« Putain, putain », chante-t-il en 1983 avec son groupe TC Matic sur l’album « Choco ». Un hymne à l’Europe, son land pour l’éternité. A ce stade, Arno marche déjà sur les cendres de deux formations, Tjens Couter et TC Band (1977-1980) -« T » renvoyant à son patronyme et « C » tiré du nom de son complice et guitariste Paul DeCoutere.
Une carrière de rocker biberonnée au blues, nourrie variablement au funk et à la new wave. Cela donne du Arno : « Je suis arnoïste. Je suis le seul, c’est mieux comme ça », dit-il en précisant qu’il n’est ni de droite ni de gauche, ce qui nous éloigne de la musique. Arno trempe dans le punk en s’en éloignant. Délicate posture à un moment où la new wave « reggaenne » éclot parallèlement à un ska festif.
Arno préfère balayer devant la porte des autres. Avec sa voix caverneuse, il est le chanteur belge le plus proche des incantations sépulcrales de Tom Waits, cynique auteur américain dont l’ambiance tombale qui enveloppe ses sets regorge de beautés maléfiques. Si la comparaison l’agace, elle amuse la critique qui l’a à la bonne.
Des reprises qui font mouche
Après « Choco », TC Matic réalise « Yé-Yé » en 1985. Il est porté par « Elle adore le noir (pour sortir le soir) ». Au lendemain d’une piteuse prestation en première partie du combo écossais Simple Minds, TC Matic explose. Arno s’installe alors en solo, avec un succès d’estime et un rayonnement confidentiel dus essentiellement à des textes attendrissants teintés de candeur : « Putain putain », « Bathroom Singer », « Elle adore le noir », « Les Yeux de ma mère », « Je veux nager », « Chic et pas cher ». Mais le prince prodigue des Belges a de l’astuce dans sa besace.
Il emprunte avec vigueur le chemin des reprises qui font mouche, usant du français, de l’anglais et du flamand : « Les Filles du bord de mer » d’Adamo, « Le Bon Dieu » de Jacques Brel, « Comme à Ostende » de Jean-Roger Caussimon et Léo Ferré, « Elisa » de Serge Gainsbourg, « Sarah » de Georges Moustaki, « Mother’s Little Helper » des Rolling Stones, « Get Up, Stand Up » de Bob Marley et Peter Tosh , « Roadhouse Blues » de The Doors…
En 1991, avec le bluesman belge Roland Van Campenhout, il forme le groupe éphémère Charles et les Lulus qui enfante un unique album. Mais c’est sur scène qu’il exalte le plus comme le soulignent ses albums en concert « À la française » sorti en 1997 et « Live in Brussels » en 2005 où trônent des interprétations des « Yeux de ma mère ».
En 2006, il tient le rôle principal de Komma, un long métrage de Martine Doyen. Il alterne avec l’enregistrement de l’album « Jus de box » qui paraît en janvier 2007. L’année qui suit, il est à l’affiche du film « J’ai toujours rêvé d’être un gangster » de Samuel Benchetrit, où il donne la réplique à Alain Bashung. Il sort également « Covers Cocktail », une compilation de ses reprises, agrémentée d’un inédit, « I Want to Break Free » de Queen. Son dernier album avec de nouvelles compositions, « Santeboutique », sort le 13 septembre 2019.
« La musique est le métier qui m’a permis de ne pas travailler »
Malgré un cancer du pancréas diagnostiqué en novembre 2019, Arno, forcé d’annuler plusieurs concerts, ne lâche pourtant pas prise entre séances studio et prestations scéniques : «Je ne sais faire que ça, c’est le métier qui, depuis cinquante ans, m’a permis de ne pas travailler.»
En 2021, il enregistre l’opus « Vivre », reprenant son propre répertoire où sa voix est couchée sur les notes de piano du vaguement marocain Sofiane Pamart. Le 11 mars 2022, il donne son ultime spectacle à Ostende, sa ville. Avec cela, un posthume est déjà en chantier : le jour de la disparition du chanteur, Mireille Mattieu termine l’enregistrement d’une nouvelle version de sa chanson « Paloma Adieu » qu’elle partage en duo avec Arno.
