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NamX : La saison II en avant-première [INTÉGRAL]


Rédigé par Soufiane CHAHID Lundi 11 Décembre 2023

Ce lundi 11 décembre, l’entreprise NamX révèle son nouveau modèle, basé sur une motorisation à combustion interne (ICE) pour équiper le HUV, ainsi qu’un design amélioré. En avant-première, Faouzi Annajah nous a accordé une interview pour expliquer ce choix.



Le 15 mai, Faouzi Annajah a présenté devant Sa Majesté le Roi Mohammed VI son premier modèle de voiture à hydrogène de la marque NamX, dont il est le président et le fondateur. Il s’agissait d’un HUV (Hydrogen Utility Vehicule), une voiture qui utilise l’hydrogène comme énergie de propulsion. Le modèle reposait sur la technologie Fuel-Cell, c’est-à-dire des piles à combustible qui génèrent de l'électricité en combinant de l'hydrogène et de l'oxygène.
 
Ce lundi 11 décembre, NamX annonce un changement stratégique majeur pour son véhicule. Le nouveau modèle abandonne la technologie Fuel-Cell, jugée peu efficace, pour adopter un moteur à combustion interne. Selon le futur constructeur automobile, ce changement présente l’avantage de ne nécessiter ni le même niveau de pureté d’hydrogène pour son fonctionnement, ni la même quantité de métaux rares pour sa fabrication.
 
Le design de la voiture a également été revu. En collaboration avec Pininfarina, NamX a retravaillé le design du concept inaugural du HUV afin d’intégrer un nouveau pare-chocs arrière plus aérodynamique et un système d'échappement rendu nécessaire par la combustion d'hydrogène, l’« EXO ». Fait inédit, le design de l’intérieur a été confié à une équipe marocaine.
 
En avant-première, « L’Opinion » a interviewé Faouzi Annajah sur les motivations de ce repositionnement stratégique, ainsi que sur les ambitions et les challenges de la voiture à hydrogène NamX.

  • Le nouveau modèle NamX va passer d’un véhicule hydrogène à piles à un véhicule thermique à hydrogène. Qu’est-ce qui a motivé ce revirement stratégique ?
 
C’est un choix qui a été pris par l’équipe NamX en interne. La réflexion remonte à un peu plus d’un an, lorsqu’on a vraiment commencé à entrer dans le détail des coûts de production, et surtout sur le USP (Unique Selling Point), par rapport à comment se différencier sur un marché. On a été accompagné par des grands acteurs du conseil au niveau international. On a repris tous les détails de chaque coût de pièce, pour avoir le fameux BOM (Bill of Materials), et il s’est avéré qu’avec la Fuel-Cell, nous n’étions pas bons par rapport à ce que nous souhaitions.
 
Au-delà de la question des coûts, qui sont gérables parce qu’ils peuvent baisser avec un meilleur rendement et une production plus efficace, ce qui a motivé aussi le choix, c’est qu’à la fin des fins, vous allez rouler en électrique, puisque c’est une voiture électrique à piles à combustion. Et lorsqu’on sera sur le marché en 2026 ou 2027, il y aura très peu de différence avec une Tesla ou des marques chinoises qui investissent des centaines de milliards d’euros en amélioration des batteries. Et donc ces voitures seront plus performantes encore. Le temps de recharge sera toujours moins bon que la pile à combustible, mais en termes d’accélération, d’autonomie et d’équipements, cela sera compliqué de faire mieux au même prix.
 
Et quand on crée une marque automobile, l’important est d’avoir l’USP pour se différencier. Et donc forcément avec le moteur à combustion d'hydrogène, quand on sera en 2027 avec les moteurs mythiques V8 et V6 avec le côté Green, on va totalement se différencier de ce qui va exister sur le marché.
 
  • La pile à hydrogène présentait un avantage : être plus facile à transporter. Comme vous le savez, le transport de l’hydrogène est compliqué et coûteux. Comment comptez-vous résoudre ce problème de distribution d’hydrogène pour les usagers de la NamX ?
 
L’aspect transport n’a pas eu d’impact dans notre choix. Le sujet n’est pas là, parce que l‘hydrogène qu’on met dans les réservoirs dans les véhicules, que ce soit des voitures, des camions ou d’autres mobilités, c’est de l’hydrogène gazeux. Sur l’aspect du transport, il n’y a pas de différence. On est sur des réservoirs type 4 assez classiques. Par contre, il y a un élément qu’on n’évoque pas assez : dans la pile à combustible, on a besoin d’un hydrogène pur à 99,97%. Moins vous avez un hydrogène pur, plus les filtres ont du mal à fonctionner, et plus vous abîmez la pile à combustible.
 
