Le World Giving Report («Rapport Mondial sur le Don» en français) – anciennement le World Giving Index – se définit comme «une enquête qui recense les attitudes et les comportements du grand public en matière de dons dans 101 pays et territoires à travers le monde». Créé en 2009 par la Charities Aid Foundation (CAF), il s’appuie sur un recensement effectué par de multiple partenaires, qui opèrent au niveau de 28 pays, et qui sont «unis dans le but d'améliorer la compréhension du don et de la charité à travers ce projet».
La singularité africaine
Les résultats du World Giving Report (WGR) 2025 mettent en lumière le continent africain comme le plus généreux du monde. Un Africain donne en moyenne 1,54% de son revenu mensuel net aux bonnes causes, dépassant la moyenne internationale de 1,04%. Le seul autre continent dépassant la moyenne est l’Asie, avec 1,28% des revenus dépensés en dons. Viennent ensuite les continents nord-américain (0,94%), océanien (0,75%), sud-américain (0,73%) et finalement européen (0,64%).
De façon a priori contre-intuitive, ce sont les pays à plus faible revenu qui dominent le classement, tandis que les pays à fort revenu – surtout en Europe de l’Ouest – se révèlent les plus parcimonieux en termes de charité.
Des résultats similaires sont observables concernant le nombre d’heures dédiées annuellement au bénévolat. Tandis que les Africains sont les plus généreux avec leur temps, avec une moyenne de 14 heures et demi dépensées par personne dans les actions caritatives, les Européens dépensent le moins de temps – seulement 6 heures et demi par personne.
Les raisons pour cela sont multiples. D’abord, le rapport révèle une corrélation positive entre générosité et nombres de normes sociales incitant à la charité. En général, les citoyens africains et asiatiques, bien moins individualistes que les Occidentaux, citent en moyenne plus de raisons sociales pour faire des dons caritatifs.
Ensuite, la religion est un moteur important des dons et de l’activité bénévole. Loin de détourner d’autres causes, le don religieux active plutôt d’autres dons «laïcs» chez la personne croyante. Selon le rapport, 94% des personnes qui citent la religion comme moteur de leurs dons donnent pour d’autres causes en plus de leurs communautés de foi, tandis que 43% de ceux-là ne donnent que pour ces autres causes.
Le nombre moyen de causes soutenues par les donateurs qui déclarent que leur religion les encourage à faire des dons est nettement supérieur à la moyenne mondiale (3,9 contre 2,6). En outre, le pourcentage de leurs revenus qu'ils ont donné en moyenne était de 2,2%, contre 1,4% chez les donateurs qui n'ont pas déclaré que la religion était une raison pour faire des dons.
Les Africains, uniques au monde à citer la religion comme la plus grande cause de leur bénévolat, vouent ainsi la part de temps et d’argent la plus conséquente.
Finalement, concernant les heures de bénévolat, le rapport indique que la proportion de personnes qui font du bénévolat diminue avec l'âge, passantde 30% chez les 18-24 ans à 19% chez les plus de 55 ans. L’Afrique, plus peuplée et plus jeune que les pays du Nord global – en particulier le Vieux Continent – dédie plus d’heures au volontariat.
La charité marocaine : Généreuse, mais peu institutionnalisée
Le Maroc se place en 2025 comme le 29ème pays le généreux du monde. 72% des Marocains ont rapporté avoir donné une part de leur revenu en dons caritatifs, et donnent en moyenne 1,32% de leurs revenus. Le Maroc dépasse ainsi les moyennes mondiales de 64% de la population et de 1,04% du revenu respectivement.
De même, 37% de la population fait du bénévolat à titre de 12,3 heures, soit 11 points de pourcentage et 3,4 heures au-delà de la norme globale respectivement.
En phase avec la tendance africaine, plus de la moitié des Marocains (59%) font leurs dons caritatifs directement aux personnes concernées. Cependant, seulement le cinquième de la population font leurs dons via les organisations caritatives (21%) et/ou religieuses (18%). Le dernier indicateur est d’autant plus frappant qu’il se situe bien en-deçà de la norme africaine de 40%.
Le taux bas de dons effectués via des intermédiaires ne reflète pas forcément un manque de confiance envers les institutions caritatives. Sur une échelle de 15, le Maroc enregistre un score de 9,8 pour la confiance en les associations caritatives, 11,8 pour leur importance. Les donateurs d'aide humanitaire et de secours en cas de catastrophe constituent près du cinquième de la population. Tous ces indicateurs sont quasi-identiques, voire légèrement supérieurs à la norme globale, et ne trahissent pas a priori une méfiance envers l’idée même de confier son argent à une association caritative.
