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Tribune : Un virus ça passe, les dérèglements ça casse...

Tribune


Rédigé par Jamal HAJJAM le Vendredi 13 Mars 2020

Pourquoi l’Homme adopte-t-il l’attitude de l’autruche et lègue-t-il la gestion des désastres annoncés dont il est le producteur aux générations futures ?



La mobilisation mondiale contre la pandémie du Coronavirus (Co-vid-19) laisse admiratif. Toutes les nations, tous les Etats font preuve de grande combativité et consacrent d’énormes efforts pour contrer ce mal qui menace les êtres humains dans ce qu’ils ont de plus cher, leur vie. Le souci affiché et la mise en oeuvre active des dispositifs de lutte confirment la propension naturelle de l’être humain à la survie, mais laissent en même temps dubitatif.

Pourquoi l’Homme, doté de raison et de conscience, se donne-t-il, à très juste titre, tant de peine pour préserver et sauver les vies lorsqu’il s’agit d’une menace directe et immédiate, et rechigne à faire preuve d’autant d’engagement et de zèle devant les menaces qui sont soit latentes, soit dont l’échéance, autrement plus meurtrière et dévastatrice, n’est que partie remise ? Pourquoi l’Homme, dans la plénitude de sa cupidité, ne va-t-il pas combattre en amont les menaces annoncées et laisse-t-il les situations dont il est lui-même l’auteur et le producteur s’aggraver dangereusement ? Pourquoi adopte-t-il l’attitude de l’autruche devant le chasseur et lègue-t-il la gestion de ses propres conneries aux générations futures, plutôt que de faire valoir la solidarité générationnelle au même titre qu’il met en avant la considération humaine et humanitaire en périodes de stress subi ?

Il aurait été salutaire de voir la même prise de conscience et le même zèle que nous vivons aujourd’hui prévaloir devant les dangereuses retombées présentes et à venir du réchauffement climatique favorisé et engendré par les émissions débridées des gaz à effet de serre. Voilà un fléau qui ne menace pas uniquement la vie de quelques milliers d’êtres humains, mais l’ensemble des populations mondiales et toutes créatures vivant sur terre, voire la civilisation humaine tout entière. Par ses températures extrêmes, ses inondations, ses sécheresses, ses famines, ses maladies… ce fléau s’aggrave au fil des années et nargue les conventions frileuses, les déclarations creuses, les congrès et forums trompeurs, les engagements jamais respectés et les pro-messes de retenue rarement tenues.

Pour cette année 2020, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) annonce encore pour les mois à venir, avec ou sans El Niño connu pour contribuer au réchauffement du climat, des températures supérieures à la moyenne dans de nombreuses régions du monde. Déjà, l’année 2019 a bouclé une décennie de chaleur qualifiée par l’OMM d’exceptionnelle en raison des grandes quantités de gaz à effet de serre produits par les activités humaines et libérées dans les airs.Les principales manifestations de ce réchauffement dont nous subissons, impuissants, les retombées et qui pro-met un futur désastreux, sont l’accélération de l’élévation du niveau moyen de la mer, un taux d’acidité de l’océan de plus en plus élevé, le recul de la banquise arctique, la fonte de la calotte glaciaire du Groenland, entre autres phénomènes récurrents comme les incendies de forêts dont la fréquence et la violence renseignent sur le drame du dérèglement qui s’abat sur la planète.

Le souvenir de la catastrophe de l’Australie, théâtre il y a juste quelques mois du plus grand et des plus dévastateurs incendies de forêt de son Histoire, est encore vivace. Ses écosystèmes se sont effondrés enregistrant plus de 500 millions d’animaux tués et près de 6 millions d’hectares partis en fumée, avec plus de 250 millions de tonnes de CO2 lâchés dans l’atmosphère !

Les vagues de chaleur et les inondations, jadis rarissimes, se produisent à présent à grande fréquence et la pluviométrie plus irrégulière qui en découle, combinée à la croissance démographique, pose des défis considérables en matière de sécurité alimentaire pour les pays vulnérables, avec ses lots de famines et de maladies meurtrières. Depuis 2018, en effet, la faim est de nouveau en hausse dans le monde.

Et que font les maîtres du monde pendant ce temps ? Ils parlementent, causent, promettent, supposent, mettent en doute, alors que les scientifiques et experts du climat sont catégoriques et attestent que les catastrophes liées au réchauffement climatique qui se multiplient sous nos yeux et aux dépens de la stabilité et de la sédentarité de nombreuses populations, sont du fait du comportement de l’Homme et de sa voracité.

Si donc le réchauffement climatique s’avère, preuves scientifiques à l’appui, catastrophique pour l’avenir de l’humanité, plus catastrophique encore est la myopie entretenue par les puissants et les bureaucrates qui continuent à nier que le dérèglement du climat est causé par une industrialisation à outrance et incontrôlée. Les détenteurs du pouvoir dans les pays industrialisés préfèrent regarder ailleurs et nier la responsabilité directe de leurs activités aggravée par le refus outrancier des plus puissants d’adhérer et de respecter les conventions et accords internationaux limitatifs un tant soit peu, des dégâts.

Si un virus peut s’avérer meurtrier et parvient à ébranler la sécurité sanitaire des hommes et semer la pagaille dans l’économie mondiale, son effet est dans tous les cas passager. Certes, il laissera des victimes et des séquelles derrière lui, mais la vie normale reprendra vite ses droits et la pente sera rapidement remontée dès que ses effets se seront estompés. A l’opposé, un climat déréglé, ce sont des déséquilibres à la chaîne et une catastrophe durable. Plus destructrice et plus meurtrière donc est la cupidité à l’échelle des États et la cécité des pouvoirs politiques qui n’ont aucune excuse pour traîner des pieds quand la science montre qu’il est urgent d’agir.

Jamal HAJJAM



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