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​Le Miracle Doukkali: plus de 25 ans de combat contre l'insuffisance rénale porté par l'Association des Doukkala... Reportage!


Rédigé par Mohamed LOKHNATI le Lundi 29 Décembre 2025

Un acte concret de solidarité internationale est venu, ce samedi matin, renforcer plus d'un quart de siècle de dévouement local. Une forte délégation formée des membres de bureau de l'Association des Doukkala et de plusieurs personnalités et d'invités de marque, présidée par M. Abdelkrim Bencherki, s’est rendue au centre d’hémodialyse Chouaïb Doukkali pour assister à la remise d’un don vital : un premier lot de filtres d’hémodialyse offert par la Fondation polonaise Zdrowé à son partenaire historique, l’Association des Doukkala.



La cérémonie, sobre et empreinte de gravité, célébrée en présence de la directrice de l'hôpital Provincial d'El Jadida Mme Najlae, et de nombreux spécialistes et cadres de la santé public, s’est déroulée dans l’enceinte du service, au doux ronronnement des machines qui sauvent des vies depuis 1999. Elle a scellé, devant les autorités locales, les responsables de l’association et le personnel soignant mené par le Dr Jawad Hassar, la vitalité d’un partenariat qui transcende les frontières.

« Ce don n’est pas un simple équipement, c’est une bouffée d’oxygène pour notre mission , a indiqué Abdelkrim Bencherki, président fondateur de l'Association des Doukkala, dans une déclaration au journal «L'Opinion», ajoutant que les filtres, consommables cruciaux pour la purification du sang, représentent un coût récurrent majeur. Le geste de la Fondation ZDROWE – dont le nom signifie « en bonne santé » en polonais – allège directement cette charge et sécurise l’activité du centre, ...a t-il souligné»

La visite du gouverneur a mis en lumière la pérennité d’un modèle unique, né d’une initiative citoyenne et aujourd’hui reconnu par les plus hautes autorités. 

Derrière la porte vitrée du service d’hémodialyse, les machines rythment la vie de leurs bips réguliers. Dans un fauteuil, Ahmed, 52 ans, observe le sang de sa propre vie circuler dans un tuyau transparent, nettoyé, avant de réintégrer son corps. Ce rituel vital, il le vit ici, au centre Chouaïb Doukkali, depuis plus de dix ans. Sans payer un dirham. « Ici, on est une famille. Sans eux, beaucoup d’entre nous ne seraient plus là », murmure-t-il, les yeux brillant d’une gratitude qui transcende la simple médecine. Nous sommes au cœur de ce qui ne peut être qualifié autrement que comme un miracle associatif, un modèle d’humanité et de résilience qui fête, en ce mois d’octobre, un quart de siècle de dévouement absolu. Plus de 150 000 séances de dialyse gratuites. Des milliers de vies préservées.
 
Les débuts : une réponse à l’urgence

Retour en 1999. La région d’El Jadida étouffe sous le manque chronique de structures de soins pour les maladies rénales. Les enveloppes publiques sont insuffisantes. Face à cette détresse, une réponse émerge non pas d’un bureau ministériel, mais de la solidarité organique d’une communauté. L’Association des Doukkala, portée par des figures comme Abdelkrim Bencherki et Cheikh Mohamed Lahlou, lance un cri du cœur et mobilise 7 millions de dirhams en dons et équipements. C’est la semence du miracle. Le 2 octobre 1999, dans les murs vétustes mais chargés d’espoir de l’ancien hôpital Mohammed V, le centre ouvre avec 12 postes de dialyse. Sa mission : soigner les plus vulnérables. Gratuitement. Toujours.
 
Le pilote infatigable : Dr Jawad Hassar, entre mémoire et militantisme

À la barre de ce navire depuis le premier jour, le Dr Jawad Hassar incarne l’âme du lieu. Pour comprendre la pérennité du centre, il faut comprendre l’homme et son ancrage. Il ne parle pas seulement du centre, mais de l’association qui l’a enfanté, dont il se dit « un fier membre ». D’une voix posée mais passionnée, il esquisse pour nous une fresque d’engagement bien plus vaste.

