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Régions frontalières du Nord : La formule de l’IMIS pour s’affranchir de la contrebande


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mercredi 23 Février 2022

Indéniablement touchées par la fin du commerce transfrontalier avec Sebta et Mellilia, les zones frontalières du Nord sont en quête d’un nouveau modèle économique. Un nouveau rapport de l’IMIS propose l’alternative. Détails.



La crise du Covid-19 n’a pas été clémente vis-à-vis de l’économie nationale et encore plus envers les régions qui jouxtent les villes occupées Sebta et Mellilia. Dès la fermeture des frontières au début de la crise sanitaire en 2020, les régions du Nord ont été foudroyées tant elles ont été durement touchées par la suspension du commerce frontalier que le Maroc a voulu cesser. Ce qu’ont vécu les habitants des villes comme Fnideq est l’exemple parfait illustrant l’ampleur du désastre. D’où la nécessité d’une alternative économique à une population trop dépendante des présides occupés.

Les autorités ont commencé à mettre en place des alternatives comme les zones d’activités économiques près de Cabo Negro, une stratégie redoutée par les gouvernements locaux des deux présides qui y voient une tentative d’endiguement et d’encerclement.

Toutefois, il est plus urgent de penser à tout un modèle économique pour l’ensemble de la région du Nord, où l’activité est concentrée principalement à Tanger, seule grande métropole. Parmi les pistes qui se profilent : la culture du cannabis, selon un nouveau rapport collectif de l’Institut marocain d’intelligence stratégique (IMIS), réalisé sous la direction d’Abdelmalek Alaoui.

La légalisation de l’usage licite du chanvre à des fins thérapeutiques est certainement une mesure “révolutionnaire” qui, selon le rapport, ouvre la voie à de nouvelles opportunités de développement dans toute la région du Nord, avec des possibilités d’industrialisation créatrice d’emplois et de richesses dans les secteurs pharmaceutique, cosmétique ou encore du textile.

Cannabis : la plante salvatrice

Ainsi, la légalisation du cannabis a un double effet : libérer les habitants du joug des trafiquants de drogue et faire entrer les cultivateurs dans le circuit de l’économie légale, ce qui pourrait augmenter le PIB régional. “Cette mesure de réglementer la culture du cannabis dans la région et de transformer cette plante, jusque-là considérée comme un obstacle au développement et un poids psychologique qui pesait sur tout un territoire, en une opportunité d’épanouissement personnel et collectif des populations locales, a joué un rôle décisif dans le changement de paradigme de cette région”, explique le document.

La légalisation de cet “or vert”, comme le nomment des rédacteurs du rapport, est d’autant plus prometteuse qu’elle est en mesure de procurer des opportunités d’industrialisation créatrices d’emplois dans la région du Nord. A cela s’ajoutent les opportunités à l’export qui peuvent se créer avec des pays consommateurs de cannabis, que ce soit pour des usages récréatifs, médicaux ou industriels.

En plus du cannabis, le rapport souligne l’importance des zones d’activités économiques, dont une première modèle a été installée près de Mdiq et Fnideq et offre aux commerçants la possibilité de compenser les pertes de la fermeture du poste frontalier Bab Sebta. Sur ce point, le rapport explique que le fonctionnement de cette zone diffère des traditionnelles zones économiques spéciales (ZES ou SEZ), comme l’on en trouve en Chine ou en Inde vu que ces dernières n’ont pas vocation à mener des activités industrielles et ne bénéficieront pas d’un allégement fiscal.

Comme les retombées de ses projets d’envergure tardent à se faire sentir dans le court terme, il faut penser à des initiatives de réduction du chômage dans les plus brefs délais. Les stratèges de l’IMIS recommandent de rediriger une partie du tissu productif vers le Nord du pays à travers des incitations financières, une simplification des démarches administratives, le lancement de projets engagés et l’accélération de la mise en oeuvre du programme d’appui à l’emploi de la région. D’où l’importance des programmes de soutien à l’entrepreneuriat tels que « Damane Intelak » et « Damane Intelak Al Moustatmir Al Qaraoui », qui ont permis d’initier la création de plus de 1.600 entreprises à travers le territoire national et donc de dynamiser le marché de l’emploi.

