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Actu Maroc

SIAM: Coup d’accélérateur à la coopération maroco-britannique [INTÉGRAL]


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mercredi 19 Avril 2023

Dans sa volonté de garantir la durabilité de ses importations agricoles, le Royaume-Uni veut assister l’agriculture marocaine dans sa transition vers un modèle adapté aux changements climatiques. Détails.



Après des années de suspension à cause des contraintes de la pandémie, le Salon International de l'Agriculture au Maroc (SIAM) est de retour. La quinzième édition aura lieu du 2 au 7 mai prochain au grand bonheur des agriculteurs qui auront l’opportunité d’exposer leurs marchandises tout en s’inspirant des expériences de leurs homologues étrangers en ce qui concerne les techniques agricoles.

Devenu un rendez-vous incontournable de l’agenda agricole au Maroc, cet événement rassemblera plusieurs pays du monde entier, dont le Royaume-Uni, qui aura une place spéciale en tant qu’invité d’honneur. Londres ne compte pas figurer comme un simple invité et parie sur cette édition pour raffermir sa coopération agricole avec le Maroc qui n’a eu de cesse de prospérer ces derniers temps.  Les chiffres sont parlants. De 2021 à 2022, les échanges commerciaux de produits agricoles ont fait un sursaut considérable, sachant que le Maroc a boosté de 15% les exportations de fruits et légumes vers le marché britannique. En 2022, les exportations ont atteint 400 millions de livres sterling contre 350 millions enregistrés l’année précédente.

Ceci a fait que le Royaume-Uni importe quasiment 45% deses besoins en tomates du Maroc, explique Amr Soltan, Senior Trade Adviser au Département du Commerce international au Consulat britannique, précisant que les tomates dominent les exportations marocaines. « On peut dire que le Maroc a désormais une relation plus privilégiée avec les importateurs britanniques », poursuit M. Soltan, soulignant que le Royaume en devient ainsi le premier exportateur au marché britannique. Cette position s’est confirmée en 2023. Durant les deux premiers mois de 2023, le Maroc a exporté 30.000 tonnes de tomates. Cette tendance haussière devrait se poursuivre en dépit de la suspension provisoire de l’export. (Voir repères).

Cet essor n’est pas fortuit, c’est le résultat de la montée fulgurante du commerce bilatéral après la signature de l’accord d’association en 2019, lequel a démantelé les barrières tarifaires, notamment sur les produits agricoles. Le commerce bilatéral, rappelons-le, dans sa globalité, a augmenté de 50% depuis l’entrée en vigueur de l’accord.
Londres compte sur les agriculteurs marocains 

Après son divorce brutal avec l’Union Européenne, la Grande-Bretagne n’a plus autant de facilité d’accès aux fournisseurs agricoles européens qu’auparavant. Raison pour laquelle le gouvernement britannique concentre ses efforts sur le marché marocain, perçu comme une source d’approvisionnement complémentaire dans un contexte où les aléas climatiques pèsent lourdement sur l’agriculture mondiale. Le Maroc, pour rappel, n’a pas échappé à cette fatalité, sachant que la conjonction périlleuse de la sécheresse, du stress hydrique et des perturbations saisonnières a lourdement impacté la production des légumes. De quoi préoccuper les Britanniques qui veulent accompagner le Maroc dans la transition de son modèle agricole.

Pour cette raison, le SIAM est une occasion précieuse pour les Britanniques de renforcer leur ancrage agricole au Maroc. L’objectif est d’ores et déjà fixé : accompagner l’agriculture marocaine afin qu’elle soit plus immunisée contre les aléas climatiques et la rareté de l’eau.
Pour ce faire, la Grande-Bretagne se présente comme un leader dans les techniques agricoles dans plusieurs aspects, à savoir l’irrigation, usage des eaux usées, les semences, la mécanisation, la décarbonation de l’agriculture, etc…
Ce savoir-faire sera incarné par 30 entreprises britanniques qui débarqueront au salon de Meknès, accompagnées de 60 experts porteurs de solutions.
 Ce que peut offrir le Royaume-Uni

En matière de technique agricole, les Britanniques attachent une importance majeure au secteur des tomates et proposent une assistance aux producteurs marocains. Cette aide est incarnée par le programme CASA (Commerial Agriculture for Smalholders and Agribusiness) qui a d’ores et déjà été lancé. Il vise à améliorer la durabilité de la production marocaine. Ce programme se résume en trois apports : formation, soutien financier et assistance technique. L’objectif est de permettre aux producteurs marocains de se prémunir contre la sécheresse par l’optimisation de la gestion de l’eau et l’irrigation. Aussi, l’assistance peut-elle porter sur la fortification des cultures pour augmenter leur résistance aux perturbations du climat. L’un des grands problèmes dont souffre le modèle marocain. « Nous sommes en début de parcours, le programme aura des retombées positives d’ici les années à venir », souligne M. Soltan à cet égard.

En parallèle, les autorités britanniques entendent aller de l’avant dans la recherche et le développement. Pour cela, elles mettent le paquet sur la coopération entre les centres de recherche. Des initiatives ont d’ores et déjà commencé comme le partenariat établi entre l’Université polytechnique Mohammed VI et la « Rothamsted Research » ayant pour but de « développer une prochaine génération de scientifiques et d’ingénieurs marocains ».  Là, l’objectif est d’aboutir à des projets de recherche communs sur le sol marocain. La priorité est accordée à sept domaines de recherches, dont l’exploitation des bactéries agricoles, récolte céréalière, nouveaux outils de diagnostic des sols, réduction des pertes de sol… En gros, l’idée est simple : le Royaume-Uni apporte l’expertise tandis que le Maroc apporte la matière grise. Le SIAM sera donc un coup d’accélérateur à ce genre de projets.