Alors que pour le moteur ICE (Internal Combustion Engine) hydrogène, on a besoin d’un hydrogène pur à un minimum de 80%. Donc déjà, ce n’est pas la même complexité en termes de filtration et de capteurs. Et croyez-moi, dans la Fuel-Cell, il y a la pile à combustibles, et tous les capteurs qui sont autour. Et ce sont des coûts supplémentaires, ce sont des problèmes de fiabilité supplémentaires. C’est l’enjeu qu’on a eu à trancher.
 
  • Ne pensez-vous pas que la distribution d’hydrogène va constituer un frein au déploiement de NamX ?
 
La naissance de NamX est due au fait que nous avons pensé différemment, et qu’aujourd’hui le problème est le manque de stations d’hydrogène. On n’aurait pas pris le choix hydrogène il y a quatre ans si on n’avait pas une solution à apporter. Au Maroc, il n’y a aucune station d’hydrogène, en Europe, il y en a à peine 150, en France une trentaine, c’est loin d’être suffisant pour rassurer les futurs clients de rouler en hydrogène.
 
On est là pour briser cette dynamique négative consistant à dire que s’il n’y a pas de stations d'hydrogène, donc il n’y a pas de voiture à hydrogène, donc pas de marché. Chez NamX, on crée le marché en ramenant des véhicules premium, et surtout en ramenant ces fameuses capsules à hydrogène qui vont, comme Tesla à l’époque avec les superchargeurs, faire un boost et rassurer les clients en leur disant que quoi qu’il en soit, ils auront une solution minimum pour pouvoir rouler. C’est ce qu’on fait. Sinon, il serait très compliqué de créer ce marché-là, si on n’a pas une solution concrète à apporter aux clients. Entre mettre 80.000 euros dans une NamX ou ailleurs, que ce soit de l’électrique à batterie ou même de l’essence hydride, le choix sera vite fait. Donc, on doit convaincre par cette solution-là.
 
  • Avec les développements que connaît la voiture électrique, notamment en termes d’autonomie, est-ce que la voiture à hydrogène sera toujours compétitive ? Et sur quels segments, selon vous ?
 
Aujourd’hui, vous avez différentes études émanant de différents pays et de différentes organisations qui confirment que le prix de l’hydrogène à la pompe va baisser dans les prochaines années. Aujourd’hui, l’hydrogène est vendu entre 14 et 16 euros le kilogramme, que ce soit en France ou aux Etats-Unis. Cela correspond déjà à un plein moins cher qu’avec l’essence.
 
Pour que ça fonctionne, il faut un mix entre les fournisseurs d’hydrogène qui sont en train de monter en puissance, et croyez-moi il y a beaucoup de projets qui sont en train de passer à la vitesse supérieure pour produire des tonnes d’hydrogène par an, et ce sont nous les fournisseurs de véhicules qui allons offrir des solutions. Donc, c’est en train de se démocratiser. Je sais que c’est compliqué de l’imaginer encore, mais entre maintenant et 2026/2027, il va se passer beaucoup de choses pour l’hydrogène en termes de compétitivité et de prix.
 
Sur le segment, on est et on reste une marque premium. Qui dit premium ne dit pas forcément que les grands véhicules. Nous avons une stratégie de vente bien calibrée, avec des prévisions de ventes jusqu'en 2032 avec évidemment deux types de véhicules. Je ne peux pas vous en dire plus pour l’instant, mais je peux vous confirmer que le HUV ne sera pas le seul véhicule.
 
  • Certains spécialistes disent que la généralisation de l’utilisation de l’hydrogène vert ne se fera pas avant 2030, et même 2040. En visant 2027, est-ce que vous n’arrivez pas trop tôt ?
 
Je pense que c’est le bon time to market d’arriver au moment où c’est en train de croître. C’est comme Tesla. On se moquait d’eux pendant 10 ans en disant que c’était trop tôt, mais finalement ils ont pris une avance technologique par rapport à tous les autres. On n’attend pas que tout soit parfait pour croire en l’hydrogène, d’où nos brevets déposés sur les capsules. 2027 nous semble totalement réaliste. Même par rapport au plan, on a des éléments en interne qui nous permettent d’être confiants pour cette date-là.
 
  • Avez-vous une idée sur combien l’hydrogène vert doit être vendu au kilogramme pour que la NamX soit une bonne affaire pour les usagers ?
 
