L'Opinion Maroc - Actuali
Consulter
GRATUITEMENT
notre journal
facebook
twitter
youtube
linkedin
instagram
search



Actu Maroc

Quotient électoral : La Cour constitutionnelle s’apprête à mettre un terme à la polémique


Rédigé par Anass MACHLOUKH Jeudi 1 Avril 2021

Après avoir saisi la Cour constitutionnelle, le PJD tente une dernière fois de faire tomber le nouveau quotient, après un vote majoritaire au parlement. Le partis de l’opposition n’ont pas manqué de riposter, au moment où la majorité n’existe plus. Eclairage.



Moins de 30 jours nous séparent de l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui se prononcera sur la réforme du code électoral et mettra fin à la bataille juridique sur le quotient controversé. Des sources proches du dossier nous ont expliqué que les douze juges sont en cours d’examen des textes qui leur sont soumis, ajoutant que les délibérations aboutiront à un arrêt voté à la majorité des deux tiers.  

Le PJD semble résolument déterminé à saborder à tout prix cette réforme. Se sentant visé par ce changement du mode de répartition des sièges, le parti de Saâd Dine El Othmani a fait recours à la Cour pour remettre en cause la constitutionnalité du nouveau quotient, qui se basera désormais sur les personnes inscrites sur les listes électorales au lieu des bulletins valides. Une nouvelle tentative des pjdistes, après avoir tâché vainement de faire barrage à la loi relative à la Chambre des Représentants aux deux Chambres du Parlement, vu le consensus de l’ensemble des partis politiques, qui, tous, s’accordent sur la nécessité d’un quotient électoral qui garantit plus de pluralisme. 

Le PJD a vu dans le passage des nouvelles lois électorales à la Cour constitutionnelle pour examen de constitutionnalité (comme le veut la loi suprême du Royaume) un moment opportun pour envoyer une plaidoirie contre le nouveau quotient. Dans sa note, le parti fustige le caractère antidémocratique de la réforme, qui « bafoue la concurrence loyale entre les partis et les principes du scrutin proportionnel ». Le parti s’appuie également sur l’argument de la participation citoyenne, avançant que les voix des abstentionnistes seront prises en compte dans le calcul du quotient. 

La contre-plaidoirie de l’opposition 

La bataille juridique du quotient a pris l’allure d’une lutte de plaidoiries. Les principaux partis de l’opposition (Istiqlal, PPS et PAM) ont transmis, à leur tour, leurs observations aux sages de la Cour constitutionnelle. Dans leur mémorandum commun, les trois partis défendent une vision commune de la philosophie du nouveau quotient, partagée même par les partis de la majorité, sauf le PJD. 

Selon le document, le quotient, comme tout déterminant du mode de scrutin, relève de la compétence du législateur, donc la réforme ne contrevient guère à la Constitution. L’article 62 stipule clairement que « le nombre des représentants, le régime électoral, les principes du découpage électoral, les conditions d'éligibilité, le régime des incompatibilités, les règles de limitation du cumul de mandats et l'organisation du contentieux électoral, sont fixés par une loi organique ». Autrement dit, c’est aux représentations de la Nation de décider du déroulement des élections, puisque la loi est l’expression suprême de la volonté de la Nation, estime l’opposition. 

Concernant l’essence du nouveau quotient, l’Istiqlal, le PAM et le PPS défendent une réforme qui redresse l’équilibre de la scène politique, en garantissant plus de pluralisme et une meilleure justice électorale. En effet, les petits partis à moindre maillage électoral pourront se faire représenter au Parlement après l’annulation du seuil électoral. 

Les partis de l’opposition veulent également prendre en compte l’abstention. Selon le Secrétaire Général du Parti de l’Istiqlal, Nizar Baraka, il est nécessaire de considérer l’abstention comme expression d’une opinion politique et comme un vote protestataire. Aussi, faut-il mettre fin à l’incompatibilité entre les voix récoltées et les sièges obtenus, qui débouchent souvent sur des alliances gouvernementales qui n’ont d’alliance que le nom. 

