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Pass vaccinal : Après Wiqaytna, l’application « Checkvax » passe à la trappe


Rédigé par Anass MACHLOUKH Dimanche 30 Janvier 2022

Mise en place le 21 octobre pour accompagner l’obligation du pass vaccinal dans les lieux publics, l’application “Checkvax” est rarement utilisée à l’instar de sa soeur jumelle Wiqaytna. Détails.



Le 19 octobre, le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, a pris tout le monde de court, en annonçant l’obligation de la troisième dose sous peine d’invalidité du pass vaccinal au bout de six mois de la prise de la deuxième injection. Décision qui n’a pas incité les gens à aller se faire administrer la dose de rappel, qui demeure rejetée par une grande partie de la population. En témoignent les chiffres de la vaccination : 4,22 millions de personnes vaccinées ont pris la troisième dose, soit 18% des gens ayant eu la deuxième et 11% de la population totale.

Méfiance, paresse, rejet, les motifs sont nombreux et personne ne s’étonne des chiffres dérisoires de la dose de rappel puisque la campagne de vaccination elle-même peine à reprendre son rythme. Malgré les injonctions des autorités qui ont décrété l’obligation du pass vaccinal dans les lieux publics, le contrôle des pass vaccinaux fait défaut au point qu’on a l’impression que ça n’a jamais existé. Nous nous sommes rendus dans différents lieux publics à forte circulation des citoyens, à savoir les gares ferroviaires, les centres commerciaux, les agences bancaires, les grands magasins, les transports publics et plusieurs administrations publiques.

Les contrôles manquent

Dans la majorité des cas, les gens passent sans contrôle, et quand les agents de sécurité s’évertuent à demander le pass, l’air embarrassé et prudent, ils se contentent de voir le certificat sur les écrans des smartphones sans le vérifier. À plusieurs reprises, nous avons demandé à ces agents pourquoi ils étaient si indulgents. Les uns nous ont clairement affirmé qu’ils n’osent pas interpeller les citoyens de peur de subir des esclandres ou de se faire rabrouer, d’autres justifient cela par l’absence de moyens de vérification des pass vaccinaux et leur validité.

Pourtant, le dispositif existe, le ministère de l’Intérieur a lancé depuis des mois l’application « checkvax.ma », accessible à tout le monde. Le département d’Abdelouafi Laftit l’a livrée clé en main au ministère de la Santé qui s’occupe de la supervision via sa Division informatique.

Checkvax : l’application méconnue

Mise en ligne le 21 octobre 2021 pour accompagner l’instauration de l’obligation du pass vaccinal, l’application est mise à disposition des employés des lieux communs et du personnel administratif pour contrôler les usagers.

Contactés par nos soins, des responsables au département de Khalid Ait Taleb nous ont assuré que l’application fonctionne correctement, soulignant que les données de vaccination sont régulièrement actualisées. Nous avons vérifié l’application, qui s’est avérée opérationnelle, synchronisée et actualisée. L’application renseigne sur la date de la dernière vaccination, le type de vaccin et la date d’expiration du pass vaccinal.

Pour les certificats invalides, l’expiration est marquée en rouge sur l’écran. Le Code QR national se trouve en bas à gauche du pass tandis que le Code QR européen est situé en bas à droite. Le Maroc et l’Union Européenne, rappelons-le, ont convenu de reconnaître réciproquement le code QR de leurs passeports vaccinaux.

Pourtant, elle n’est que rarement utilisée pour ne pas dire jamais. Après plusieurs mois de son lancement, l’application demeure peu utilisée sur Android. Force est de constater qu’elle n’a été téléchargée que 10.000 fois, sachant que la dernière mise à jour a eu lieu le 25 novembre 2021.

