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Devant le silence du gouvernement, les blouses blanches montent au créneau


Rédigé par Hajar LEBABI Mercredi 28 Octobre 2020

Après l’enregistrement de 1000 cas de contamination dans leurs rangs, les infirmiers se preparent à faire enntendre leurs voix devant le ministère de tutelle.



Devant le silence du gouvernement, les blouses blanches montent au créneau
Face la recrudescence de cas de contamination au Coronavirus dans les rangs des infirmiers et des professionnels de la Santé, les protestations reprennent de plus belle. Ces soldats de l’ombre, souvent ignorés, sont indubitablement en première ligne dans la lutte contre le virus mortel, et par là même, exposés à tous les dangers qui découlent de cette pandémie planétaire.

Le Mouvement des Infirmiers et des Techniciens de Santé du Maroc (MITSM) annonce donc un sit-in pour le 14 novembre 2020 devant le siège du ministère de la Santé, exception faite des services d’urgence et de réanimation. Dans ce contexte, le MITSM revendique clairement au gouvernement une reconnaissance de tous les efforts et les sacrifices consentis par les infirmiers et autres techniciens pendant cette crise sanitaire.

Le mouvement des blouses blanches a expliqué qu’à différentes périodes, aussi bien dans les crises les plus sombres, que pendant les périodes de faste, l’infirmier marocain a toujours été, et sera toujours présent avec force pour incarner le sens du sacrifice et de la loyauté envers la patrie. D’autant plus qu’il n’a jamais manqué à son devoir humain et professionnel, quelles que soient les circonstances et l’adversité.

Avec les sacrifices, viennent les contraintes
En revanche, la pandémie de la Covid-19, avec toutes les contraintes qui l’ont accompagnée, a révélé des déséquilibres dans le système de santé du pays, et la gestion aléatoire que le secteur subit depuis des années. Elle a également prouvé le rôle important joué par les professionnels de la Santé dans ces conditions exceptionnelles. Cette crise a sublimé le rôle des infirmiers, que ce soit dans la promotion du secteur de la Santé ou dans l’accomplissement des tâches qui leur incombent.

Cette réalité, qui démontre une situation précaire, est d’autant plus dangereuse pour ces professionnels que le nombre de contaminations au Coronavirus, parmi les infirmiers, est de presque 1000 cas, au vu du recensement fait par le mouvement pour donner une idée approximative de la situation sur le terrain. A ce sujet, le ministère de la Santé garde un silence pour le moins étonnant. D’ailleurs, plus de 10 décès ont été enregistrés dans les rangs des infirmiers à cause du Covid-19.

«La pandémie a mis à nu les failles du secteur de la Santé. Nous avons enregistré presque 1000 cas de contamination dans les rangs des infirmiers, dont plus de 200 cas ont été enregistrés ces deux dernières semaines à cause du virus. Qui plus est, 6000 infirmiers et plus sont actuellement au chômage. Ils ont été formés par l’Etat, et ont été, par la suite, délaissés», nous déclare Hassane Abdlaoui, Coordonnateur régional du MITSM de la région de Souss-Massa et membre du comité chargé des médias.

«Nous avons un manque flagrant de personnel soignant, chaque infirmier assure les tâches effectuées en principe par 3 infirmiers. D’un autre côté, il est inconcevable qu’en 2020, les infirmiers continuent à travailler dans un cadre juridique qui n’est pas défini. En l’absence de ce cadre, ils sont exposés à des poursuites judiciaires et soumis au code pénal comme s’il s’agissait de criminels», s’insurge notre interlocuteur.

La régularisation du cadre de travail s’impose
Le mouvement exige donc l’équité dans la revalorisation des indemnités sur les risques liés à l’exercice de la profession, en plus d’une réparation rétroactive pour toutes les victimes du décret 2.17.535 depuis sa publication en 2017. Que ce soit les infirmiers auxiliaires, les infirmiers diplômés avec une formation de deux ans, les infirmiers diplômés avec une formation de trois ans, les diplômés du deuxième cycle, et les détenteurs de masters en pédagogie des infirmiers.

Cela devrait également être accompagné par des mesures permettant d’assurer l’emploi à tous les diplômés, qui sont actuellement au chômage, hors du statut de contractuels. Le mouvement revendique également la création d’un Ordre national des infirmiers et techniciens de santé, et la mise en place d’un référentiel des emplois et compétences des métiers paramédicaux, sans oublier l’amélioration des conditions de promotion. Les blouses blanches se disent déterminées à faire entendre leurs revendications, en espérant qu’elles trouvent écho auprès du ministère de la Santé et que leurs conditions de travail ne tardent pas à être améliorées. 
 
Hajar LEBABI 

3 questions à Hassane Abdlaoui

Hassane Abdlaoui
Hassane Abdlaoui
« Nous sommes en première ligne contre ce virus, et malheureusement, nous subissons les répercussions d’une mauvaise gestion du secteur de la Santé »

Le Coordonnateur régional du MITSM de la région de Souss-Massa et membre du comité chargé des médias, Hassane Abdlaoui, nous livre ses réflexions sur la situation des infirmiers.