Ce qui expliquerait la prédominance du don en main propre serait plutôt la faible institutionnalisation de l’action philanthropique au Maroc. L’action philanthropique au Maroc se heurte à de multiples obstacles réglementaires, légaux et fiscaux.
D’abord, les exonérations fiscales pour les donateurs, tant individuels qu’institutionnels, sont peu développées, et les processus de déductibilité manquent de clarté. Ensuite, les transferts de fonds philanthropiques vers ou depuis l’étranger demeurent soumis à une forte surveillance, en raison notamment de la législation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Enfin, la fragilité économique que connaît notre pays, surtout depuis la pandémie COVID (inflation, volatilité des prix des matières premières, pression sur les finances publiques) affecte directement la capacité des individus et des entreprises à s’engager durablement dans des démarches philanthropiques.
En ce qui concerne les organisations religieuses, la centralisation des Habous, ainsi que la réduction de leurs fonctions historiques très versatiles dans la construction de mosquées et l’acquisition de l’immobilier, limitent le don religieux à la Zakat donnée en main propre aux démunis ayant droit.
La singularité africaine
Les résultats du World Giving Report (WGR) 2025 mettent en lumière le continent africain comme le plus généreux du monde. Un Africain donne en moyenne 1,54% de son revenu mensuel net aux bonnes causes, dépassant la moyenne internationale de 1,04%. Le seul autre continent dépassant la moyenne est l’Asie, avec 1,28% des revenus dépensés en dons. Viennent ensuite les continents nord-américain (0,94%), océanien (0,75%), sud-américain (0,73%) et finalement européen (0,64%).
De façon a priori contre-intuitive, ce sont les pays à plus faible revenu qui dominent le classement, tandis que les pays à fort revenu – surtout en Europe de l’Ouest – se révèlent les plus parcimonieux en termes de charité.
Des résultats similaires sont observables concernant le nombre d’heures dédiées annuellement au bénévolat. Tandis que les Africains sont les plus généreux avec leur temps, avec une moyenne de 14 heures et demi dépensées par personne dans les actions caritatives, les Européens dépensent le moins de temps – seulement 6 heures et demi par personne.
Les raisons pour cela sont multiples. D’abord, le rapport révèle une corrélation positive entre générosité et nombres de normes sociales incitant à la charité. En général, les citoyens africains et asiatiques, bien moins individualistes que les Occidentaux, citent en moyenne plus de raisons sociales pour faire des dons caritatifs.
Ensuite, la religion est un moteur important des dons et de l’activité bénévole. Loin de détourner d’autres causes, le don religieux active plutôt d’autres dons «laïcs» chez la personne croyante. Selon le rapport, 94% des personnes qui citent la religion comme moteur de leurs dons donnent pour d’autres causes en plus de leurs communautés de foi, tandis que 43% de ceux-là ne donnent que pour ces autres causes.
Le nombre moyen de causes soutenues par les donateurs qui déclarent que leur religion les encourage à faire des dons est nettement supérieur à la moyenne mondiale (3,9 contre 2,6). En outre, le pourcentage de leurs revenus qu'ils ont donné en moyenne était de 2,2%, contre 1,4% chez les donateurs qui n'ont pas déclaré que la religion était une raison pour faire des dons.
Les Africains, uniques au monde à citer la religion comme la plus grande cause de leur bénévolat, vouent ainsi la part de temps et d’argent la plus conséquente.
Finalement, concernant les heures de bénévolat, le rapport indique que la proportion de personnes qui font du bénévolat diminue avec l'âge, passantde 30% chez les 18-24 ans à 19% chez les plus de 55 ans. L’Afrique, plus peuplée et plus jeune que les pays du Nord global – en particulier le Vieux Continent – dédie plus d’heures au volontariat.
La charité marocaine : Généreuse, mais peu institutionnalisée
Le Maroc se place en 2025 comme le 29ème pays le généreux du monde. 72% des Marocains ont rapporté avoir donné une part de leur revenu en dons caritatifs, et donnent en moyenne 1,32% de leurs revenus. Le Maroc dépasse ainsi les moyennes mondiales de 64% de la population et de 1,04% du revenu respectivement.
De même, 37% de la population fait du bénévolat à titre de 12,3 heures, soit 11 points de pourcentage et 3,4 heures au-delà de la norme globale respectivement.
