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Orpaillage au Maroc : des amateurs avertis et des pros casse-cou


Rédigé par Oussama ABAOUSS le Vendredi 10 Avril 2020

Au Maroc, quelques orpailleurs s’activent dans les cours d’eau du Haut Atlas pendant que d’autres, plus nombreux, se risquent dans des zones frontalières dangereuses.



Orpaillage au Maroc : des amateurs avertis et des pros casse-cou
L’or ouvre toutes les portes, même celles de l’enfer. Le 15 avril prochain, trois orpailleurs issus de la région de Boujdour seront « jugés » par le Polisario après leur capture par une patrouille à l’Est du mur de sécurité. Selon Yabiladi, les trois Marocains sont actuellement incarcérés dans la prison connue sous le nom évocateur de « Dhaibia ».

Si la région frontalière entre le Maroc, la Mauritanie et l’Algérie est connue depuis plusieurs années pour attirer des chercheurs d’or en tous genres, d’autres contrées de notre pays sont également un terrain fertile pour les orpailleurs amateurs. « Depuis quelques années, le nombre de chercheurs d’or au Royaume du Maroc décolle discrètement », peut-on lire dans un article publié sur le site d’un magasin de matériel d’orpaillage. La plate-forme en ligne tente d’étoffer son réseau de clients marocains en faisant miroiter tout le potentiel aurifère du Royaume tout en proposant des détecteurs « bien adaptés ».

De la détection à l’orpaillage

Vous les avez peut-être remarqués dans des champs ou même parfois dans des plages. Avec leurs détecteurs, ils sondent et sillonnent le sol sans relâche. Les « passionnés de détection » sont visibles et accessibles, les orpailleurs le sont moins. Tout passionné de détection n’est cependant pas forcément un orpailleur. « J’ai découvert l’activité il y a deux ans quand j’ai fait la rencontre d’un autre amateur de détection. Je sais que la plupart du temps, je ne vais pas trouver quelque chose d’extraordinaire mais j’aime bien la sensation de pouvoir détecter des choses pour ensuite les extraire », raconte Boubker. Le jeune homme de 24 ans ne s’est jamais frotté à l’orpaillage mais nous avoue que certaines de ses connaissances l’ont fait. « Ce n’est pas quelque chose que l’on fait avec un détecteur de métaux. En tout cas pas au nord du Maroc. C’est une autre activité qui demande un autre type de matériel et surtout qui demande une certaine expertise », explique-t-il.

Une communauté discrète

Boubker qui tient à garder son anonymat nous a donné le contact d’un orpailleur amateur qui n’a cependant pas voulu donner suite à notre sollicitation. Contactés par nos soins, plusieurs guides de Nature chevronnés nous ont avoué n’avoir jamais rencontré ou entendu parler d’orpailleurs au Maroc. Il n’a fallu cependant que quelques recherches sur Internet pour trouver la chaine Youtube d’un orpailleur amateur marocain. Sur deux vidéos, le jeune homme filme son activité dans un cours d’eau du Haut Atlas dans la proximité de la mine d’Akka. À chaque fois, l’orpailleur -qui manifestement sait comment choisir ses « spots »- finit par filtrer avec son équipement les sédiments pour récolter quelques pépites bien luisantes.

Si lui non plus n’a pas répondu à nos sollicitations, les commentaires publiés dans les deux vidéos démontrent bien qu’il existe bel et bien des orpailleurs amateurs au Maroc. La teneur des échanges donne à croire que l’activité se fait essentiellement pour le plaisir.

Les orpailleurs d’Aousserd

Les orpailleurs qui s’activent dans le Sud du Maroc sont pour leur part manifestement dans une démarche plus lucrative. Plusieurs jeunes à l’image des deux orpailleurs de Boujdour sont tenté de prospecter dans les zones frontalières avec la Mauritanie voire dans certaines zones militaires dont l’accès est strictement fermé aux civils.

L’activité dans la région d’Aousserd est bien plus risquée que celle de l’orpailleur qui dans sa vidéo -les pieds dans l’eau- laisse décanter ses filtres le temps d’improviser une grillade de poissons. En mars 2018, les autorités marocaines d’Aousserd avaient péniblement délogé près de 500 orpailleurs bien équipés qui se sont installés dans la localité de Tichla et qui avaient fini par empiéter sur une zone militaire.

Si la loi 33-13 encadre les parties qui souhaitent s’investir dans l’extraction minière, rien cependant ne semble empêcher un amateur de détection de sillonner un terrain tant que l’accès à la zone en question n’est pas restreint. À 350 dirhams le gramme et avec une rumeur persistante, là où l’or reluit, la raison se tait.

Oussama ABAOUSS

3 questions au Pr El Amrani El Hassani Iz-Eddine

Pr El Amrani El Hassani Iz-Eddine
Pr El Amrani El Hassani Iz-Eddine
« Dans certains endroits, il y a des gens qui viennent chercher des pépites »

Pour comprendre ce qui motive les amateurs d’orpaillage au Maroc, nous avons posé nos questions au Pr Iz-Eddine El Amrani El Hassani, pétrologue géochimiste à l’Institut Scientifique de Rabat.

- Est-ce que les orpailleurs ont des chances de trouver des pépites d’or au Maroc ?

- La présence de pépites d’or dans un cours d’eau s’explique toujours par la proximité en amont d’un gisement aurifère. Dans l’Anti Atlas, par exemple, il y a la mine d’Akka. L’or résiste à l’altération et sa densité est haute. Avec l’érosion, des petites particules sont charriées avec les cours d’eau puis finissent par se déposer dans certaines terrasses. Théoriquement, il n’est donc pas exclu qu’il y ait des petites concentrations dans certains Oueds qui arrivent depuis l’Anti Atlas et qui se déversent vers le sud.

- Connaissez-vous des orpailleurs amateurs qui arrivent à trouver des pépites ici au Maroc ?

Je sais qu’il y a des amateurs qui s’adonnent parfois à ce genre d’activités, mais je n’en connais pas personnellement. Sur le terrain, on nous rapporte de temps en temps que dans certains endroits il y a des gens qui viennent chercher des pépites.

Parfois, il y en a même par-mieux qui s’aventurent directement dans les haldes d’anciennes mines pour chercher des petits fragments ou des pierres qui peuvent avoir un intérêt pour certains collectionneurs.

- Existe-t-il des gisements d’or dans le Sahara ?

- Dans l’axe de Dakhla-Aousserd, il y a des roches du « craton Ouest africain », qui est le noyau le plus ancien de roches qu’on trouve au Maroc et qui date de l’Archéen (3 milliards d’années).

Dans cet endroit il y a des indices de présence de terres rares. La présence de traces d’or dans ce socle n’est pas exclue.

Receuillis par O. A.







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