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Projet de loi 22-20 : les bonnes questions à poser et les vraies conclusions à tirer


Rédigé par Hassan Zaki le Lundi 4 Mai 2020

Advenant tout événement politique, le citoyen et le journaliste responsables, est celui qui distingue entre l’événement nécessaire et l’événement conjoncturel. Autrement dit, ce qui doit être est nécessaire et structurel et ce qui peut être est conjoncturel ou contingent.



Dr Hassan Zaki, chercheur en communication politique, Université Hassan II
Dr Hassan Zaki, chercheur en communication politique, Université Hassan II
Dans le cas du projet de loi 22.20, ce qu’il faut voir ce n’est pas la manifestation ou l’ensemble des réactions d’indignation contre le projet de l’Exécutif. Ce qui est important, voire fondamental et structurel, c’est le projet en soi, quant aux réactions, elles auraient pu ne pas avoir lieu si les choses s’étaient passées de manières plus adroites ou plus subtiles. On se rappellera d’ailleurs du nombre de lois adoptées par le gouvernement Benkirane et par le Parlement sans qu’on s’en aperçoive et parfois malgré les contestations.
 
Donc c’est mal dit, de la part de citoyens responsables ou de prétendus journalistes honnêtes, que de dire que la fuite d’un projet ou encore qu’un projet de loi ait provoqué de vives réactions ou de la polémique. Ce qu’il faut dire plutôt, c’est que la configuration du gouvernement qui « nous représente » dans son ordre normal et dans son mode de travail, a élaboré et adopté, un projet de loi qui ne sert ni l’intérêt des citoyens, ni le progrès social. Suite à ce fait majeur, des protestations ont dû se produire dans l’espace public.
 
Aujourd’hui nous serions dans une autre logique où tout le monde dira que l’opinion publique est régulièrement trompée par le pouvoir de l’exécutif en place : politique, religieux, culturel et économique. Adroitement en dictature et maladroitement en démocratie.
 
Autrement dit, notre gouvernement, qui prétend structurer une société avec une bonne connaissance de la réalité sociale, devra dorénavant dévoiler ses mécanismes et ses pratiques par lesquels il constitue les rapports sociaux et par lesquels il atténue l’opposition et les contradictions afin de produire sa légitimée socio-idéologique.
 
Malheureusement, de la logique et de l’ordre qui prévalent aujourd’hui, avec ce fameux projet 22-20, nous pouvons déduire, de manière claire et certaine que nous avons à faire à un appareil de l’État (gouvernement) qui désocialise les rapports sociaux au lieu de les socialiser. Il prétend la volonté des citoyens, quand il prône l’inanité. Notre gouvernement rend abstraits et indifférents la loi, les institutions et le pouvoir.
 
Plus intéressant encore. Ce dont nous devrions polémiquer et discuter sérieusement aujourd’hui comme ce qu’on devrait rapporter comme journalistes dotés de rigueurs, est le fait que notre gouvernement soit au fond la niche de puissants monopoles industriels et éventuellement financiers. Notre gouvernement qui est supposé être une instance représentative du peuple, œuvre plutôt à synchroniser les contradictions d’une société fondée sur l’inégalité, l’exploitation et l’oppression. En fait, notre gouvernement prétend ce qu’il n’est pas (le gouvernement de tous les citoyens). Nous comprenons alors pourquoi tout le mensonge que nous subissons au quotidien de nos politiques.
 
Par ailleurs, dans son rapport avec l’économie (loi anti boycott), du fait que le gouvernement ait adopté la loi 22-20 par l’unanimité de ses membres, l’on pourra nous poser d’autres bonnes questions de citoyens responsables ou de journalistes responsables :
 
- Est-ce que le présent gouvernement, représente, détient et contrôle l’économie nationale ou bien, il s’agit d’un gouvernement qui se tient en arbitre neutre et non concernée dans la lutte des capitaux multiples en son sein ?
 
- Est-ce que le gouvernement serait en train d’admettre qu’il ne structure pas les rapports sociaux de production, de travail et d’économie et admet qu’il subit la structure et les mécanismes d’accumulation de capitaux plutôt que les mécanismes œuvrant dans des objectifs de progrès social qu’il prétend réaliser ?
 
- S’agit-il donc d’un gouvernement qui fonctionne avec deux modalités de la réalité sociale ?
 
- Est-ce que c’est pour ça que les mécanismes de formation de l’opinion publique (mass médias) détenue par les sphères économiques travaillent dans le sens de stabiliser et doter de cohésion les relations entre les couches sociales de la société ?
 
- Est-ce que c’est un postulat admis et accepté par ce gouvernement de rester autonome de la société et c’est pour cela que d’après sa méthode de travail, il est d'apparaît distinct et autonome de la sphère sociale ?
 
- Est-ce que c’est un postulat admis et accepté par ce gouvernement de ne pas maîtriser les relations de travail-production détenues par les puissants ?
 
Les mensonges du gouvernement via ses commis (de la majorité et de l’opposition) qui se projettent dans l’avenir à leur habitude (votre futur contre la loi au parlement) ou dans le passé (militantisme UNFP) afin d’éviter de parler du présent et du scandale de mensonge du gouvernement qui va à l’encontre de sa raison d’être, démontrent clairement que nous sommes aujourd’hui dans un État capitaliste ultralibéraliste avec une économie fétichée à laquelle correspond un gouvernement fétiche dont la principale fonction est d’assurer des moments de cohésion des couches sociales tout en produisant de l’abstrait et l’inanité et de la distance entre elles.
 
 
On se demandera aussi, comme devraient se demander nos chercheurs et académiciens, les raisons sociologiques qui ont fait que les partis de gauche au sein du gouvernement ainsi que le parti islamique qui prétendent représenter des millions de Marocains dans des situations de précarité soient à ce point complaisants dans ces « deals » politico-économiques.
 
Ou bien sommes-nous aujourd’hui en présence d’un gouvernement avec des partis politiques opposés dans leurs projets, mais identiques dans leurs postulats.
 
Résoudre ce système d’inéquations avec la contrainte d’une fonction objective de redistribution équitable des richesses produites et accumulées depuis plus de 20 années (taux de croissance annuels) de manière polarisée, équivaut à résoudre l’insolvable problème du modèle de développement.
 
Finalement, avons-nous besoin d’un nouveau modèle de développement ou d’abord d’un système politique qui va l’intégrer? 
 
Dr Hassan Zaki



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