En phase avec la tendance africaine, plus de la moitié des Marocains (59%) font leurs dons caritatifs directement aux personnes concernées. Cependant, seulement le cinquième de la population font leurs dons via les organisations caritatives (21%) et/ou religieuses (18%). Le dernier indicateur est d’autant plus frappant qu’il se situe bien en-deçà de la norme africaine de 40%.
Le taux bas de dons effectués via des intermédiaires ne reflète pas forcément un manque de confiance envers les institutions caritatives. Sur une échelle de 15, le Maroc enregistre un score de 9,8 pour la confiance en les associations caritatives, 11,8 pour leur importance. Les donateurs d'aide humanitaire et de secours en cas de catastrophe constituent près du cinquième de la population. Tous ces indicateurs sont quasi-identiques, voire légèrement supérieurs à la norme globale, et ne trahissent pas a priori une méfiance envers l’idée même de confier son argent à une association caritative.
Ce qui expliquerait la prédominance du don en main propre serait plutôt la faible institutionnalisation de l’action philanthropique au Maroc. L’action philanthropique au Maroc se heurte à de multiples obstacles réglementaires, légaux et fiscaux.
D’abord, les exonérations fiscales pour les donateurs, tant individuels qu’institutionnels, sont peu développées, et les processus de déductibilité manquent de clarté. Ensuite, les transferts de fonds philanthropiques vers ou depuis l’étranger demeurent soumis à une forte surveillance, en raison notamment de la législation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Enfin, la fragilité économique que connaît notre pays, surtout depuis la pandémie COVID (inflation, volatilité des prix des matières premières, pression sur les finances publiques) affecte directement la capacité des individus et des entreprises à s’engager durablement dans des démarches philanthropiques.
En ce qui concerne les organisations religieuses, la centralisation des Habous, ainsi que la réduction de leurs fonctions historiques très versatiles dans la construction de mosquées et l’acquisition de l’immobilier, limitent le don religieux à la Zakat donnée en main propre aux démunis ayant droit.
Les obstacles structurels à l’essor du secteur philanthropique au Maroc
Le dernier rapport du Global Philanthropy Environment Index (GPEI), publié par la Lilly Family School of Philanthropy de l’Université de l’Indiana, fait état d’une dynamique philanthropique contrastée, commune à la région MENA. Bien que bénéficiant d’un cadre relativement favorable, le Royaume demeure confronté à des blocages d’ordre institutionnel et fiscal qui freinent le plein essor de ses organisations philanthropiques.
L’environnement socio-culturel constitue le socle de la philanthropie marocaine. Sur une échelle de 5, le Maroc enregistre un score de 4,08, l’un des plus élevés à l’échelle mondiale, grâce à des traditions profondément ancrées de solidarité, d’entraide communautaire et de dons religieux (zakat, waqf).
Toutefois, ce potentiel socio-culturel et anthropologique propice à l’action caritative doit être proprement canalisé par un cadre institutionnel adéquat. Or, le Maroc ne dispose pas d’un cadre légal clair réglementant le bénévolat, sa fiscalité est peu incitative pour les associations, et les flux philanthropiques internationaux lourdement surveillés en raison des lois sur le blanchiment d’argent.
À la lumière de ces constats, les experts du GPEI plaident pour une réforme ambitieuse de l’environnement philanthropique marocain. Cela passe par une clarification des lois, une réduction des obstacles administratifs, un système fiscal plus incitatif et une meilleure articulation entre les traditions locales de solidarité et les standards internationaux de gouvernance et de transparence.
L’environnement socio-culturel constitue le socle de la philanthropie marocaine. Sur une échelle de 5, le Maroc enregistre un score de 4,08, l’un des plus élevés à l’échelle mondiale, grâce à des traditions profondément ancrées de solidarité, d’entraide communautaire et de dons religieux (zakat, waqf).
Toutefois, ce potentiel socio-culturel et anthropologique propice à l’action caritative doit être proprement canalisé par un cadre institutionnel adéquat. Or, le Maroc ne dispose pas d’un cadre légal clair réglementant le bénévolat, sa fiscalité est peu incitative pour les associations, et les flux philanthropiques internationaux lourdement surveillés en raison des lois sur le blanchiment d’argent.
À la lumière de ces constats, les experts du GPEI plaident pour une réforme ambitieuse de l’environnement philanthropique marocain. Cela passe par une clarification des lois, une réduction des obstacles administratifs, un système fiscal plus incitatif et une meilleure articulation entre les traditions locales de solidarité et les standards internationaux de gouvernance et de transparence.