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Violences faites aux femmes par un partenaire intime : les lacunes de la stratégie étatique


Dimanche 28 Février 2021

A travers des consultations avec 1213 femmes, ainsi que les autres parties prenantes, Mobilising for Rights Associates (MRA) a réalisé un rapport de recherche-action sur les violences par un partenaire intime (VPI) faites aux femmes au Maroc.



Analysant les expériences des femmes et la réponse des acteurs publics aux violences faites par un partenaire intime, les résultats de ce rapport illustrent comment les lois et pratiques actuelles sont vouées à l’impunité des auteurs au détriment de la sécurité des femmes. Une situation qui ne protège ni les femmes mariées, ni les femmes célibataires, de la violence, et crée une multitude d’obstacles juridiques, économiques et sociaux qui empêchent les femmes de signaler les VPI. 

Dans ce sens, MRA, appelle l'État à développer des stratégies holistiques pour éliminer ces obstacles, fournir des services publics de haute qualité, poursuivre et punir les auteurs, et offrir des remèdes appropriés aux femmes soumises à la VPI.

Une violence qui prend différentes formes 

Le rapport retrace en premier lieu l’expérience des femmes avec les VPI et en tire de nombreuses déductions. En effet, la grande majorité des agresseurs sont des maris, la VPI par les ex-maris, ex-fiancés et ex-petits amis étant également signalée. De même, ces violences ont lieu le plus souvent dans l'intimité sans témoin oculaire.

Les agresseurs commettent un large éventail de comportements violents de manière simultanée, la violence psychologique étant la plus répandue, suivie de la violence économique et physique. Les manifestations fréquentes comprennent le viol conjugal, l'expulsion du domicile familial, les injures et la diffamation, la privation des documents d'identité ou des frais médicaux, et le vol de biens personnels.

Les VPI se caractérisent par un comportement violent continu de la part de l'agresseur, car la majorité des femmes a signalé des actes de violence fréquents et répétés sur une longue durée. Plus de six femmes sur dix ont signalé des violences qui duraient plus d’un an. Les incidents uniques de violence sont l'exception.

Les VPI sont le plus souvent utilisées comme un outil pour contrôler le comportement des femmes. Soit pour les forcer à s'engager dans une relation sexuelle, à se marier ou à verser de l'argent ou des biens, soit pour les forcer à mettre fin à la relation elle-même et à renoncer à tous les droits personnels et financiers qu’elles auraient pu réclamer.

Des conséquences parfois dévastatrices 

La recherche s’intéresse également à l’impact de ces violences sur la vie des femmes et leurs réactions. Dans ce sens, le rapport déduit que les femmes subissent une multitude de préjudices en raison des VPI. Les autres conséquences comprennent également des handicaps temporaires ou permanents, le sans-abrisme, la privation de soutien financier, les grossesses non désirées, les tentatives de suicide, et les poursuites et emprisonnements des victimes pour relations sexuelles hors mariage.

La majorité des femmes victimes de VPI ne font que des recours civils et n'engagent jamais le système de justice pénale. Il y a souvent un décalage de temps important entre la violence et son signalement, car souvent les femmes ne signalent pas la VPI ou ne sollicitent l'aide des services publics qu'après des années de violence.

Des réactions mitigées 

Le rapport traite également la question des réponses de l’entourage à ces violences. Plus de 80% des femmes interrogées avaient contacté et demandé de l'aide à une personne de leur entourage, le plus souvent un membre de leur famille et/ou une association féminine locale.

Les réactions des familles sont mitigées. Les réponses de soutien comprenaient l’offre d'un abri pour la victime et ses enfants, l'accompagnement aux services publics, la protection contre l'agresseur, de l'aide à mettre fin à la violence, une aide financière et un soutien moral. Les réponses neutres incluaient de lui dire d'être patiente ou de ne rien faire. Des réponses néfastes des familles ont consisté en l'expulsion de la victime de la maison familiale, le retour auprès d'un mari violent, le blâme et la menace de violence physique.

Des enquêtes incompatibles aux plaintes 

Pour ce qu’il en est des réponses des acteurs publics (forces de l’ordre, justice et santé), le rapport déduit que plutôt que d’enquêter activement sur les actes de violence, les autorités publiques ont tendance à se concentrer sur la nature de la relation entre l'auteur et la victime. Dans 7% des affaires pénales devant les tribunaux, les victimes, non mariées, des VPI étaient elles-mêmes poursuivies pour relation sexuelle hors mariage. D'autre part, les victimes mariées subissent des pressions pour renoncer aux plaintes pénales et sont ramenées au domicile conjugal. 

75% des répondants en ligne et 83% des femmes interrogées ont signalé la violence sexuelle à au moins un acteur public. Les tribunaux sont le secteur vers lequel les femmes se tournent le plus souvent à un moment donné, étant donné la prévalence de rechercher uniquement des recours civils en vertu du code de la famille dans les affaires de VPI.

Une stratégie étatique qui ne freine pas les agresseurs 

Le rapport aboutit à plusieurs recommandations. Parmi celles-ci, remédier aux lacunes des lois actuelles sur les violences faites aux femmes afin de punir les auteurs de toute l’étendue des diverses formes de VPI commises. 

Il est également nécessaire de veiller à ce que toutes les femmes, mariées ou non, reçoivent une protection adéquate contre les VPI, y compris la mise en œuvre des mesures de protection disponibles et le développement d’autres. 

La recherche souligne également l’importance de comprendre comment la réponse actuelle de l’Etat perpétue l’impunité des agresseurs pour des actes criminels et leur permet d’échapper aux responsabilités légales.








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