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Traitements anti-cancer : La pénurie fait polémique, la tutelle en quête d’alternative


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mercredi 15 Septembre 2021

Disparu des officines et très rare dans les hôpitaux, l’Actemra, médicament de traitement du cancer et du Covid-19, fait l’objet d’une rupture de stock chez l’unique fournisseur du Royaume. Face à cette pénurie, le Comité scientifique cherche l’alternative. Allé au contact des acteurs concernés, « L’Opinion » a investigué les causes d’une polémique qui suscite plusieurs interrogations. Enquête.



Traitements anti-cancer : La pénurie fait polémique, la tutelle en quête d’alternative
La crise sanitaire ne cesse de causer des soucis d’approvisionnement. Ainsi, les médicaments utilisés dans le traitement des patients du Covid-19 ont fait l’objet de plusieurs ruptures de stock chez les pharmacies. Après la vitamine C, le zinc, c’est au tour de l’Actemra, médicament pour le traitement du cancer et récemment avéré valable aussi pour le traitement du Covid-19. L’Association marocaine des droits humains (AMDH) n’a pas tardé à monter au créneau en lançant une alerte contre une pénurie aux conséquences graves, tout en interrogeant le ministère de la Santé sur ce sujet.

Incompréhension des pharmaciens

En effet, ce médicament récemment indiqué pour les patients atteints du Covid-19 a disparu subitement des officines. Contacté par « L’Opinion », Mohamed Lahbabi, Président de la confédération des syndicats des pharmaciens d’officine, fait état d’une pénurie incompréhensible. «Lorsqu’on fait appel au réseau de distribution au Maroc, on est surpris d’apprendre qu’il n’y a pas assez de stocks », a-t-il indiqué, précisant que les stocks disponibles chez le Laboratoire fabricant au Maroc ont été mis à disposition des hôpitaux publics.

M. Lahbabi se demande pourquoi le ministère de la Santé a dirigé les stocks restants du médicament en question vers le secteur public aux dépens des pharmacies. « Lorsque le ministère procède à une telle mesure, il doit au moins aviser le président du Conseil national de l’Ordre des Pharmaciens, ce qui n’est pas le cas vu qu’aucune lettre n’a été envoyée », souligne notre interlocuteur.

Les hôpitaux en manquent aussi

Si l’Actemra est introuvable dans les pharmacies, il n’est pas si sûr qu’il soit disponible en quantités suffisantes dans les hôpitaux. Nous avons contacté plusieurs directions régionales de la Santé pour nous enquérir du sujet : apparemment, la quasi-totalité ne sont même pas au courant s’il existe ou non une pénurie au niveau des établissements hospitaliers.

Dans ce cas, nous étions donc dans l’obligation de demander des éclaircissements au ministère de la Santé, dont finalement deux responsables ayant requis l’anonymat ont accepté de répondre à nos questions.

Selon ces derniers, Il n’y a eu aucune réquisition des stocks d’Actemra auprès du Laboratoire « Roche » vu que même les hôpitaux manquent eux aussi de stocks suffisants. « Nous n’avons passé aucune demande, nous avons simplement reçu un don auprès du Laboratoire pour constituer un stock d’urgence », explique l’un de nos interlocuteurs, niant toute réquisition.

Une demande excessive derrière l’épuisement des stocks

Pourquoi sommes-nous arrivés là ? Cette rupture du médicament Actemra est due à une forte demande « subite » et « inopinée » sur ce médicament, nous explique notre source ministérielle. En fait, en plus de son usage dans les services d’oncologie, la demande sur ce remède a connu une hausse exponentielle du fait de la prescription excessive de ce remède pour les patients atteints du Covid-19.

« L’Actemra est censé être prescrit essentiellement pour les malades en état critique, admis dans les services de réanimation. Toutefois, beaucoup de médecins généralistes n’hésitent pas à le prescrire pour tout le monde, même les cas légers », affirment nos sources.

Une rupture mondiale à l’origine de la pénurie

En effet, le Maroc dépend d’un seul fournisseur pour s’approvisionner du médicament en question, le Laboratoire Suisse « Roche », qui dispose d’une filiale à Casablanca. Nous avons contacté la Directrice générale du Groupe au Maroc, Sanaa Sayegh, qui nous a confirmé qu’il existe effectivement une rupture de stock au niveau du Maroc. « En réalité, il y a eu une rupture au niveau international qui s’est répercutée naturellement sur notre pays », a-t-elle expliqué.

Bien qu’on n’ait pas pu avoir un chiffre clair sur les quantités disponibles, les stocks disponibles actuellement du médicament sont très dérisoires, d’après nos sources. Notre interlocutrice n’a pas souhaité en dire plus, nous demandant de prendre un rendez-vous pour une date ultérieure afin d’avoir d’autres informations supplémentaires.

Le Comité scientifique opte pour un médicament alternatif

Face au risque de pénurie, les autorités sanitaires se sont trouvées dans l'obligation de sécuriser le stock des hôpitaux aussi bien pour les services d’oncologie que pour les services de réanimation. Nos sources du ministère de la Santé nous ont confié que le Comité scientifique s’est réuni, en urgence, pour trouver une solution à cette pénurie qui commence à faire couler beaucoup d’encre.

Selon notre source, le Comité a décidé de chercher une alternative ou un médicament équivalent à l’Actemra pour pallier la rupture des stocks qui risque de durer longtemps. Par ailleurs, ce problème de pénurie rappelle l’épisode de la vitamine C et du Zinc, ces derniers se sont également faits rares dans les pharmacies à défaut de stocks suffisants pour répondre à la demande grandissante, sachant qu’il y avait seulement deux laboratoires producteurs au Maroc.

Comme ce problème se répète à chaque fois dès qu’il y a rareté à l’international et que le Royaume dépend d’une unique source d’approvisionnement, il convient d’anticiper les potentielles ruptures de stocks, en diversifiant notamment l’approvisionnement du Royaume et en allant à la recherche d’autres fournisseurs. 

Anass MACHLOUKH

 

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