Selon Encyclopedia Britannica (« Contrat Social »), ce qui distinguerait la pensée de Hobbes, Locke et Rousseau serait leur tentative de « justifier le pouvoir politique comme étant basé sur l'intérêt individuel et le consentement rationnel». Ils ont tenté d’expliquer quand le « système de gouvernance » sert les intérêts de l’individu et quand celui-ci l’accepte en tant que « devoir contraignant ». Mais les trois philosophes diffèrent selon que leur objectif est de justifier le système de gouvernance ou de protéger les individus (ibid.).
Dans son livre Leviathan or The Matter, Forme and Power of a Common-Wealth Ecclesiasticall and Civil, paru en 1651, Thomas Hobbes décrit la nature primitive de l’Homme comme étant cruelle et chaotique dans un état de guerre permanent ; ainsi les individus se sont résignés à choisir un dirigeant despotique qui les priverait de leur liberté mais qui les protégerait du chaos et de la guerre.
Pour sa part, John Locke, dans Two Treatises of Government (1690), soutient que la nature des choses présuppose des droits naturels qu’il faut préserver contre l’insécurité. C’est pourquoi l’obéissance à un pouvoir civil est une forme de « protection des individus et de la propriété privée », et si le gouvernant enfreint la loi, il serait légitime de le renverser (Encyclopedia Brittanica).
Hobbes fonde donc sa théorie sur la nécessité de surmonter le chaos primitif troquant ainsi la liberté pour la sécurité et la stabilité, alors que Locke estime que les droits de l'Homme sont des droits naturels et inhérents qui doivent être préservés en choisissant un dirigeant qui assurerait la sécurité et la justice en échange de l'obéissance de la population.
Pour sa part, Rousseau déclare dans Du contrat social : ou principes du droit politique, publié en 1762, que l’Homme à l’état de nature était « bon », et n’a ainsi pas pu développer de compétences mentales, ni de sens de responsabilité ou de conscience morale (Encyclopedia Brittannica). Toutefois, lorsque l’Homme a décidé d'abandonner sa liberté et d'établir un État et une loi afin d'assurer sa sécurité et sa protection, il acquiert dès lors un sens de la moralité et de la citoyenneté.
Ce qui est important pour Rousseau, c’est l’aspect vertueux, c’est-à-dire que l’Etat repose sur la moralité : le gouverné devrait se conformer à la décision du gouvernant, ce dernier garantissant la sécurité et le bien-être de tous. Le contrat est donc tout d’abord d’ordre moral puis d’ordre « citoyen » en second lieu, mais ce qui est important est de pouvoir passer de ce qui est naturel et instinctif à ce qui est moral.
Marx et Engels ont trouvé dans la théorie du « contrat social », surtout chez Locke et Rousseau, une source de la pensée utopique prônant une démocratie directe non basée sur l’intérêt personnel ; par ailleurs, ils l’ont considéré une tentative désespérée de la classe bourgeoise afin de concilier les intérêts des personnes influentes et ceux du peuple, comme l’a noté James Sterba dans "A Marxist Dilemma for Social Contract Theory." (American Philosophical Quarterly 19.1 (1982): 51-59.)
Du point de vue marxiste, on ne peut parler de contrat que si le prolétariat assume son rôle historique, s'empare des moyens de production et élimine le mode de production capitaliste. Comme si Marx et Engels utilisaient Rousseau et Locke uniquement pour montrer qu’il fallait revenir au stade primitif, c’est-à-dire au stade précédent la venue du contrat social—un stade primitif en tant que pratique d'un modèle naturel de production (voir Friedrich Engels, “Der Ursprung der Familie, des Privateigenthums und des Staats” 1884.)
La différence est ostensible entre Rousseau et Marx: le premier voit dans le passage au contrat social un sens croissant de conscience morale; tandis que le second y voit un retour vers un mode primitif utopique, le summum de la moralité.
John Rawls était le philosophe le plus influent du XXème siècle à avoir utilisé le concept de «contrat social» afin de jeter les bases théoriques d'une «société juste». Dans son livre Theory of Justice, publié en 1971, Rawls critique l'utilitarisme qui considère que la justice est « ce qui profite au plus grand nombre de personnes ». Rawls développe ce qu'il prétend être « des principes de la justice par la mise en place délibérée d'une fiction méthodologique qu'il appelle la « position originelle » (“John Rawls : Theory of Justice Summary, UK Essays”).
Dans cette position, on imagine une personne (théorique) à qui on demande de dessiner la société juste ; Rawls postule que cette personne va certainement peindre une société d’un rang social inférieur que le sien de peur d’un jour tomber à ce niveau bas de l’échelle sociale. Le fondement du contrat social selon Rawls serait de « garantir une société juste sans sacrifier le bonheur ou la liberté de l’individu. »
Le souci de Rawls est de concilier le principe de "liberté" sur lequel se sont fondées les sociétés capitalistes occidentales (selon le principe libertaire) et la notion de "justice" sur laquelle se sont basés les philosophies de justice sociale entre le XIXème et le XXème siècles. La corrélation de ces deux notions de la pensée politique et la pratique politique du XXème siècle a laissé perplexes les penseurs par rapport aux exigences de la justice dans l'ère de la souveraineté de la liberté. Rawls a suggéré une solution dans le cadre d'un contrat social possible, du moins théoriquement et philosophiquement.