Cherche majorité désespérément

Tout au long des concertations inter-partisanes sur la réforme des lois électorales, menées sous les auspices du ministère de l’Intérieur, il s’est avéré que le gouvernement actuel n’a qu’un simulacre de majorité. Seul contre tous, le PJD a échoué à convaincre ses « alliés », à savoir l’USFP, le Mouvement Populaire, l’Union Constitutionnelle et le RNI, qui, tous, ont voté contre son gré, aussi bien à la Chambre des Représentants qu’à celle des Conseillers, en adoptant le quotient électoral sur la base des inscrits. 

Des sources proches du dossier nous ont expliqué que Saâd Dine EL Othmani, en tant que SG du parti de la lampe, a eu le temps nécessaire lors des concertations (d’octobre 2020 à Février 2021) pour convaincre des chefs des partis de la majorité du maintien du quotient tel qu’il fut, mais il n’y est pas parvenu, à cause de l’attachement de ces derniers au passage vers les personnes inscrites sur les listes. 

Tous les observateurs se sont aperçus de la division profonde entre les composantes de la coalition gouvernementale lors de la séance du dépôt d’amendement à la Commission de l’Intérieur. Même les partis de la majorité ont présenté des amendements modifiant l’article 84 de la loi relative à la Chambre des Représentants qui régit le quotient, proposant de le calculer sur la base des inscrits, avant de les retirer pour voter favorablement à celui présenté par l’opposition. 

Compte tenu de la discorde de la majorité qui s’est manifestée lors des séances du vote, plusieurs députés ont appelé à la démission du gouvernement vu qu’il a visiblement perdu sa majorité législative, d’autres députés du PJD se sont résignés à penser que la majorité n’existe plus. En définitive, si le parti qui a dirigé les deux derniers gouvernements continue de crier au complot, c’est parce qu’il craint de voir ses chances s’amoindrir lors des prochaines échéances législatives. La Cour constitutionnelle aura le denier mot.  


 

 

Trois questions à Mustapha Sehimi: « L’ancien quotient électoral surreprésentait certains partis et en sous-représentait d’autres »

Quotient électoral : La Cour constitutionnelle s’apprête à mettre un terme à la polémique

Mustapha Sehimi, politologue, a répondu à nos questions sur la réforme du quotient électoral et ses effets sur la restructuration de la scène politique au Maroc. 
 

L'Opinion: Le PJD a contesté avec véhémence le nouveau quotient électoral, contre l’avis de l’ensemble de la classe politique, quels sont les inconvénients de l’ancien système,-  selon vous ? 

 

Il est évident qu’il fallait réviser le système électoral, tel qu'il a été appliqué précédemment, puisqu’il débouchait sur une surreprésentation pour certains partis et une sous-représentation pour d'autres. Si on se réfère aux résultats de l’élection de 2016, il s’avère que quatre grands partis ont été avantagés, gagnant des sièges avec un total de voix inférieur au quotient électoral calculé au niveau national  (5.779.004 suffrages exprimés divisés sur les 395 sièges). Il s’agit du PAM, du PJD et de l’UC. Toutefois, plusieurs partis, tels que le FDG et l’USFP, ont été sous-représentés, bien qu’ils aient obtenu un nombre important de voix.  
 

L'Opinion: Le nouveau quotient basé sur les personnes inscrites sur les listes électorales peut-il garantir plus de pluralisme ? 
 

D’abord, je vous rappelle que près de 10 millions d'électeurs se sont abstenus en 2016, le nouveau quotient électoral aura pour effet de modifier la structure du système partisan, de sorte qu’il n'y aura plus plusieurs partis en tête de classement, comme ce fut le cas en 2016 pour le PJD et le PAM. En vertu de la réforme du quotient, Il serait plus difficile aux grands partis de remporter plus d'un siège par circonscription. Quant à eux, les petits partis auront la possibilité d'être représentés au Parlement. 

L'Opinion: La réforme du quotient peut-elle déboucher sur des majorités plus homogènes que celles qu’on a connues ? 
 

En effet, des accords seront toujours nécessaires pour former la majorité absolue de 198 sièges, mais, de toute façon, le parti qui arrivera en tête des élections ne gagnera pas autant de sièges que le PJD en 2016, qui avait obtenu 125 sièges. Le vrai enjeu des prochaines élections est la constitution d’une majorité conforme au choix des électeurs et ceci dépendra des partis politiques.