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Interview avec El Mehdi Boudra : « Il faut former le marché marocain à la Casheroute »


Rédigé par Rime Taybouta Mardi 7 Juin 2022

Nous l’avons rencontré lors du premier festival de l’art culinaire judéo-marocain, qui s’est tenu le 29 mai à l’Institut Supérieur International de Tourisme de Tanger (ISITT). El Mehdi Boudra, Président et Fondateur de l’Association Mimouna, est convaincu que l’art culinaire est un atout de communion pour les Marocains de toutes les confessions



- Pourquoi un festival sur l’art culinaire judéo-marocain ?

- La première édition du Moroccan Jewish Food festival est un projet financé par l’USAID, qui entre dans le cadre du programme Dakira, dont l’objectif est de promouvoir la diversité culturelle du Maroc. C’est une occasion de rappeler que la cuisine juive est imprégnée de ses racines marocaines, profondément attachée aux valeurs du judaïsme, comme elle est un modèle de fusion entre Israël et le Maroc.

A travers la transmission de la mémoire entre les générations, aujourd’hui, la cuisine marocaine est très connue dans le monde entier, mais, malheureusement, la facette juive de cette cuisine n’est pas connue au Maroc. Les saveurs de toutes les enfances ont toujours été modelées par les héritages pluriels.

Les recettes se développent et mûrissent sous les cieux qui ont vu chacun naître et grandir, et notre mission sera de les porter depuis par-delà les frontières. Il faut donc promouvoir la cuisine juive aux professionnels du secteur de sorte à préparer un environnement propice pour cette nouvelle cible du tourisme marocain, à même de la fidéliser, surtout que le Royaume s’apprête à accueillir plus de 200.000 touristes juifs israéliens qui souhaiteront avoir une nourriture cacher, ce qui nécessite de former le marché marocain à la Casheroute.


- Comment la cuisine marocaine juive a-t-elle évolué au fil des temps ?

- Les valeurs du judaïsme marocain se sont toujours reflétées dans sa communauté, qui, dans sa manière de faire un plat et encore dans sa manière de les partager, est restée fidèle à ses antiques traditions. La femme marocaine juive qui régnait sur sa cuisine n’avait pas conscience que son modeste « royaume » réunissait des trésors de mots, de gestes, de proverbes, et un savoir-faire glané, hérité puis offert. Un capital qui voyage de génération en génération, restitué, avec loyauté. Des recettes anciennes et authentiques qui ne font pas preuve de passéisme.

Cela montre qu’il y a une grande synergie entre l’ancienne génération qui connaît bien ses traditions et ses plats et la nouvelle génération qui innove et actualise ces derniers à nos goûts, en respectant ses bases, sans oublier son adaptation aux besoins internationaux pour que notre cuisine soit internationale. La communauté juive marocaine a pu prolonger ce lien naturel et cette mémoire perdure, en gardant ces coutumes qui forment le coeur des tables.


- Depuis la reprise des relations maroco-israéliennes, nous remarquons un afflux massif de juifs vers le Royaume. Quel effet sur l’image du Maroc ?

- Ces Marocains juifs du Monde sont d’excellents ambassadeurs de notre culture et notre patrimoine. Aujourd’hui, le retour de ces Marocains sera très bénéfique pour notre pays, notre secteur touristique ainsi que le développement des compétences dans plusieurs secteurs. Ce retour nécessite une adaptation à ce type de clientèle qui est très attachée à son pays d’origine et qui fera tout pour donner une meilleure image de ses coutumes.


- Quelle est l’importance de l’éducation dans la promotion de la culture juive dans toutes ses dimensions ?

- Le festival a été l’occasion de signer une convention entre la tutelle et l’ISITT qui a porté sur trois axes, à savoir la création d’un master du patrimoine judéo-marocain au sein de l’institut, la formation des guides exerçant l’hébreu et l’organisation d’ateliers de cuisine et des conférences sur la gastronomie judéo-marocaine. Ce Maroc pluriel a commencé par cette formation supérieure, mais cette dynamique devra être développée à partir de l’éducation nationale.

Aujourd’hui, l’Etat marocain est en train de travailler sur le profilage de la clientèle juive marocaine pour répondre à ses demandes et respecter ses règles. La stratégie du Maroc en matière de liberté religieuse et de multiculturalisme repose sur le dynamisme de sa longue expérience historique, les principes religieux qui appellent à la modération et à la solidarité, et l’institution royale qui s’efforce d’assurer la protection des minorités religieuses et ethniques locales et le dialogue interreligieux.

L’attribut déterminant du Maroc a été le mélange de civilisations, de religions, de peuples et de races à travers l’Histoire et à travers les générations. Il a montré qu’il est capable de faire face à un large éventail de migrations. En raison de son appréciation du multiculturalisme, le royaume a créé un espace de coexistence et de connexion humaine.

Recueillis par Rime TAYBOUTA

Portrait


Un homme passionné par l’identité juive marocaine
 
El Mehdi Boudra a un intérêt particulier pour les droits des minorités et le dialogue interculturel. En 2007, il a fondé et est depuis président de l’Association Mimouna, une ONG marocaine qui cherche à promouvoir le patrimoine juif marocain et le dialogue judéo-musulman.

En 2011, Boudra a organisé la première conférence sur l’Holocauste dans le monde arabe et, en 2012, il a organisé le premier séminaire d’étudiants arabes en Israël.

En 2018, Boudra figurait sur la liste « J100 » de l’Algemeiner des cent premières personnes qui ont influencé positivement la vie juive. Il est cofondateur de la Jewish Africa Conference, en 2019. Le président de l’Association est associé aux Conseils d’administration de nombreuses organisations civiques et éducatives au Maroc et aux États-Unis, telles que la Fédération américaine séfarade (ASF) et le Conseil international consultatif et de recherche du Centre interuniversitaire d’études sur le terrorisme (IUCTS).

De 2015 à 2021, il rejoint un groupe de réflexion marocain où il assure la direction de son programme de relations internationales. Boudra est titulaire d’une maîtrise du programme d’études sur la paix, les conflits et la coexistence de l’Université Brandeis et d’une licence en études internationales de l’Université Al Akhawayn d’Ifrane.
 








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