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Interview avec Habib Karoum : « Le secteur de la Santé accuse un déficit de 65.000 professionnels »


Rédigé par Safaa KSAANI Mercredi 11 Mai 2022

A l’occasion de la Journée internationale des infirmières, célébrée le 12 mai de chaque année, le président de l’association marocaine des sciences infirmières et techniques sanitaires (AMSITS) dresse un bilan des progrès réalisés et appelle à des changements.



- Le secteur de la santé connaît un déficit de plus de 64.000 infirmiers, techniciens et sages-femmes. Comment expliquez-vous ce manque de ressources humaines et comment peut-on faire face à l’exode et la fuite des infirmiers ?

- Le secteur de la santé connaît un déficit de 65.000 infirmiers, techniciens de santé et sages-femmes. Cela s’explique par le nombre important de départs à la retraite et le nombre de professionnels ayant quitté le pays vu la forte attractivité de plusieurs systèmes étrangers de santé (conditions de travail, salaires, etc.).

Ce problème exige des solutions adaptées et efficaces pour pouvoir assurer des soins suffisants et de qualité à la population. Conscient de ce problème, le ministère de la Santé a entamé plusieurs actions pour pallier cette problématique dont l’adoption du statut de la fonction publique sanitaire qui permettra d’inclure certains avantages tel que l’augmentation de la prime de risques et l’indemnité de la garde et l’astreinte.


- Comment la fonction a-t-elle évolué à travers la crise ? Quel a été le rôle des infirmiers dans la prise en charge du malade Covid-19 ?

-La fonction infirmier a évolué à travers l’amélioration du statut des infirmiers et techniciens de santé, la mise en place du système LMD (Licence-Master-Doctorat) et l’amélioration du cursus de formation en augmentant le nombre d’année d’études pour aboutir à trois ans de formation au lieu de deux.

Les infirmiers ont joué un rôle primordial dans la lutte contre le Covid-19 et dans la prestation des services de santé. Ils ont consacré leur temps à prendre soin des patients et sauver des vies. Ils restent le pivot du système national de santé et représentent plus que 50% des ressources humaines du ministère de la Santé. Ils ont également contribué à la mise en place de la stratégie et de la politique du ministère de la Santé et des orientations de l’Organisation Mondiale de la Santé.

En outre des attributions de soins, de gestion du matériel, du temps, l’infirmier a contribué à l’information, à la communication et à l’éducation sanitaire pour limiter la propagation de la pandémie.


- Comment peut-on développer les soins infirmiers et autonomiser les infirmiers au Royaume ?

- Certaines mesures doivent être entreprises pour développer les soins infirmiers et autonomiser les infirmiers au Maroc. Parmi celles-ci se trouvent la création d’un ordre national des infirmiers, l’élaboration du référentiel d’emploi et de compétences (REC), et la création d’une direction de soins infirmiers au niveau central. Sans oublier d’intégrer les cadres infirmiers dans l’élaboration de la politique de santé et dans la prise de décision ainsi que les faire bénéficier de la formation continue adéquate et adaptée à leurs besoins. Leur développement nécessite aussi une motivation morale et financière par la réponse positive à leurs attentes et à leurs dossiers revendicatifs.


- Quelles sont les revendications des infirmiers dans le cadre du dialogue social ?

- Les revendications des infirmiers dans le cadre du dialogue social se résument par : la création d’un ordre national des infirmiers; l’élaboration du référentiel d’emploi et de compétences (REC); l’augmentation de la prime de risque. Ces professionnels exigent également la poursuite du dialogue social au sujet des infirmiers ayant bénéficié de deux et trois ans de formation et de même pour les infirmiers auxiliaires, étant donné que plusieurs promotions n’ont pas été satisfaites du dernier accord signé.

L’ouverture du cycle Master dans les sciences de l’infirmerie et techniques de santé et le recrutement des infirmiers et techniciens de santé, rééducateur, et sages-femmes en chômage font partie de leurs revendications.


- Sur le plan qualitatif, trouvez-vous que la formation de base des infirmiers est conforme au système mondial ? Au moment où la nouvelle réforme de l’éducation est en cours de refonte, ne serait-il pas fondamental de mettre l’accent sur les soft-skills des infirmiers pour un meilleur rapport infirmier-patient ?

- Sur le plan qualitatif on peut dire que la formation dispensée par différents Instituts supérieurs des professions infirmières et techniques de santé est de bonne qualité. Preuve en est, les infirmiers marocains sont sollicités par différents pays développés tels que le Canada, la France, la Suisse, et l’Espagne. Ceci revient à plusieurs mesures et actions entreprises par le ministère de la Santé étant donné que la qualité de la formation des infirmiers et infirmières figure parmi les priorités du «Plan Santé 2025».

Dans ce cadre, le budget affecté à la formation continue a été triplé. Les matières du programme enseignées sont suffisamment adaptées aux exigences du terrain de même que les instituts disposent d’enseignants suffisamment formés et ayant cumulé des expériences.

Lors de la formation de base et grâce à la formation continue, l’accent est mis sur les soft skills des infirmiers. Les thématiques dispensées aux infirmiers portent en général sur les skills indispensables pour assurer un rapport meilleur entre l’infirmier et le patient.

Parmi ces soft-skills enseignés, qui contribuent aussi au développement personnel des infirmiers et techniciens de santé, je cite : l’empathie, les capacités de communication, l’intelligence émotionnelle, la capacité à travailler en équipe, la gestion de stress, la capacité de gérer le temps, l’éthique au travail, la confiance en soi et le leadership.


- A quel point le recours à l’intelligence artificielle serait une valeur ajoutée aux savoir, savoir-faire et savoir-être des infirmiers ?

- Le recours à l’intelligence artificielle serait une valeur ajoutée aux savoir, savoir-faire et savoir-être des infirmiers. Il permettra d’aboutir rapidement aux résultats puisque les solutions d’IA permettent aux professionnels de santé d’explorer rapidement des dossiers pour retrouver les principaux concepts et sujets qui les aideront à accompagner et à soigner un individu. Les professionnels de la santé peuvent extraire rapidement des informations précises, pertinentes et factuelles préalablement organisées par leurs homologues. Ils peuvent ainsi communiquer entre eux rapidement et faiblement.


Recueillis par Safaa KSAANI