- Qu’est-ce qui a marqué les infirmiers lors de leur exercice en cette période de pandémie ?
- Les infirmiers, à l’instar de tous les professionnels de la Santé, ont fait preuve de dévouement en cette période. Nous nous sommes engagés pour accomplir notre devoir, humain d’abord, et professionnel ensuite. Nous sommes en première ligne contre ce virus, et malheureusement nous subissons les répercussions d’une mauvaise gestion du secteur de la Santé. Cela ne fait pas partie des priorités du gouvernement et la pandémie a mis à nu plusieurs failles dans ce secteur. Les conditions de travail sont très dures, surtout avec le manque de bavettes et de désinfectants.

- Quelles sont les revendications pressantes qui ont motivé votre sit-in ?
- L’une des revendications, qui sont très importantes, est celle de l’équité dans la revalorisation des indemnités sur les risques liés à l’exercice de la profession. Le virus ne fait pas de distinction entre un médecin et un infirmier. D’ailleurs, ce dernier est le plus en contact avec les malades. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) déclare que 80% des tâches, dont le malade a besoin, sont accomplies par les infirmiers. En revanche, il y a une injustice dans la réparation des erreurs professionnelles. L’infirmier est rémunéré à hauteur de 1400 dhs pendant toute sa vie professionnelle, tandis que le médecin, par exemple, passe de 2800 dhs à 5900 dhs. Et-ce que c’est la récompense faite aux infirmiers, au lieu de nous encourager, nous subissons des retenues sur salaire et nous n’avons même pas bénéficié de notre congé annuel.

- Comment peut-on améliorer le cadre institutionnel de la profession ? 
- Nous demandons la création d’un Ordre national des infirmiers et techniciens de santé et la mise en place d’un référentiel des emplois et compétences des métiers paramédicaux, afin de protéger le métier des violateurs. On ne peut pas permettre à qui que ce soit de jouer avec la santé des citoyens. Il faut que des infirmiers qualifiés s’en occupent. C’est une revendication qui est plus dans l’intérêt du malade que de l’infirmier.

Recueillis par H. L.

Revendication : la Fédération Nationale de la Santé déplore les conditions de travail 
Vue l’augmentation des cas de contamination parmi les travailleurs dans le secteur de la Santé, la Fédération Nationale de la Santé, affiliée à l’UMT, a continuellement appelé le ministère de tutelle à déclarer et reconnaître le nombre total de ces cas, ainsi que le nombre des morts parmi eux. Pourtant, le ministère de la Santé s’obstine à ne pas répondre à cette requête et persiste à adopter une attitude de négligence.

De plus, la Fédération en question appelle à la création d’une cellule spéciale qui aurait pour mission de prendre en charge les travailleurs du secteur contaminés et les membres de leurs familles, ainsi que la réalisation d’un bulletin quotidien du suivi épidémiologique des travailleurs du secteur.

Selon les données disponibles actuellement, déclarées par Rahal Lahssini, adjoint au secrétaire national de la Fédération Nationale de la Santé, ils sont aujourd’hui près de 1500 médecins, infirmiers, techniciens de santé ou cadres administratifs, à avoir contracté le virus pendant l’exercice de leurs fonctions, dont près de 20 personnes ont connu la mort. 

Ces agents de la Santé, qui forment les premières lignes de la lutte contre la pandémie, ont pendant des mois déploré leur situation de travail au sein des hôpitaux. 

En outre, il convient de noter que la Fédération Nationale de la Santé a appelé à la nécessité de déclarer les travailleurs du secteur de la Santé atteints de la Covid-19 au sein de leur lieu de travail comme victimes d’accidents du travail, une demande également ignorée par le ministère.

Repères

La FNS souhaite intégrer la CGEM 
La Fédération Nationale de la Santé (FNS) a émis son vœu d’intégrer la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM). A ce titre, elle a été reçue, le jeudi 22 octobre, par Chakib Alj et Mehdi Tazi. La Fédération a réussi à fédérer toutes les filières de la Santé : plus de 70% de ses membres sont des entreprises couvrant les différents segments du secteur. Au cours du débat, le président de la FNS a assuré que celle-ci serait au sein de la CGEM en tant qu’entrepreneur. La FNS affirme représenter 100% de l’industrie pharmaceutique, 80% du secteur des dispositifs médicaux, 90% des cliniques et 100% des grossistes. Elle est l’interlocuteur du ministère de la Santé et de l’ANAM avec qui elle a signé récemment des conventions. La FNS a souhaité intégrer la CGEM pour renforcer les synergies en faveur de la santé au Maroc.
Les médecins du privé appelés en renfort
Le wali du Grand Casablanca appelle les professionnels de la Santé du secteur privé vers le secteur public à effectuer des missions ponctuelles au sein des structures publiques pour soulager leurs confrères du public. En d’autres termes, les professionnels du privé seraient appelés à se joindre volontairement à leurs collègues du public, soumis actuellement à une forte pression dans la région. Ces missions donneront lieu à une compensation pécuniaire, à titre de dédommagement. Celui-ci sera couvert par des dons en provenance du secteur privé, collectés par la wilaya.