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Cycle de l’eau : Les chutes de neige sont-elles en voie de disparition ?


Rédigé par Oussama ABAOUSS Jeudi 23 Décembre 2021

Au Maroc, les chutes de neige ont drastiquement diminué ces dernières décennies. Un phénomène inquiétant au vu du rôle que joue la neige dans le cycle de l’eau dans notre pays.



Cycle de l’eau : Les chutes de neige sont-elles en voie de disparition ?
D’aucuns la craignent, car elle est synonyme de vagues de froid et de blocages des voies. D’autres croisent les doigts pour qu’elle soit au rendez-vous, puisqu’avec elle embellissent les paysages de montagne qui offrent ainsi une myriade de possibilités pour pratiquer des activités et des jeux qu’affectionnent particulièrement les sportifs et les familles. Sous nos cieux, la neige visite les monts et lieux haut-perchés. Elle se cantonne aux reliefs où les températures peuvent chuter en deçà de 0°.

Depuis le début de l’hiver en cours, quelques précipitations neigeuses ont été enregistrées çà et là, mais depuis le dernier épisode datant du début novembre 2021, la plus grande part des neiges au sol a fondu. Cette semaine, de nouvelles chutes pourraient être enregistrées. Nous sommes cependant loin des moyennes consignées il y a quelques décennies au Maroc. Une réalité inquiétante au vu du rôle que jouent les chutes de neige dans le cycle de l’eau de notre pays.

Un stock stratégique

Si l’hiver rime avec précipitation pluviométrique, l’un des avantages majeurs de la neige est de pouvoir se conserver tant que les températures n’ont pas augmenté. Une fois le printemps puis l’été arrivés, l’eau continue à affluer de l’amont des terres, alors que les pluies ont le plus souvent cessé, justement grâce à la fonte progressive de la neige. Une eau qui ruisselle en surface et dans les profondeurs des nappes, au moment où l’on a le plus besoin.

« Ces chutes de neige jouent un rôle très important dans le renouvellement des ressources en eau du pays. En effet, l’eau résultante de la fonte de neige alimente les cours d’eau et les lacs, qui contribuent au remplissage des réservoirs hydrauliques. Elle contribue aussi à la reconstitution des nappes phréatiques, qui sont essentielles pour l’alimentation en eau potable et pour l’agriculture, en particulier pour l’irrigation des cultures », nous explique la Direction Générale de la Météorologie.

Une tendance à la baisse

Si la neige est aussi salutaire pour le cycle de l’eau dans notre pays, force est de constater que les quantités et niveaux de précipitations neigeuses enregistrées dans notre pays, durant les 50 dernières années, ont dramatiquement baissé.

« A l’instar des précipitations de pluie, les chutes de neige sont caractérisées par une variabilité interannuelle. Il est à noter que le cumul de neige annuel n’a jamais dépassé les 200 cm depuis la saison 1978-1979 jusqu’à présent au niveau de la station d’observation météorologique d’Ifrane située à 1664 m d’altitude. Cette station possède un cumul record annuel d’environ 497 cm enregistré durant la saison 1973-1974 »,précise la Direction Générale de la Météorologie.

D’autres indicateurs attestent de cette tendance à la baisse : les superficies touchées par les précipitations de neige qui sont en deçà des moyennes enregistrées il y a quelques décennies, mais également le nombre de jours d’enneigement par an qui est actuellement bien loin des hivers à plus de 70 jours de neiges (enregistrés pendant les saisons 1935-36, 1955-56, 1962-63 et 1970-71).

Impact des changements climatiques

Un autre indicateur évocateur : la disparition des « neiges éternelles » qui, au siècle dernier, couvraient les plus hauts sommets du Royaume. Cette baisse inquiétante des chutes de neige n’est pas spécifique au Maroc puisqu’elle s’étend à plusieurs pays de la région méditerranéenne.

« Les derniers résultats parus au niveau du sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) montrent que l’ensemble du pourtour méditerranéen connaîtrait une réduction pluviométrique variant en amplitude selon le degré de réchauffement global atteint. De ce fait, les précipitations neigeuses pourraient connaître une variation impactée par cette réduction pluviométrique, d’une part, et par l’augmentation des températures, d’autre part », précise notre source à la Direction Générale de la Météorologie.

Un constat qui souligne encore plus les risques de pénurie hydrique auxquels fait face le Royaume et qui imposent de revoir et d’anticiper cette mutation climatique inquiétante.


Oussama ABAOUSS

Repères

Pourquoi la neige est blanche ?
La lumière qui nous arrive du soleil comporte toutes les couleurs. Lorsque celle-ci arrive sur la neige, elle est réfléchie par les cristaux. Tous les rayons lumineux vont se mélanger et notre oeil va le percevoir comme du blanc, car il est le mélange de toutes les couleurs. Cette caractéristique permet à la neige de fondre beaucoup moins vite, car la lumière n’est pas absorbée, mais renvoyée vers l’atmosphère. Ce phénomène est appelé effet d’albédo : le blanc renvoie la lumière alors que le noir la transforme en chaleur.
 
