premier tour le 14 mai, avec 49,5% des voix contre 44,9% à son principal adversaire, et son Parti de la justice et du développement (AKP) a obtenu la majorité au Parlement lors des élections législatives qui se tenaient en parallèle, ce que les sondeurs ont notamment expliqué par une poussée inattendue du vote nationaliste.

Dans l'entre-deux-tours, Recep Tayyip Erdogan a reçu le soutien du troisième homme de la présidentielle, le nationaliste Sinan Ogan, qui a recueilli 5,2% des voix au premier tour. Kemal Kiliçdaroglu a quant à lui obtenu le ralliement d'un autre dirigeant d'extrême droite, Ümit Özdag, chef du Parti de la victoire.

Mais chacun des deux candidat espère mobiliser une partie des huit millions d'électeurs, qui s’étaient abstenus au premier tour du 14 mai, pour faire pencher la balance des urnes de son côté. "Allons-nous achever le travail que nous avons laissé inachevé le 14 mai, avec une majorité écrasante, en espérant que l'écart sera encore plus large demain ?" a lancé samedi Recep Tayyip Erdogan lors d'un meeting devant ses partisans.
 
Il n’y a pas de place au désespoir
 
En face, l’opposition qui soutient Kemal Kiliçdaroglu, porté par six partis, dont le sien, le Parti républicain du peuple (CHP), refuse de baisser les bras et veut continuer à croire à une victoire pour le changement.

Kiliçdaroglu a exhorté les électeurs turcs à "sortir ensemble de ce trou noir". "J'en appelle à tous nos compatriotes, quelle que soit leur opinion ou leur style de vie (...) Tous ceux qui aiment leur pays devraient se rendre aux urnes", a-t-il écrit.

De nombreux citoyens turcs votant pour l'opposition se sont mobilisés pour le second tour de la présidentielle, indépendamment des partis auxquels ils reprochent souvent un manque d'action sur le terrain.

Cette fois, les derniers sondages accordent une avance au chef de l'Etat, mais dans le camp d'en face nombreux sont ceux qui refusent de baisser les bras.
"Il n'y a pas de place pour le désespoir", affirme Behice Sayat, 40 ans, qui gère une agence de
Pour elle, tout a commencé avec un groupe WhatsApp créé par des habitants de son quartier qui souhaitaient dépasser les clivages et échanger avec des électeurs du camp adverse.

Une tâche ardue face au président sortant qui accuse l'opposition au fil de ses discours retransmis en direct sur presque toutes les chaînes de "soutenir le terrorisme" et "les LGBT".
"Le lendemain du premier tour, nous avons commencé à chercher les moyens de dépasser la polarisation et d'atteindre les gens qui croient à la propagande du gouvernement", raconte-t-elle.
 
Le courrier en aide au porte-à-porte
 
"Mon cher voisin, ils te mentent et l'avenir de notre pays nous inquiète", dit la lettre écrite par Mme Sayat et distribuée, avec l'aide de ses amies, à plus de 600 personnes dans son quartier.

Des courriers semblables sont apparus à travers la Turquie, appelant surtout les 8,3 millions d'absentéistes du premier tour à voter.

Cette "nouvelle façon de faire la politique" par le bas prend parfois des formes artistiques, comme des vidéos et des affiches créées par des internautes pour soutenir l'opposition.

Koray Onat, artiste audiovisuel de 32 ans, a ainsi réalisé un clip pour une chanson aiguisée de la jeune musicienne Paptircem qui a été vue plus d'un million et demi de fois sur Twitter.
"Mon Sultan, tes mensonges flottent mais tes mains ne tremblent jamais. Ces adjoints escrocs, tu les as nourris avec ma jeunesse", chante-t-elle tandis que défilent des images d'Erdogan vitupérant, de manifestations d'étudiants réprimées, de villes dévastées par le séisme qui a fait plus de 50.000 morts en février en Turquie.

"Le clip nous a fait sentir qu'on pouvait avoir un impact. Nous avons fait ce que nous avons pu pour gagner ces élections", indique l'artiste.

Pour Ozan Gundogdu, journaliste au quotidien Birgün, de telles initiatives peuvent avoir un effet inattendu.

Un troisième mandat ou une nouvelle vision ?

Près de vingt ans après avoir pris le pouvoir dans son pays, en tant que Premier ministre puis président de la république, Recep Tayyip Erdoğan brigue un troisième et dernier mandat lors du second tour des élections présidentielles turques.

Erdoğan a réussi à obtenir un résultat satisfaisant lors du premier tour, organisé le 14 mai, en remportant 49,50% des voix, contre 44,89% pour son principal rival, Kemal Kiliçdaroglu. Ce premier tour a connu une forte participation avec 88,84% des électeurs sur un total de 64 millions.

Certains bureaux de sondages et analystes s'attendaient à l'échec d'Erdoğan lors du premier tour, en raison du séisme qui a frappé le sud de la Turquie en fevrier  et de ses répercussions sur les zones sinistrées, ainsi que de l'augmentation du taux d'inflation à des niveaux record et de la dépréciation de la livre turque face au dollar américain.

En face, Kılıçdaroğlu, qui cherche à battre Erdoğan lors du second tour de l'élection présidentielle turque, promet aux électeurs une nouvelle vision et une voie différente pour le pays.

Si au premier tour, Kılıçdaroğlu n’a obtenu que 44,89%, il n’en demeure pas moins que ce pourcentage est le plus élevé atteint par un concurrent d'Erdoğan au cours des vingt dernières années. Surtout qu’il a réussi à devancer Erdoğan dans de nombreuses provinces emblématiques comme Istanbul, Ankara, Izmir, Antalya et Adana, et a dominé les provinces à majorité kurde grâce au soutien du Parti démocratique des peuples.