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Le pire défi de l’État-nation


Rédigé par ​Salem AlKetbi le Jeudi 3 Décembre 2020



Le pire défi de l’État-nation
La cohésion communautaire et l’unité nationale sont désormais considérées comme des enjeux stratégiques majeurs pour tous les pays. Il y a quelques années, un tel défi était réservé à des pays non développés.

Mais ces derniers temps, il y a eu de fortes divisions même dans les pays les plus avancés, qui pourraient être encore plus dangereuses à moyen et long terme que celles que connaissent par exemple de nombreux pays de la région arabe et du Moyen-Orient.

Les fossés parmi les peuples ne sont ni un fait passager ni un épisode historique dans le paysage politique. Elles se sont cependant accentuées et propagées dans beaucoup de pays suite à ce qui est connu dans les médias sous le nom de « printemps arabe, ». 

Les organismes terroristes, extrémistes et les États qui les soutiennent, ainsi que celles qui détiennent des projets hégémoniques expansionnistes, ont amplifié la fragmentation sectaire, religieuse et ethnique.

Des pays, par conséquent, ont glissé dans des conflits sectaires et ethniques. Pour d’autres, le risque de faire une guerre à caractère religieux a failli devenir réalité. En Occident, des divisions communautaires de nature religieuse et raciale sont également apparues ces dernières années.

Dans certains pays européens, en particulier, le mouvement d’extrême droite a continué à alimenter les conflits. Alors qu’aux États-Unis, des hommes politiques ont mis en garde contre l’exacerbation des divisions depuis la dernière élection présidentielle, attirant l’attention sur l’impact de ces divisions sur la réputation des États-Unis et leur statut international en tant que modèle de valeurs démocratiques.

Parlant aux médias pour promouvoir ses mémoires personnelles, l’ancien président Barack Obama a admis que les États-Unis étaient devenus une nation « très divisée. » En effet, ces divisions ont pris racine depuis l’élection du président Obama lui-même en 2008. Puis elles ont refait surface plus intensément après l’élection du président Donald Trump en 2016.

Certes, ces clivages ne sont pas tant en rapport avec les slogans politiques et les valeurs des dirigeants et des présidents qu’avec les disparités socio-économiques entre classes, ou entre zones rurales et urbaines. En d’autres termes, il s’agit de la répartition des richesses et du partage des gains du développement entre les classes sociales.

Certains, dont l’ancien président Obama, pensent que les médias sociaux ont largement favorisé la fragmentation en répandant des théories du complot et la désinformation qui, à son tour, conduit à des fausses interprétations. Ils accusent également leurs rivaux politiques de promouvoir ces théories, d’alimenter les scissions dans le monde virtuel et de les ancrer dans l’opinion publique.

Il y a des clivages historiques persistants, y compris entre races et croyances religieuses. Les idées de coexistence, d’acceptation d’autrui et de rejet de la haine et de l’intolérance restent à approfondir, à stabiliser et à diffuser de génération en génération, moyennant un effort institutionnel soutenu.
Bien que la principale inquiétude des hommes politiques et des observateurs au sujet des divisions généralisées soit surtout liée au déroulement du processus démocratique, les implications des divisions l’emportent sur cet aspect (pourtant important).

Les résultats de l’élection présidentielle américaine, qui ont reflété une convergence notable des résultats du vote populaire direct, confirment cette profondeur de la fracture sociétale. Le monde entier a également suivi la violence et le chaos dont certaines villes américaines ont souffert à la suite du meurtre de George Floyd par un officier de police.

À cela s’ajoute qu’un élément central de la supériorité américaine sous l’ordre mondial actuel est lié aux valeurs politiques, économiques et culturelles du modèle américain. Pour beaucoup dans le monde, le modèle américain semble se défaire à cause de ses crises successives. Une intervention rapide est par conséquent exigée pour réparer l’image de marque des États-Unis aux yeux du monde.

Il existe également un réel danger de coexistence entre les composantes de la société américaine. C’est une question fragile, non pas parce qu’elle n’est pas bien intégrée dans la mentalité américaine. C’est parce qu’elle porte sur une question sociétale sensible à toute pratique négative. Les tensions sociales ne sont pas une plaie pour des pays et pas pour d’autres. Ils sont aujourd’hui un mal mondial.
Un remède pertinent pour y répondre est de disposer d’outils juridiques plus stricts pour toutes les formes de haine, d’intolérance, de rejet de l’autre et de toute discrimination fondée sur la religion, la couleur de peau, la race ou le genre.

Plus important encore, il faut s’efforcer d’éradiquer les mouvements extrémistes qui alimentent les discordances et attisent la haine en tant qu’environnement favorable à leur éclosion. Sinon, on risque de sacrifier les fondements de l’État-nation partout dans le monde. Ce serait une grande perte d’un des acquis du processus de paix et de sécurité mondiale.

Salem AlKetbi,
Politologue émirati et ancien candidat au Conseil national fédéral



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