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Actu Maroc

Vague de froid : Face aux nuits glaciales des « lyalis »… [INTÉGRAL]


Rédigé par Omar ASSIF Samedi 27 Décembre 2025

Le Maroc affronte un froid aigu, amplifié par la neige et le gel en altitude. Confort thermique intérieur, encore fragile, et protection des populations vulnérables s’imposent comme enjeux immédiats de la saison.



Le 21 décembre a ouvert les lialis : les 40 nuits les plus froides de l’année. Et cette année, le froid se fait remarquer. Sur TikTok, une touriste espagnole résume la surprise partagée par de nombreux visiteurs : «Vous ne pouvez pas imaginer combien il fait froid dans les chambres, même si le propriétaire fait de son mieux pour chauffer les espaces de vie». Dans une autre vidéo récente, une fan malienne lance un avertissement aux supporters : «Les personnes qui n’ont toujours pas rejoint le Maroc pour l’AFCON, vous êtes prévenus ! Il fait froid au Maroc, prévoyez des habits chauds pour l’extérieur comme pour l’intérieur». Au-delà du caractère saisonnier, ces voix disent un même constat : un froid ressenti même à l’intérieur des logements, révélant les limites d’un bâti souvent peu isolé (voir interview). Dans les zones d’altitude, le besoin de chaleur d’appoint devient une priorité immédiate, au moment où l’opération sanitaire Riaya 2025-2026 poursuit son déploiement pour accompagner les populations les plus exposées.
 
Riaya 2025-2026

Ainsi, et en exécution des Hautes Instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI,le ministère de l’Intérieur a activé pour l’hiver 2025-2026 un dispositif national de veille et d’intervention, dans le cadre du Plan national de lutte contre les effets des vagues de froid. Dans ce cadre, selon le ministère de l’Intérieur, le plan cible 833.000 personnes réparties dans 2.018 douars, relevant de 243 communes situées dans 28 préfectures et provinces. Le plan assure un accompagnement sanitaire de proximité grâce à 339 caravanes médicales et 1.883 unités médicales mobiles. Les interventions couvrent également les populations vulnérables : 665 personnes sans abri, 2.790 femmes enceintes et 18.722 personnes âgées ou atteintes de maladies chroniques. Pour renforcer l’accès aux soins dans les zones les plus isolées, les Forces Armées Royales ont installé trois hôpitaux militaires de campagne à Tounfite (Midelt), Ouirgane (Al Haouz) et Aït M’hamed (Azilal), tandis que des centres d’hébergement chauffés ont été ouverts, notamment dans la province d’El Hajeb, avec une capacité de plus de 2.000 lits.
 
Bois de chauffe

Par ailleurs et au-delà de l’urgence sanitaire, un autre besoin immédiat et récurrent : la chaleur dans les foyers, largement assurée par le bois de chauffe en milieu rural et montagnard. Ce bois-énergie provient exclusivement de ressources locales et non d’importations. Ilias Barka, responsable des opérations auprès d’une société casablancaise spécialisée dans la construction de cheminées et intermédiaire dans la distribution du bois de feu, le rappelle : «Le bois de chauffage utilisé au Maroc provient de sources locales et n’est pas importé». Cette réalité se lit dans les volumes nationaux du bois-énergie, avec 11,3 millions de tonnes consommées chaque année, dont 6 millions de tonnes issues des forêts, 2,1 millions provenant des arbres fruitiers et 3 millions de biomasse agricole. Dans les zones d’altitude et les villages enclavés, cette consommation s’intensifie dès l’entrée dans les lialis, où l’accès à d’autres sources de chauffage reste limité et où le bois constitue l’un des rares moyens immédiats de chaleur.
 
Rural et urbain

Dans ce contexte, l’enjeu consiste surtout à éviter que l’hiver n’isole des milliers de foyers quand la neige coupe les accès. C’est précisément sur ce point que la réponse publique se joue, avec des moyens prépositionnés pour intervenir vite dès les premiers blocages. Pour la saison en cours, les autorités annoncent la mobilisation de 1.024 engins de déneigement, positionnés en amont sur les axes exposés afin d’assurer une réouverture rapide, et la programmation de distributions de 10.421 fours améliorés et de 4.540 tonnes de bois de feu. En filigrane, ces chiffres rappellent une évidence : dans les douars d’altitude, la résilience hivernale se mesure d’abord à la capacité à maintenir la route ouverte, la chaleur accessible et les populations vulnérables en bonne santé. En ville, si certains ont la chance d’avoir une cheminée chez eux, beaucoup estiment que la question du chauffage renvoie aussi à la qualité de l’isolation thermique (voir interview) et à l’accès aux énergies pendant les lialis.
 
