À un peu plus d’un an des prochaines élections, la pré-campagne bat son plein et les partis ont d’ores et déjà enclenché la machine, chacun s’employant à défendre le bilan d’un mandat pénalisé par une conjoncture difficile. Certains politiques multiplient les visites de terrain pour aller à la rencontre des citoyens, d’autres inaugurent des bureaux de proximité pour capter les doléances du quotidien, tandis que les plus prudents misent sur une présence digitale renforcée, revendiquant ici ou là la concrétisation de projets portés durant la mandature.
Chacun use donc de ses ressources pour conquérir un électorat méfiant, ce qui, en soi, relèverait du jeu démocratique, à condition toutefois de ne pas céder aux fâcheuses pratiques frauduleuses, qui vont de la manipulation des médias à la distribution de paniers ou encore le subventionnement intéressé des associations, qui deviennent en période électorale de véritables leviers d’influence. Dans ce climat tendu, l’Intérieur, piloté de coutume par des profils technocratiques, en appelle au calme et planche sur des études techniques pour prévenir ces glissements, désamorcer les crispations, et, surtout, encourager les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales. Le vrai enjeu aujourd’hui comme hier est de mobiliser un corps électoral encore trop peu impliqué – en particulier parmi les jeunes – alors que le taux d’inscription sur les listes électorales ne dépasse pas les 70 % (17.5 millions de personnes). C’est dire que le sursaut de participation enregistré en 2021 est certes louable, mais reste statistiquement timide par rapport à une population aujourd’hui estimée à plus de 36 millions d’habitants.
Réussir ce pari implique néanmoins la réconciliation de la politique avec une exigence morale et organisationnelle. D’autant que les Marocains ne se laissent désormais plus berner par les effets d’annonce, les promesses sans consistance ou les querelles de façade. Ce qu’ils attendent, ce sont des femmes et des hommes réellement engagés, présents sur le terrain tout au long du mandat, et non uniquement à l’approche des échéances électorales. Pour le trio gouvernemental, l’erreur serait donc de reproduire le scénario du précédent Exécutif, où les interférences partisanes et les querelles intestines ont fini par gripper toute action.
Aux yeux du citoyen lambda, ces tensions ne traduisent qu’un déficit de responsabilité et une incapacité à faire front commun, même sous la menace d’une abstention massive. Pire, elles alimentent un peu plus la défiance et l’usure démocratique, chose que le « gouvernement du Mondial » ne pourra pas se permettre. À l’aube d’un rendez-vous historique pour le Royaume, tout faux pas pourrait avoir un écho bien au-delà des urnes.