Quand le Maroc était au pôle Nord…
Il fut un temps sur la planète Terre où les territoires qui représentent le Maroc d’aujourd’hui, étaient sous la glace. Cet épisode, connu chez les scientifiques par « glaciation de l’Andéen-Saharien », a affecté l’actuel hémisphère Nord il y a plus de 400 millions d’années et a duré près de 30 millions d’années. Pendant cette période, l’Afrique de l’Ouest, le Centre-Ouest de l’Arabie Saoudite et le Maroc, étaient des zones qui se trouvaient, à l’époque, aux latitudes polaires de la planète !

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Cycle de l’eau : Les chutes de neige sont-elles en voie de disparition ?

Monde


Les chutes de neige conditionnées par les températures négatives

Les chutes de neige peuvent toucher toutes les régions d’un pays situé au Nord de l’hémisphère Nord. Dans les pays de la Méditerranée-Sud, la présence de la neige se limite à des zones d’altitude. Cette répartition reflète un phénomène qui, en plus de la présence de nuages, conditionne les chutes de neige : les températures en deçà de 0°.

Au Maroc, ce genre de conditions climatiques qui favorisent les précipitations sous forme de neiges ne se trouve qu’au-delà d’un certain niveau d’altitude (500 mètres). Les montagnes du Rif situées sur l’extrême Nord du pays présentent des altitudes atteignant les 2000 mètres, ce qui leur permet de se vêtir partiellement d’un manteau de neige en période hivernale.

Même chose pour les chaînes du Haut et du Moyen Atlas dont le plus haut sommet (Toubkal) culmine à 4165 mètres. En Afrique sub-saharienne, le seuil minimal pour les chutes de neige augmente pour atteindre 2000 mètres. Il existe plusieurs pays en Asie, en Amérique Latine et en Afrique, où les chutes de neige sont totalement absentes.

 

Sports d’hiver


La plus haute station de ski en Afrique se trouve au Maroc

Il existe au Maroc plusieurs sites propices à la pratique du ski, de la luge et du snowboard, pour peu que la neige soit au rendez-vous. Parmi ces sites, plusieurs « spots secrets » connus par les adeptes sont situés dans des zones souvent difficiles d’accès. À ceux-là, s’ajoutent au moins trois stations de ski où ont été aménagées des infrastructures adaptées. C’est le cas de la station de ski de l’Oukaimden, située dans le Haut Atlas, à quelque 70 km de la ville de Marrakech.

Avec des pistes aménagées à des altitudes oscillant entre 2700 et 3200 m, la station de l’Oukaimden est considérée comme la plus haute en Afrique. C’est aussi la station la mieux équipée du pays avec trois téléskis, un télésiège, une école de ski, et six remonte-pentes. Sur place, une véritable économie saisonnière s’est organisée, mais qui, actuellement, souffre à cause de la pandémie de Coronavirus et de la raréfaction de la neige.

Dans le Moyen Atlas, la station de ski de Michlifen est également un site connu des sportifs et des familles qui peuvent y pratiquer des descentes en luge. La station, qui ouvre ses portes de décembre à mars, est aménagée sous forme de cinq pistes situées entre 1800 et 2000 m, avec deux téléskis, un hôtel et un centre d’accueil des sports d’hiver et de montagne. Enfin, la station de Habri, moins connue que celles de l’Oukaimden et de Michlifen, héberge deux pistes de 50 à 200 m. Elle se trouve à près de 2000 m d’altitude, à une quinzaine de kilomètres de la ville d’Azrou.

 

3 questions à Khalid El Rhaz, ingénieur météorologue


« La grêle et la neige sont issues de deux phénomènes très différents »
 
 
Chef du service climat et chargements climatiques à la Direction Générale de la Météorologie et ingénieur météorologue, Khalid El Rhaz répond à nos questions.


- Quelle est la dernière année pendant laquelle le Maroc a connu des chutes importantes de neiges ?

- L’année 2006 a été marquée par des chutes relativement importantes de neige au niveau du territoire marocain. Les niveaux qui ont été enregistrés sont cependant restés en deçà des moyennes record que notre pays a connues pendant les années 60 et 70 du siècle dernier.


- Quelles sont les différences entre les chutes de neige et les chutes de grêle ?


- Les précipitations sont soit liquides (pluie) soit sous forme solide (grêle et neige). Pourtant, la grêle et la neige sont issues de deux phénomènes très différents. La grêle est généralement liée à des phénomènes orageux qui peuvent parfois avoir lieu même en période d’été. Le type de nuage qui peut donner de la grêle a toujours une extension verticale très haute.

À titre d’exemple, l’extension verticale d’un nuage de ce genre peut atteindre 13 kilomètres entre sa base et son sommet. Les mouvements qui peuvent avoir lieu au sein de ce genre de nuage peuvent amener à la condensation de gouttes d’eau à très haute altitude où les températures sont très basses. La grêle, c’est justement l’eau qui s’est glacée très haut, et dont la chute s’est faite si rapidement que le grêlon n’a pas eu le temps de fondre.


- Ce n’est pas comparable aux conditions qui peuvent engendrer des chutes de neige…


- Non. La neige, c’est un tout autre phénomène, puisqu’elle est issue d’un front nuageux dont l’extension verticale n’est pas aussi importante. Les gouttelettes d’eau se transforment en neige avant d’atteindre le sol : quand il y a une température générale négative. Un même nuage peut par exemple donner de la neige à Ifrane (car la température y est en dessous de 0°), et donner de la pluie à El Hajeb (parce que la température est au-dessus de 0°).
 

Recueillis par O. A.
 








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