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L’emploi, un vaccin contre le virus économique touchant des plus démunis ?


Rédigé par DANI Mohamed Amine le Jeudi 28 Mai 2020

Le dilemme est terrible : « Si je ne récupère pas mon emploi après cette crise, je serai dans l´obligation de trouver un emploi même sans contrat ni sécurité sociale, je dois subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille » : pour Lamia, le choix est fait.



DANI Mohamed Amine, responsable de communication d'Oxfam au Maroc
DANI Mohamed Amine, responsable de communication d'Oxfam au Maroc
Cette jeune femme, issue d'un petit village du nord du Maroc, a déménagé à Tanger pour trouver du travail, mais un an plus tard, dans le cadre des mesures prises pour lutter contre la propagation du COVID-19, le gouvernement a décidé d'arrêter toutes les activités de l'usine.

Le Maroc, qui n’a pas opté pour un dépistage systématique et compte à ce jour 7 185 cas, a décrété l’état d’urgence sanitaire le 20 mars pour une durée de 11 semaines. Sans autorisation dérogatoire signée par un employeur officiel, les Marocains ne peuvent plus se rendre au travail. De nombreuses entreprises, usines ont dû fermer. De plus, dans de nombreux secteurs d’activité comme celui de Lamiaa, des millions de travailleurs.es ne peuvent pas faire de télétravail et se sont ainsi retrouvé.e.s sans emploi et sans revenu du jour au lendemain.

Une économie fragile aggravée par la pandémie, une pénurie des emplois à court et à moyen terme.

« Je suis frustrée, je n'ai aucune visibilité sur mon avenir, j'ai eu du mal à trouver ce travail, et maintenant je ne sais même pas si je l'ai perdu, ils nous ont mis en congé sans solde, pour une durée indéterminée, et je ne sais pas combien de temps cela durera. Je ne sais pas si je réussirais à récupérer mon emploi, étant donné la situation économique actuelle », raconte la jeune femme.

Dans le contexte actuel, marqué par une crise économique mondiale avec un impact important sur l'investissement international et les chaînes de valeur mondiales, les travailleurs les plus vulnérables et les plus défavorisés ont dû faire face à une perte de revenus soudaine et non compensée, venant aggravée leur précarité et celle de leur famille ou les replonger dans une pauvreté à laquelle ils commençaient à échapper. En effet, depuis quelques années, le Maroc avait réussi à sortir une partie importante de sa population de la pauvreté mais il est clair que la crise actuelle va mettre en péril, voire anéantir des années de reprise économique et de redressement du niveau de vie des habitants les plus pauvres du Royaume qui restent encore nombreux.

Par ailleurs, Rappelons que selon le HCP (2017), le Maroc compte 34,4 millions d’habitants dont 46.2% a moins de 25 ans mais que le niveau d’éducation de la population constitue un obstacle majeur pour le Maroc, ne lui permettant pas de profiter pleinement de cette aubaine démographique.

Ce faible niveau d’éducation au-delà de l’inégalité sociale flagrante à laquelle il renvoie, impacte directement le marché du travail dont seulement 5% des actifs occupés en 2015 ont un diplôme supérieur!
Pis-encore, le faible niveau d'éducation et la prévalence du secteur informel reste synonyme de précarité et non-respect de lois qui réglementent le marché du travail.
Les salaires des emplois formels sont près de trois fois supérieurs à ceux de l’informel parmi les personnes les mieux formées (HCP). Ceci marque donc une aggravation de la vulnérabilité d’une large partie de la population et une augmentation des inégalités.
 « Au Maroc, les jeunes en situation de précarité n´ont aucune visibilité sur leur avenir, même avec un emploi en poche. Après les mesures prises par le gouvernement, l'usine a décidé de fermer et par conséquent je suis en congé sans solde », précise Lamia aujourd’hui pour expliquer son absence de revenu.
 
Les travailleurs les plus vulnérables et les plus défavorisés sont les plus touchés par les mesures de confinement.

Les restrictions à l'activité économique affectent principalement les travailleurs dont les salaires sont plus bas et les conditions d'emploi moins favorables. Les secteurs les plus touchés par la crise selon le HCP sont l’hôtellerie et la restauration avec 89% des entreprises en arrêt, les industries textiles et du cuir 76% et les industries métalliques et mécaniques avec 73%, ainsi que le secteur de la construction avec près de 60% des entreprises en arrêt.

Des secteurs d´activités généralement caractérisées par des salaires modestes et des conditions de travail précaires, et qui ont tendance à avoir une concentration plus élevée de femmes et de jeunes travailleurs.
 
Les répercussions économiques du Covid-19 à moyen et à long terme restent préoccupantes.

« Mon rêve est simple, je veux échapper à la pauvreté et subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille », raconte encore Lamia, désemparée.

Pour avancer vers une atténuation progressive de l´impact économique et sanitaire de la crise Covid-19 qui va accroitre le chômage des jeunes, en particulier des NEETs, déjà très élevé, le gouvernement Marocain est dans l´obligation de continuer les réformes inachevées pour la protection des salarié.es, telle que l’emblématique statut des travailleurs saisonniers dans le code du travail.
Si les mesures d’urgence ont permis de compenser les pertes de revenus pour les travailleurs du secteur informel, leur offrant même parfois une protection sociale rapide et inespérée, cette situation doit permettre de questionner l’efficacité et l’efficience des mesures des autres filets sociaux en profitant de la réforme du modèle du développement pour revoir en profondeur les leviers de production des inégalités dans le modèle actuel. Ainsi, une formalisation du secteur informel est de plus en plus urgente, pour que l’économie formelle puisse intégrer ces travailleurs, leur offrant un travail digne et décent et donc une protection sociale permanente permettant ainsi à l’Etat de bénéficier des contributions qui en découleront.
 
Oxfam au Maroc, toujours près des plus démunis.es

Oxfam et ses partenaires, œuvrent pour soutenir les jeunes au Maroc et essaient tant bien que mal de poursuivre leurs actions malgré le confinement. En effet, « Beaucoup de ces jeunes ont perdu leur emploi et, du fait de leur statut de NEET, nous sommes obligés de les aider et de les accompagner pendant cette crise », regrette Oussama Badaoui, chargé de projet à l’ONG Casal dels Infants Maroc.
 
Oxfam et ses partenaires sont engagés à continuer leurs combats pour lutter contre les inégalités et vaincre la pauvreté.  Et de ce fait, Oxfam au Maroc plaide notamment pour garantir l´accès aux droits économiques et sociaux et au travail digne et décent pour les populations marginalisées à travers un empowerment économique des jeunes garçons et filles via l´entreprenariat social et rural,  l’atteinte d’un meilleur investissement dans les secteurs sociaux, la reconnaissance du travail saisonnier dans le droit du travail,  l’encouragement  à la création d’entreprises et coopératives citoyennes qui offrent une meilleur protection à leurs salarié.e.s et membres ainsi que la révision et l’élargissement des politiques de protection sociale en vigueur. 

DANI Mohamed Amine







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