Il ne s’agit que d’un premier pas dans la perspective de passer à la vitesse supérieure.  « Dans le futur, les échanges de visites seront de plus en plus nombreux », assure Amr Soltan, expliquant qu’il y aura de plus en plus de facilités pour permettre aux experts marocains de bénéficier des formations fournies par les instituts britanniques. De l’autre côté, il y aura également de nombreuses visites d’experts anglais au Maroc.
La coopération porte également sur la décarbonation de l’agriculture. Les échanges ont déjà démarré, sachant que l’Institut National de la Recherche Agronomique a pris part à des formations organisées par des experts britanniques.

Concernant le volet financier, le gouvernement britannique, par l’intermédiaire du « Global Diversity Foundation », offre le programme « DARWIN » destiné à financer l’agriculture écologique et la biodiversité. Ces financements ne sont pas toujours dirigés vers l’optimisation de la production mais peuvent cibler des projets ayant un impact socio-environnemental.
 
Anass MACHLOUKH
 
 

3 questions à Simon Martin

Simon Martin, Ambassadeur du Royaume-Uni au Maroc (Photo : Nidal)
Simon Martin, Ambassadeur du Royaume-Uni au Maroc (Photo : Nidal)

 

« De nouveaux accords de coopération sont prévus » 

 
-Simon Martin, Ambassadeur du Royaume-Uni au Maroc, nous a confié des précisions sur la participation de son pays à la 15ème édition du SIAM. 

-Que représente le SIAM pour la délégation britannique ?

- Nous sommes très fiers que le Royaume-Uni est choisi en tant qu’invité d’honneur. Raison pour laquelle nous avons veillé à ce que la participation de notre pays soit la plus remarquable possible. Nous aurons une délégation de 30 entreprises, soit la délégation la plus nombreuse qui ait jamais participé à une mission commerciale au Maroc. C’est un signe de l’importance que notre pays attache à l’agriculture. Je ne peux songer à une meilleure occasion pour avancer.
-Peut-on s’attendre prochainement à des annonces à l’issue du SIAM en ce qui concerne les accords de coopération ?

- Cette année, il y aura un nouveau progrès dans la coopération agricole. Les deux pays envisagent d’aller plus loin en signant de nouveaux accords. Il y aura un mémorandum d’entente sur l’innovation et l’ingénierie agricole qui sera signé entre le ministère de l’Agriculture et une organisation britannique spécialisée. En plus, on prévoit également un accord qui porte sur la croissance verte. Il est encore tôt de donner des dates précises.
-L’agriculture est-elle le nouveau noyau dur de la coopération maroco-britannique ?

- On ne peut résumer le dynamisme du nouveau partenariat maroco-britannique à l’agriculture puisqu’il existe de nombreux secteurs dans lesquels nos deux pays sont engagés. J’en cite l’éducation, la finance verte et les transitions énergétiques. Mais, nous attachons une importance particulière à l’agriculture vu le potentiel du Maroc et les nombreux débouchés qui existent. 

Propos recueillis par A. M.


L’info...Graphie


Tomates marocaines: Où en sont les rayons britanniques ?

Durant le mois de février, les perturbations saisonnières, dont la baisse subite des températures, ont durement impacté les cultures de tomates dont la production a été fortement réduite, ce qui a été visiblement préjudiciable aussi bien pour le maché local que pour les partenaires internationaux.

Compte tenu de la hausse des prix qui a résulté de la baisse des récoltes, le gouvernement marocain a décidé de suspendre provisoirement les exportations, ce qui s’est répercuté négativement sur les clients britanniques. Tout le monde se souvient des images montrant des rayons vides dans les supermarchés qui ont fait le tour sur les réseaux sociaux. Au Maroc, cette décision n’a pas été officiellement communiquée, sachant que les autorités diplomatiques britanniques n’ont pas été notifiées d’une quelconque suspension. Les médias britanniques se sont saisis de cette question. « The Telegraph » a affirmé que la pénurie provisoire de tomates constatée sur les supermarchés est d’origine marocaine. 

Les importateurs anglais ont été d’autant plus affectés que les fournisseurs traditionnels comme l’Espagne n’ont pas échappé aux perturbations climatiques. Actuellement, le retour à la normale est prévu pour bientôt. L’exportation devrait reprendre à la fin du Ramadan, à en croire la Directrice Générale adjointe du groupe Delassus, Fatiha Charrat, qui s’est confiée au site spécialisée « FreshPlaza ».

Selon les détails livrés par la responsable, le ministère de l’Agriculture aurait convenu d’un quota quotidien d’exportations de tomates de 700 tonnes par jour avant d’arrêter toutes les exportations de tomates rondes.
 

Accord d’association: Le commerce bilatéral en plein essor

Les échanges commerciaux entre le Maroc et le Royaume-Uni ont augmenté de près de 50% pour passer de 15,3 milliards de dirhams (MMDH) en 2019 à 22,9 MMDH en 2022 et les exportations marocaines ont presque triplé depuis l'entrée en vigueur de cet accord. Le commerce bilatéral total s'élève maintenant à 2,7 milliards de livres sterling. De quoi réjouir les deux pays qui ont convenu de passer à la vitesse supérieure lors du dernier Conseil d’Association, qui a été présidé par le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, et son homologue britannique, Nigel Huddleston.

Les deux pays misent sur les énergies renouvelables et la finance verte pour booster leur commerce. Le gouvernement britannique s’est évertué à lancer le programme UK-Export-Finance afin de développer les projets communs avec des mécanismes financiers adéquats.
Toutefois, les échanges dépendent toujours du développement du transport maritime. La mise en place de la nouvelle ligne directe Tanger-Poole devrait remédier aux difficultés actuelles.