«L’Association des Doukkala est une association d’intérêt public, serviable et corvéable dès qu’il s’agit de la santé et du bien-être des siens », commence-t-il. Et de dérouler une histoire méconnue : « Elle a été la première à créer, avec le Dr Benslimane, un centre de dépistage et de traitement gratuit contre les MST et de sensibilisation au Sida. De 87 à 90, j’ai moi-même sillonné les facultés et les lycées pour des campagnes de sensibilisation. »

Son récit est un rappel : le centre de dialyse n’est pas un îlot, mais la pierre angulaire la plus visible d’un édifice philanthropique bien plus grand. « L’association continue ses caravanes de sensibilisation sur le diabète, l’hypertension, la santé de la mère et de l’enfant… Les centres de dialyse ne viennent que consolider cette affection ». Cette « affection », ce lien viscéral, est tangible dans le détail qu’il livre ensuite : « Il y a actuellement un médecin doukkali, à la retraite, qui assure bénévolement deux fois par semaine une consultation tout venant. Chacun, dont je suis, apporte son grain de sable à notre bel édifice. »

Puis, avec une humilité qui force le respect, il conclut sur la performance technique : « Et depuis sa création, le centre a fonctionné de façon parfaite. » Une simple phrase qui résume 25 ans de rigueur, de nuits blanches et de défis relevés.
 
Les étapes d’une croissance vertueuse : de la reconnaissance royale à la modernité

Le « miracle » a attiré les regards bienveillants. En décembre 2008, Sa Majesté le Roi Mohammed VI inaugure une première rénovation d’envergure (1,5 million de dirhams), scellant la reconnaissance nationale pour ce modèle. Mais la grande métamorphose a lieu en novembre 2019. L’association investit encore 5 millions de dirhams pour transférer le centre dans le nouvel hôpital Mohammed V. Les 12 lits d’origine sont devenus 24 postes de dialyse dernier cri, dans un environnement moderne et digne. Un symbole fort : les 74 000 séances du site historique ont été relayées par près de 75 000 autres dans ce nouveau cadre, sans jamais rompre la chaîne du soin.
 
Un modèle qui dépasse la médecine

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : près de 400 patients en dialyse chronique régulière, environ 1 000 cas aigus traités (dont de nombreuses urgences vitales comme des toxémies gravidiques), et un suivi pour 36 patients du CHP. Une équipe de 9 personnes dévouées fait tourner cette mécanique de précision.

Mais au-delà des statistiques,c’est une philosophie de soin qui frappe. La gratuité, bien sûr, pierre angulaire qui libère les familles de la ruine financière. L’excellence médicale, avec un bilan de « zéro morbidité » revendiqué. Et surtout, l’accompagnement humain. « On ne se sent pas comme un simple patient », confirme Ahmed. Ici, la « prise en charge psycho-affective » n’est pas un vœu pieux, mais une réalité vécue au quotidien, une écoute qui soigne l’âme autant que le corps.
 
Conclusion : Une lueur qui éclaire bien au-delà d’El Jadida

Alors que le soleil décline sur El Jadida, le centre Chouaïb Doukkali continue de battre au rythme des cœurs qu’il maintient en vie. Il est bien plus qu’une unité médicale. Il est la preuve vivante que l’initiative citoyenne, ancrée dans la solidarité communautaire et portée par un leadership compétent et dévoué, peut construire des institutions pérennes d’intérêt public. Il montre la force d’un partenariat où l’État et la société civile marchent main dans la main, créant non seulement de la santé, mais de la dignité, de la résilience et de l’espoir.

Dans un monde souvent cynique, le récit de ce centre est un rappel édifiant : parfois, les plus beaux miracles naissent de la simple volonté de se serrer les coudes et de dire : « Personne ne sera laissé de côté. » Le grain de sable de chacun, comme le dit si bien le Dr Hassar, a bel et bien bâti une cathédrale.
 
Reportage réalisé par
Mohamed LOKHNATI







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