Omar ASSIF
 

3 questions à Abdelatif Assaghir, expert en acoustique, vibration et thermique du bâtiment : « Depuis 2009, la loi 47-09 rend obligatoire l’intégration de mesures d’efficacité énergétique dans les projets de construction »

Chef de la division confort dans le bâtiment au sein du Laboratoire Public d'Essais et d'Études (LPEE), Abdelatif Assaghir répond à nos questions.
Chef de la division confort dans le bâtiment au sein du Laboratoire Public d'Essais et d'Études (LPEE), Abdelatif Assaghir répond à nos questions.
  • Quelles solutions techniques sont aujourd’hui disponibles au Maroc pour isoler thermiquement un logement ou un bâtiment ?

Il existe deux approches pour isoler l’enveloppe d’un bâtiment. L’isolation par l’extérieur (ITE) superpose la paroi, l’isolant et sa protection. L’isolation par l’intérieur (ITI), plus répandue au Maroc, combine la paroi, l’isolant, le pare-vapeur et la finition. Côté matériaux, le marché marocain repose surtout sur trois familles : les isolants minéraux comme la laine de verre et la laine de roche, les isolants synthétiques comme le polystyrène et le polyuréthane, et les isolants d’origine naturelle comme le liège et les fibres de chanvre.
 
  • Quelles difficultés techniques rencontrez-vous le plus souvent lors de l’installation d’isolants dans des bâtiments déjà construits ?
     
Dans l’existant, la rénovation impose de s’adapter à des structures qui n’ont pas été pensées pour intégrer l’isolation dès le départ, ce qui complique parfois la mise en œuvre. Un enjeu spécifique au Maroc est de concilier performance acoustique et thermique. Pour les ouvertures, il vaut mieux privilégier un double vitrage asymétrique plutôt que symétrique. Et pour les parois, les laines minérales souples à cellules ouvertes, qui jouent un rôle de ressort, sont plus efficaces que les mousses rigides à cellules fermées comme le polyuréthane.
 
  • Le cadre légal marocain oblige-t-il réellement les constructeurs à penser et intégrer l’efficacité énergétique avant de livrer un bâtiment ?

Oui. Depuis 2009, la loi 47-09 rend obligatoire l’intégration de mesures d’efficacité énergétique dans les projets de construction. Dans le bâtiment, cette obligation s’applique à travers la Réglementation Thermique de la Construction au Maroc (RTCM), en vigueur depuis 2015, et par l’audit énergétique obligatoire dès qu’un seuil de consommation est dépassé, soit 500 TEP pour les bâtiments tertiaires et 1500 TEP pour le secteur industriel.

 

Neige : Un manteau blanc précoce s’installe sur les reliefs marocains

À la fin décembre 2025, plus de 54.000 km² du territoire national étaient recouverts de neige, notamment sur les massifs du Moyen Atlas, du Haut Atlas et du Rif, modifiant profondément le paysage et les conditions de vie dans ces régions. Sur les hauteurs des provinces d’Ouarzazate et de Tinghir, les cumuls ont atteint 50 cm par endroits, tandis que certains cols du Moyen Atlas ont vu des accumulations encore plus importantes. Dans la province d’Ifrane, la neige est tombée plusieurs jours consécutifs, un rythme particulièrement soutenu qui a surpris même les habitants habitués au froid. Cette épaisseur et cette permanence du manteau blanc ont ralenti la circulation sur des axes secondaires et impacté la mobilité des services, mais elles offrent aussi un atout hydrique en rechargeant les sols et les nappes aquifères des zones de montagne. En dépit des perturbations, cette progression des chutes de neige marque un hiver précoce et robuste, appelant à une lecture plus attentive des implications climatiques et territoriales pour les semaines à venir.

 

Météo Vigilances météorologiques et températures glaciales sur les reliefs

La semaine en cours au Maroc est marquée par une instabilité hivernale persistante, avec des températures basses et des chutes de neige annoncées dans de nombreuses régions. La Direction Générale de la Météorologie a placé plusieurs provinces en vigilance orange, prévoyant des températures minimales allant jusqu’à -8°C dans des zones d’altitude comme Ifrane, Boulemane, Sefrou, Azilal, Béni Mellal et Midelt, et des maximales qui peinent à dépasser 6 à 9°C dans ces mêmes secteurs. Ce froid généralisé s’accompagne d’un épisode neigeux attendu sur les hauteurs dépassant 1.400 m, avec des accumulations possibles de 20 à 40 cm, notamment dans les massifs du Moyen et du Haut Atlas, tandis que des quantités plus modestes sont attendues dans d’autres reliefs comme Al Haouz, Tinghir et Chefchaouen. Selon les prévisions les plus récentes, ces conditions météorologiques instables (pluie parfois forte, neige en montagnes et vents soutenus) devraient persister tout au long de la semaine, rendant le ressenti du froid particulièrement vif pour les populations locales et les voyageurs. Les autorités expliquent que cette dynamique est liée à des systèmes dépressionnaires actifs qui maintiennent des masses d’air froid en interaction avec des zones humides, produisant des précipitations variées sur une vaste partie du pays. Ce contexte actuel se traduit dans les comportements quotidiens : dans les villes d’altitude, les habitants signalent des ressentis thermiques très bas dès la tombée du jour, obligeant à renforcer les habitudes de chauffage et les préparatifs hivernaux. 







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