Wiqaytna : impression de déjà vu

Ce scénario rappelle l’échec de l’application “Wiqaytna”, développée au début de la pandémie pour le traçage des cas contacts. Le dispositif conçu par un conglomérat de sociétés numériques marocaines, dont “Dial Technologies”, pour le compte de l’Etat, est devenu quasiment désuet après des débuts prometteurs. La réussite de cette application dépendait du volontarisme des citoyens et c’est l’un des facteurs de son échec.

Pour les restaurateurs et les cafetiers, pas question d’évoquer la question du contrôle, puisqu’aussi bien les serveurs que les gérants veulent éviter le moindre problème avec les clients. Quelques serveurs que nous avons interrogés à Rabat et à Casablanca ignorent même l’existence de l’application de contrôle des pass vaccinaux. “Je n’en ai jamais entendu parler”, une réponse que nous obtenons souvent.

Contacté par nos soins, Noureddine El Harrak, président de l’Association nationale des cafés et restaurateurs du Maroc, nous a indiqué que la vérification des passeports vaccinaux a été rejetée par les professionnels de la restauration depuis la décision du 19 octobre, arguant que les employés ne peuvent guère se mettre dans la posture de l’agent d’autorité. Dans les transports publics tels que les trains et les tramways, les contrôleurs sont tenus, en principe, de vérifier les pass vaccinaux.

Or, compte tenu de la réalité, ceci n’a pas été suivi d’effets d’autant plus que le contrôle des usagers est difficile, voire parfois impossible. Durant les premières semaines suivant la décision du gouvernement, les responsables du Tramway de Rabat ont tâché d’activer le contrôle, des agents déployés au niveau des terminus ne manquaient pas d’informer les passagers que, dorénavant, l’accès au Tram est conditionné par le pass vaccinal. Ces appels n’ont duré que quelques semaines avant de disparaître.

Pass désactivés : les chiffres indisponibles

Jusqu’à présent, les chiffres des passeports vaccinaux désactivés demeurent inconnus, nous avons contacté plusieurs services au sein du ministère de la Santé pour les obtenir, sans succès puisque le silence reste de mise. Tout ce que nous savons à l’heure actuelle, c’est que 18,79 millions de Marocains sont concernés par la dose de rappel.

L’accès à l’information en ce qui concerne la gestion du pass vaccinal est si compliqué que même la plateforme “Liqahcorona”, mise à disposition du grand public, ne livre pas d’information via l’email indiqué. Nous avons fait une dernière tentative en contactant le Dr Mouad Mrabet, coordonnateur du Centre national d’opérations d’urgence de santé publique, qui nous a renvoyé vers les ingénieurs qui s’occupent de la gestion de plateforme. Malgré nos nombreuses sollicitations, nous n’avions reçu aucune réponse.

Ceci dit, les données sur la désactivation des pass vaccinaux ne sont pas accessibles, voire, peut-être, indisponibles. En France par exemple, les autorités communiquent souvent sur ce genre de données, sachant que 800.000 citoyens français encourent le risque de voir leur pass invalide et de se voir privés d’accès aux lieux publics. Force est de constater que les contrôles sont sévères là-bas. Le Parlement français vient de voter l’obligation du pass vaccinal qui va supplanter le pass sanitaire.



Anass MACHLOUKH


Retour sur une mesure épineuse
 
Rappelons que le gouvernement a instauré, le 18 octobre 2021, l’obligation du pass vaccinal dans les lieux publics. Une mesure destinée à préserver les acquis de la campagne de vaccination. Cette décision n’a pas manqué de soulever plusieurs protestations au début, sachant que plusieurs manifestations ont été organisées dans différentes villes du Royaume. La décision a également fait polémique au Parlement, où une minorité de députés non-vaccinés se sont vus refuser l’entrée à l’Hémicycle.

Outre cela, plusieurs corporations ont refusé l’obligation du pass vaccinal, les avocats ont été les protestataires les plus actifs, en refusant d’être contrôlés à l’entrée des tribunaux. Un compromis a été ensuite trouvé entre l’Association des barreaux du Maroc, le ministère de la Justice et le Ministère public.
 








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