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Occupation illégale du littoral : Le combat herculéen de Baraka pour libérer les côtes marocaines


Rédigé par Rime TAYBOUTA Mardi 27 Mai 2025

Engagé dans une lutte résolue contre l’occupation illégale et la privatisation abusive des côtes marocaines, le ministère de l’Équipement et de l’Eau mène une vaste campagne pour reconquérir le domaine public maritime. Cette initiative vise à assainir le foncier et à garantir la justice territoriale et spatiale.



Tout au long du littoral marocain, de nombreuses petites agglomérations «les pieds dans l’eau» se sont transformées au fil des dernières années, passant de modestes villages de pêcheurs en stations balnéaires prisées. Ces lieux de villégiature, recherchés pour leur dimension authentique et leur accessibilité, attirent chaque année des milliers de touristes et de familles marocaines. De la perle du Détroit à la capitale du Sud, en passant par les villes côtières du centre du Royaume, cette privatisation sauvage, qui a longtemps fait le bonheur des estivants, a également suscité plusieurs polémiques au sein des Conseils communaux et attiré l’attention des autorités de tutelle. Ces dernières années, les opérations de libération du domaine public maritime se sont néanmoins multipliées dans plusieurs villes côtières, témoignant d’une volonté claire de l’État de mettre fin à cette situation anarchique qui perdure depuis des décennies. Si ces mesures provoquent la colère des exploitants à l’approche de la saison estivale, elles s’inscrivent dans une démarche plus large d’assainissement et de valorisation durable du foncier.
 
À l’occasion d’une journée d’étude à Rabat sur la gestion durable du domaine public maritime, le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a rappelé que la priorité est de valoriser ce patrimoine stratégique tout en assurant la justice territoriale et la préservation des équilibres environnementaux. Fidèle à ses engagements, il insiste sur la nécessité d’orienter les politiques publiques vers une exploitation durable de l’espace maritime, en développant des activités économiques rentables qui préservent les écosystèmes littoraux.
 
«La campagne de libération du domaine public maritime traduit la volonté de l’État de valoriser cet espace par des investissements durables et à forte valeur ajoutée», souligne Mohamed Bakraoui, Directeur adjoint des Affaires administratives et juridiques au ministère de l’Équipement et de l’Eau. Il précise que ces opérations ne sont pas uniquement liées à l’organisation de la Coupe du Monde, mais répondent à un impératif de régularisation et d’aménagement du littoral. Objectif affiché : garantir un accès équitable aux plages pour tous et protéger un patrimoine littoral qui appartient à la nation.
 
Tous égaux devant la loi !
 
Cette reconquête vise particulièrement les personnalités influentes qui, avec la complicité d’élus locaux, ont accaparé des plages entières pour y ériger hôtels, piscines, restaurants, bars et chalets. En allant jusqu’à louer des équipements publics tels que parkings ou commerces saisonniers, ces exploitants ont accumulé des millions de dirhams, tout en ne versant que de faibles redevances aux collectivités. Face à ces dérives, le ministre a décidé de revoir en profondeur le cadre juridique régissant l’exploitation temporaire du domaine maritime, trop souvent détournée pour servir des intérêts privés de manière quasi permanente. Un projet de loi a été présenté au Parlement, avant d’être retiré afin d’être retravaillé à la lumière des nouveaux enjeux. En parallèle, les autorités ont intensifié les contrôles, en coordination avec le ministère de l’Intérieur, pour identifier et expulser les contrevenants. Badr Abdelhafid Afif, expert juriste au ministère de l’Intérieur, relève que certains conservateurs de la propriété foncière délivrent des titres empiétant illégalement sur le domaine public maritime ou forestier, au profit de particuliers. Résultat : des constructions se retrouvent partiellement implantées sur des terrains privés, tandis qu’une autre partie empiète sur le domaine public maritime, en violation manifeste des lois en vigueur.
 
Dans ce contexte, l’assainissement s’avère être une tâche complexe. L’identification des occupants illégaux est souvent rendue difficile par l’absence de délimitations précises du domaine public maritime. Bien que des enquêtes publiques aient été menées et que des décrets aient été promulgués, les frontières exactes de ce domaine restent floues dans plusieurs communes. Cette incertitude entrave l’application de l’article 70 de la loi 12.90 relative à l’urbanisme, qui prévoit la démolition automatique des constructions illégales édifiées sur des terrains publics.
 
Approche triangulaire 
 
Pour assurer une gestion efficace et durable du domaine public maritime, une approche fondée sur des schémas territoriaux sera nécessaire. Celle-ci devra concilier trois objectifs fondamentaux : la protection de ce patrimoine, son adaptation aux nouveaux usages et le renforcement de sa résilience face aux changements climatiques. Dans le cadre d'une réforme participative, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a indiqué que son département a déjà organisé six ateliers régionaux, en attendant la tenue de trois autres dans les semaines à venir. Ces rencontres, tenues dans les régions littorales, visent à établir une feuille de route nationale pour le littoral.
Ces ateliers ont rassemblé principalement les représentants des collectivités locales et les services déconcentrés des administrations concernées. L’objectif était d’identifier, pour chaque région, les enjeux et défis spécifiques liés à la gestion du domaine maritime.

«Face à ces enjeux, nous avons une responsabilité collective de protéger, valoriser et planifier l’usage de ce domaine de manière équilibrée et durable, afin d’en assurer la pérennité pour les générations futures», a déclaré Nizar Baraka en conclusion de ces travaux.

De son côté, Sanae El Amrani, Directrice des Ports et du Domaine Public Maritime,  estime que 18% du littoral marocain présente une vulnérabilité aux risques naturels, appelant à une vigilance accrue. Pour renforcer le contrôle du domaine maritime, le ministère déploie actuellement plusieurs projets intégrant des technologies avancées de suivi et de gestion. Ces initiatives visent à fournir des outils d’aide à la décision pour une planification plus efficace.
Les travaux en cours s’articulent autour de six axes majeurs : l’établissement d’un diagnostic foncier du domaine public maritime, la réalisation d’un atlas des ressources marines et côtières, la cartographie dynamique du trait de côte, l’élaboration de cartes de vulnérabilité aux risques naturels et aux pollutions marines accidentelles, ainsi que des études techniques spécifiques pour la protection du littoral.
 
Il est temps d’accélérer la cadence
 
La nature même du domaine maritime complique davantage les choses du fait que ses limites évoluent selon l’avancée ou le recul de la mer. Cette incertitude est exploitée par certains conservateurs fonciers, qui délivrent parfois des titres empiétant sur des terrains publics, créant des situations juridiques ambiguës.

Face à cette complexité, le ministère de l’Équipement et de l’Eau appelle à accélérer la délimitation officielle du domaine public de l’État et à renforcer l’interopérabilité des données entre les institutions concernées. Il est aussi prévu d'élaborer une feuille de route à l’horizon 2035, basée sur une série d'études techniques pour protéger le trait de côte et mettre en place un schéma directeur de valorisation du domaine maritime.

Dans la droite ligne des hautes orientations Royales, Nizar Baraka insiste sur le fait que le développement d’une économie maritime durable est un impératif stratégique. Il s’agit non seulement de libérer un espace illégalement exploité, mais aussi de transformer le littoral marocain en moteur de croissance économique, de création d’emplois et de prospérité partagée.
 
 







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