Par Lahcen HADDAD Ancien ministre du Tourisme
•Farah Lahdiy a aimablement aidé dans la traduction de ce texte de l’arabe.
Dans son livre Leviathan or The Matter, Forme and Power of a Common-Wealth Ecclesiasticall and Civil, paru en 1651, Thomas Hobbes décrit la nature primitive de l’Homme comme étant cruelle et chaotique dans un état de guerre permanent ; ainsi les individus se sont résignés à choisir un dirigeant despotique qui les priverait de leur liberté mais qui les protégerait du chaos et de la guerre.
Pour sa part, John Locke, dans Two Treatises of Government (1690), soutient que la nature des choses présuppose des droits naturels qu’il faut préserver contre l’insécurité. C’est pourquoi l’obéissance à un pouvoir civil est une forme de « protection des individus et de la propriété privée », et si le gouvernant enfreint la loi, il serait légitime de le renverser (Encyclopedia Brittanica).
Hobbes fonde donc sa théorie sur la nécessité de surmonter le chaos primitif troquant ainsi la liberté pour la sécurité et la stabilité, alors que Locke estime que les droits de l'Homme sont des droits naturels et inhérents qui doivent être préservés en choisissant un dirigeant qui assurerait la sécurité et la justice en échange de l'obéissance de la population.
Pour sa part, Rousseau déclare dans Du contrat social : ou principes du droit politique, publié en 1762, que l’Homme à l’état de nature était « bon », et n’a ainsi pas pu développer de compétences mentales, ni de sens de responsabilité ou de conscience morale (Encyclopedia Brittannica). Toutefois, lorsque l’Homme a décidé d'abandonner sa liberté et d'établir un État et une loi afin d'assurer sa sécurité et sa protection, il acquiert dès lors un sens de la moralité et de la citoyenneté.
Ce qui est important pour Rousseau, c’est l’aspect vertueux, c’est-à-dire que l’Etat repose sur la moralité : le gouverné devrait se conformer à la décision du gouvernant, ce dernier garantissant la sécurité et le bien-être de tous. Le contrat est donc tout d’abord d’ordre moral puis d’ordre « citoyen » en second lieu, mais ce qui est important est de pouvoir passer de ce qui est naturel et instinctif à ce qui est moral.
Marx et Engels ont trouvé dans la théorie du « contrat social », surtout chez Locke et Rousseau, une source de la pensée utopique prônant une démocratie directe non basée sur l’intérêt personnel ; par ailleurs, ils l’ont considéré une tentative désespérée de la classe bourgeoise afin de concilier les intérêts des personnes influentes et ceux du peuple, comme l’a noté James Sterba dans "A Marxist Dilemma for Social Contract Theory." (American Philosophical Quarterly 19.1 (1982): 51-59.)
Du point de vue marxiste, on ne peut parler de contrat que si le prolétariat assume son rôle historique, s'empare des moyens de production et élimine le mode de production capitaliste. Comme si Marx et Engels utilisaient Rousseau et Locke uniquement pour montrer qu’il fallait revenir au stade primitif, c’est-à-dire au stade précédent la venue du contrat social—un stade primitif en tant que pratique d'un modèle naturel de production (voir Friedrich Engels, “Der Ursprung der Familie, des Privateigenthums und des Staats” 1884.)
La différence est ostensible entre Rousseau et Marx: le premier voit dans le passage au contrat social un sens croissant de conscience morale; tandis que le second y voit un retour vers un mode primitif utopique, le summum de la moralité.
John Rawls était le philosophe le plus influent du XXème siècle à avoir utilisé le concept de «contrat social» afin de jeter les bases théoriques d'une «société juste». Dans son livre Theory of Justice, publié en 1971, Rawls critique l'utilitarisme qui considère que la justice est « ce qui profite au plus grand nombre de personnes ». Rawls développe ce qu'il prétend être « des principes de la justice par la mise en place délibérée d'une fiction méthodologique qu'il appelle la « position originelle » (“John Rawls : Theory of Justice Summary, UK Essays”).
Dans cette position, on imagine une personne (théorique) à qui on demande de dessiner la société juste ; Rawls postule que cette personne va certainement peindre une société d’un rang social inférieur que le sien de peur d’un jour tomber à ce niveau bas de l’échelle sociale. Le fondement du contrat social selon Rawls serait de « garantir une société juste sans sacrifier le bonheur ou la liberté de l’individu. »
Le souci de Rawls est de concilier le principe de "liberté" sur lequel se sont fondées les sociétés capitalistes occidentales (selon le principe libertaire) et la notion de "justice" sur laquelle se sont basés les philosophies de justice sociale entre le XIXème et le XXème siècles. La corrélation de ces deux notions de la pensée politique et la pratique politique du XXème siècle a laissé perplexes les penseurs par rapport aux exigences de la justice dans l'ère de la souveraineté de la liberté. Rawls a suggéré une solution dans le cadre d'un contrat social possible, du moins théoriquement et philosophiquement.
Par Lahcen HADDAD Ancien ministre du Tourisme
•Farah Lahdiy a aimablement aidé dans la traduction de ce texte de l’arabe.