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Planète

Maâmora en péril: les coulisses de la riposte phytosanitaire


Rédigé par Oussama ABAOUSS le Vendredi 15 Mai 2020

Après un retard causé par les restrictions de vols aériens, les agents des Eaux et Forêts, de l’ONSSA
et de la Gendarmerie Royale ont entamé le traitement des zones infestées.



La chenille, est une espèce de papiloon qui fait partie du cortège entomologique naturel de la Maâmoura
La chenille, est une espèce de papiloon qui fait partie du cortège entomologique naturel de la Maâmoura
Nous vous l’annoncions il y a deux jours, une partie de la forêt de Maâmora est actuellement ravagée par les milliers de chenilles. Dans les parcelles touchées, les arbres de chêneliège ont perdu leurs feuillages. Pourtant l’insecte en cause est une espèce de papillon (bombyx disparate) qui fait partie du cortège entomologique naturel de la Maâmora. Si le papillon adulte est nocturne, ses chenilles sont actives pendant le jour et mangent systématiquement les feuilles des arbres de chêne-liège auxquels elles sont inféodées. Avec une explosion de la population du bombyx disparate les paysages d’arbres défoliés sont inhabituels alors que le printemps bat son plein. « Même si cette espèce fait partie intégrante de l’écosystème de la Maâmora, ses populations peuvent augmenter d’une manière cyclique tous les 9 à 12 ans », explique Dr Fouad Assali chef du Centre National de Gestion des Risques Climatiques Forestiers précisant que le phénomène est actuellement localisé à 95% au niveau de la Maâmora.

Un désagrément pour les riverains

Si le bombyx disparate ravage principalement le chêne-liège il n’en demeure par moins « polyphage » et peut donc s’attaquer à d’autres espèces de flore. « L’émergence des jeunes chenilles coïncide avec le début du printemps quand apparaissent de nouvelles feuilles de chêne-liège. Si ces chenilles finissent de manger les nouvelles et les anciennes feuilles et que l’arbre se retrouve complètement défolié, elles descendent au niveau de la strate arbustive où elles peuvent se nourrir de plantes et d’herbacées du sous-bois pour pouvoir terminer le cycle de croissance. Dans les cas extrêmes les chenilles peuvent théoriquement se propager à d’autres espèces végétales et parfois toucher des terrains d’agricultures s’ils sont à proximité. À ce stade on n’en est pas là », rassure Dr Assali qui précise que les riverains des parcelles de forêts qui sont touchées par le ravageur n’auront à subir que le désagrément dû à la présence des chenilles qui par ailleurs « n’ont aucun impact sur la santé humaine si sur celles des animaux ».

La santé de la Maâmora menacée ?

Les 10% de la superficie totale de la Maâmora ravagés par le bombyx disparate prennent la forme d’îlots touchés à des degrés différents. « Il est certain que l’impact des changements climatiques à travers les années a relativement malmené les écosystèmes forestiers d’une manière générale. Conjuguée avec les périodes de grandes sécheresses, le déficit pluviométrique, les phénomènes d’anthropisation et le surpâturage, l’invasion du « bombyx disparate» peut avoir un impact potentiel sur la santé et la vitalité de la forêt. Cela dit, ce genre d’invasion ne peut avoir un impact réel que lorsque le phénomène advient d’une manière successive et que la menace n’est pas traitée. Or nous ne sommes pas dans ce cas de figure, puisque les traitements existent et se font grâce à la précieuse collaboration avec l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) afin de maintenir les populations de cette espèce au seuil tolérable», précise l’ingénieur forestier.  

Un millier d’hectares traités par jour

Les équipes du Département des Eaux et Forêts et l’ONSSA avaient mené les opérations de surveillance, de prospections, de confirmation et de cartographie depuis septembre 2019 au mois de mars 2020 et avaient réussi à identifier une superficie globale d’environ 15000 ha qui nécessitait un traitement phytosanitaire. La restriction des vols d’aéronefs imposée par les mesures de lutte contre la pandémie de Coronavirus a cependant retardé le début du traitement qui se fait principalement par voie aérienne. La situation a depuis été rectifiée après l’obtention des autorisations dérogatoires nécessaires. Les équipes de la Gendarmerie Royale, du Département des Eaux et Forêts et de l’ONSSA, appuyés par une société spécialisée dans les traitements aériens ont pu entamer le traitement depuis quelques jours, à raison d’un millier d’hectares traités par jour. 

Rendons ici hommage à tous ceux qui sont au chevet de la plus grande forêt monotypique de chêne-liège au monde.

Oussama ABAOUSS

3 questions à Fouad Assali, ingénieur forestier

Fouad Assali
Fouad Assali
« Grâce au traitement nous aidons la dynamique de rétablissement naturel »

Pour avoir plus de détails sur la lutte contre le bombyx disparate nous avons posé nos questions au Dr Fouad Assali, chef du Centre National de Gestion des Risques Climatiques Forestiers.

Les traitements utilisés pour lutter contre le bombyx disparate risquent-ils d’avoir des effets secondaires négatifs sur d’autres espèces ?
-Le produit biologique utilisé n’a pas un impact néfaste sur l’environnement mais peut toucher les chenilles d’autres espèces qui sont au même stade larvaire que le bombyx disparate. Cependant, les populations du ravageur constituent en cette période 95% des populations d’insectes qui peuvent être touchées par le traitement. Lors du traitement nous choisissons soigneusement le timing, les doses et les méthodes d’application afin de limiter au maximum les effets secondaires potentiels.

-Ces chenilles à profusion n’attirent-elles pas des prédateurs naturels comme les oiseaux par exemple ?
-C’est certain. Quand la population de ce ravageur augmente un « cortège parasitaire » fait également son apparition. Des champignons, des insectes, mais aussi des oiseaux se nourrissent de ces chenilles. C’est par ce moyen que la Nature se rééquilibre et limite les populations des ravageurs à des seuils tolérables. Avec l’utilisation des traitements nous aidons justement cette dynamique de rétablissement naturel.

-Est-ce que les dégâts du ravageur ont des retombées sur les droits de parcours des ayants droit ?
-Les ayants-droit n’auront pas la possibilité de faire du parcours au niveau des parcelles qui sont attaquées (à différents degrés) et qui s’étalent sur environ 10% de la superficie totale de la Maâmora.En revanche le parcours peut continuer à se faire dans les zones qui ne sont pas atteintes.

Recueillis par O. A.







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