Cela fait plus de 7 ans qu’on est sur le projet NamX, donc on a beaucoup de données. Mais pour l'instant, on ne communique pas sur ça, on communique uniquement sur le choix du moteur. Il y a beaucoup d’informations à encaisser, donc on y va étape par étape.
 
  • Est-ce que vous avez déposé vos brevets en France ou au Maroc ? Et plus généralement, NamX se définit-elle comme une entreprise française ou marocaine ?
 
Les brevets ont été déposés à l’international, dans tous les pays où il y a une industrie automobile. L'intérêt est de se protéger là où on construit des voitures. Sur la nationalité de la marque, ça n’a pas changé depuis le départ.
 
  • Donc franco-marocaine ?
 
C’est ça.

  • Êtes-vous en contact avec l'écosystème marocain de l’automobile pour évaluer si la NamX pourrait se fournir chez les industriels déjà présents au Maroc ?
 
Aujourd’hui, on est très proches de l'écosystème marocain, et nous travaillons déjà avec eux. Nous travaillons avec une équipe design marocaine basée à Casablanca. L'ambition est la même depuis le départ, faire entrer le Maroc dans l’industrie automobile premium de très haut niveau.
 
  • Avez-vous déjà commencé à localiser l’emplacement pour la future usine d’assemblage ?
 
Je ne peux pas vous dire pour l’instant. Mais je peux vous dire que pour le Maroc, on avance bien.
 
  • Est-ce que vous comptez ouvrir votre capital à de nouveaux investisseurs dans les prochaines années ?
 
NamX a toujours été un projet qui a fonctionné avec des levées de fonds. Il s’agit d’un projet industriel et technologique qui demande un investissement important en capital (CAPEX). Donc, on arrive à lever des fonds auprès de nos partenaires et discutons avec de nouveaux acteurs financiers pour les prochaines étapes.
 
  • Avez-vous senti un changement par rapport aux investisseurs ou aux partenaires depuis le parrainage de Sa Majesté ?
 
Évidemment, cela a eu un effet positif et nous avons eu une écoute attentive des différents acteurs que nous avons rencontrés suite au parrainage de Sa Majesté, Que Dieu l’assiste. Naturellement, à ce stade, je ne peux pas en parler plus en détail.
 
Le nouveau modèle sera donc disponible dans 12 mois…
 
La présentation du nouveau modèle est le dernier événement statique que NamX organise. Le prochain sera en roulant, avec un démonstrateur complet. Pour le lieu de l'événement, on est en train d'étudier différentes pistes. Cela implique beaucoup de choses, notamment en termes de sécurité. C’est quelque chose d’assez important.
 
  • Que vous inspire l'expérience d’Hopium, un de vos concurrents français pour le marché de la voiture à hydrogène, et qui traverse actuellement des difficultés financières ?
 
Nous avons toujours discuté très librement avec Hopium, et on est régulièrement en contact avec eux. On est dans le même secteur, mais il n’y avait pas d’enjeu de concurrence. Il faut comprendre qu’Hopium proposait une berline de sport sans aucun nouveau système de recharge de capsules. Donc, ce n’est pas du tout le même marché, ni la même approche et la même vision des choses. NamX est un projet global pour à la fois le véhicule et le système des capsules. Pour l’instant, Hopium a fait le choix de se concentrer uniquement sur la pile à combustible.
 
  • Quels sont vos marchés cibles ?
 
Dès 2025, 2030 et 2035, les restrictions vont commencer à s'alourdir pour le marché automobile européen. Le Maroc peut être une base de production idéale, pour l’acheminer d’abord vers le marché européen qui est à 15 km. Donc, ça serait une vraie potentialité. Les Etats-Unis restent le marché cible, parce qu'on a un design et une autonomie longue qui plaisent aux Américains.
 
  • Le dernier modèle de NamX a également été développé par Pininfarina. Ce partenariat va-t-il s’inscrire dans la durée ?
 
C’est un partenariat sur le long terme. On a commencé avec eux en 2018, donc l'histoire avec eux est longue et très positive. Pour l’instant, on continue avec eux. Sur le design, on a laissé l’extérieur à Pininfarina et l’intérieur à des designers marocains. Avec l’équipe marocaine, c’était une histoire de rencontre d’hommes. On s’est réuni, on a vu les talents qu’il y avait au Maroc. On a décidé de faire confiance à nos talents marocains, et on a été extrêmement contents du résultat. On a travaillé avec eux sur tout l’intérieur du véhicule. Et croyez-moi, c’est plus complexe que l’extérieur.

 
Propos recueillis par Soufiane CHAHID








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