Toutefois, ces mécanismes de crédits garantis ont fait l’objet de plusieurs critiques vu le taux de rejet des dossiers qui demeure important. Ce qui pose le problème majeur de l’efficacité de l’accompagnement.

Des chantiers prometteurs

Le rapport met également en avant le rôle que peut jouer le programme Awrach, l’une des nouveautés apportées par le gouvernement d’Aziz Akhannouch dans la loi des finances 2022. Ce projet, dont l’ambition est la création de 250.000 emplois d’ici deux ans, devrait contribuer à absorber, en partie, le chômage chez les personnes sans qualification professionnelle (leur nombre s’élève à 2 millions selon le rapport).

En dépit de toutes les mesures précitées, la transition d’un modèle basé sur la contrebande à une véritable économie productive n’est pas aussi facile qu’elle le paraît. Pour assurer le succès d’une telle transition, il est recommandé de concrétiser les suggestions émises par “ l’Appel de Fnideq”. Une série de doléances présentées par des personnalités éminentes de la ville balnéaire au gouvernement pour le sauvetage de son économie. Parmi les points les plus évoqués : l’intensification des investissements publics et privés dans les secteurs de la pêche, le commerce, le tourisme et l’économie solidaire.

L’épanouissement des régions marocaines du Nord et des présides occupés est-il un jeu à somme nulle ? Pas du tout selon le rapport, qui laisse entrevoir la possibilité d’une complémentarité entre l’économie des enclaves et celle des zones marocaines voisines.

“Ces deux dernières peuvent, en outre, envisager de s’industrialiser ou de se transformer en villes touristiques à part entière, explique le document. Vu la difficulté d’atteindre une telle ambition, les rédacteurs du rapport jugent pertinent de lancer un travail conjoint de réflexion à travers des groupes permanents qui veilleraient à la production de connaissances et à l’amélioration de l’attractivité de toute la zone.

Encore faut-il que les autorités espagnoles soient réceptives à cette idée. Ce qui est, pour le moment, difficile à imaginer compte tenu de la sensibilité des politiques espagnoles envers tout ce qui concerne le Maroc. En définitive, aussi inextricable qu’elle puisse paraître, la transition vers un nouveau modèle économique dans les régions frontalières est possible à condition de faire le suivi des projets lancés.

En tout cas, le Royaume ne peut plus faire preuve d’aucune tolérance vis-à-vis de la contrebande, dont le coût sur la trésorerie nationale est exorbitant.



Anass MACHLOUKH


Contrebande : une tolérance préjudiciable pour le Maroc
 
La pandémie a sonné le glas de la contrebande aux frontières du Maroc avec les enclaves occupées. Quoique le trafic des produits espagnols fait vivre des dizaines de milliers de personnes et leurs familles, par le passé, il demeure illégal vu que les deux présides ne sont pas incluses dans l’accord de libre-échange entre le Maroc et l’Union Européenne. A cela son poids sur l’économie du pays, sachant que, contrairement à ce que pensent les gens, la contrebande crée moins d’emplois qu’elle n’en fait perdre.

Le rapport de l’IMIS est on ne peut plus clair : “Pour chaque emploi créé dans la contrebande, environ dix autres sont détruits dans le circuit formel”. Outre cela, les pertes que subit l’administration douanière sont conséquentes. Force est de constater que le volume des exportations irrégulières de Sebta vers le Maroc a atteint 750 millions d’euros en 2019, rappelle la même source, ajoutant que la contrebande tolérée entre Sebta et Fnideq représenterait entre 6 et 8 milliards de dirhams par an, soit entre 550 et 750 millions d’euros. Sans parler des conditions inhumaines dans lesquelles se fait la contrebande transfrontalière.

 








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