Parti à 72 ans, l’artiste se confie il y a quelques mois à un journal flamand : « Hier est mort et demain n’existe pas, je vis comme ça depuis longtemps. C’est ce qui fait que je suis le dernier pépé du rock. Je suis trop âgé pour prendre ma retraite. Et puis, je ne peux pas mourir maintenant parce que les fleurs sont trop chères en ce moment. Je ne mourrai que quand les prix auront baissé. » Il faut croire qu’ils ont fini par baisser, ce 23 avril.
Une carrière de rocker biberonnée au blues, nourrie variablement au funk et à la new wave. Cela donne du Arno : « Je suis arnoïste. Je suis le seul, c’est mieux comme ça », dit-il en précisant qu’il n’est ni de droite ni de gauche, ce qui nous éloigne de la musique. Arno trempe dans le punk en s’en éloignant. Délicate posture à un moment où la new wave « reggaenne » éclot parallèlement à un ska festif.
Arno préfère balayer devant la porte des autres. Avec sa voix caverneuse, il est le chanteur belge le plus proche des incantations sépulcrales de Tom Waits, cynique auteur américain dont l’ambiance tombale qui enveloppe ses sets regorge de beautés maléfiques. Si la comparaison l’agace, elle amuse la critique qui l’a à la bonne.
Des reprises qui font mouche
Après « Choco », TC Matic réalise « Yé-Yé » en 1985. Il est porté par « Elle adore le noir (pour sortir le soir) ». Au lendemain d’une piteuse prestation en première partie du combo écossais Simple Minds, TC Matic explose. Arno s’installe alors en solo, avec un succès d’estime et un rayonnement confidentiel dus essentiellement à des textes attendrissants teintés de candeur : « Putain putain », « Bathroom Singer », « Elle adore le noir », « Les Yeux de ma mère », « Je veux nager », « Chic et pas cher ». Mais le prince prodigue des Belges a de l’astuce dans sa besace.
Il emprunte avec vigueur le chemin des reprises qui font mouche, usant du français, de l’anglais et du flamand : « Les Filles du bord de mer » d’Adamo, « Le Bon Dieu » de Jacques Brel, « Comme à Ostende » de Jean-Roger Caussimon et Léo Ferré, « Elisa » de Serge Gainsbourg, « Sarah » de Georges Moustaki, « Mother’s Little Helper » des Rolling Stones, « Get Up, Stand Up » de Bob Marley et Peter Tosh , « Roadhouse Blues » de The Doors…
En 1991, avec le bluesman belge Roland Van Campenhout, il forme le groupe éphémère Charles et les Lulus qui enfante un unique album. Mais c’est sur scène qu’il exalte le plus comme le soulignent ses albums en concert « À la française » sorti en 1997 et « Live in Brussels » en 2005 où trônent des interprétations des « Yeux de ma mère ».
En 2006, il tient le rôle principal de Komma, un long métrage de Martine Doyen. Il alterne avec l’enregistrement de l’album « Jus de box » qui paraît en janvier 2007. L’année qui suit, il est à l’affiche du film « J’ai toujours rêvé d’être un gangster » de Samuel Benchetrit, où il donne la réplique à Alain Bashung. Il sort également « Covers Cocktail », une compilation de ses reprises, agrémentée d’un inédit, « I Want to Break Free » de Queen. Son dernier album avec de nouvelles compositions, « Santeboutique », sort le 13 septembre 2019.
« La musique est le métier qui m’a permis de ne pas travailler »
Malgré un cancer du pancréas diagnostiqué en novembre 2019, Arno, forcé d’annuler plusieurs concerts, ne lâche pourtant pas prise entre séances studio et prestations scéniques : «Je ne sais faire que ça, c’est le métier qui, depuis cinquante ans, m’a permis de ne pas travailler.»
En 2021, il enregistre l’opus « Vivre », reprenant son propre répertoire où sa voix est couchée sur les notes de piano du vaguement marocain Sofiane Pamart. Le 11 mars 2022, il donne son ultime spectacle à Ostende, sa ville. Avec cela, un posthume est déjà en chantier : le jour de la disparition du chanteur, Mireille Mattieu termine l’enregistrement d’une nouvelle version de sa chanson « Paloma Adieu » qu’elle partage en duo avec Arno.
Parti à 72 ans, l’artiste se confie il y a quelques mois à un journal flamand : « Hier est mort et demain n’existe pas, je vis comme ça depuis longtemps. C’est ce qui fait que je suis le dernier pépé du rock. Je suis trop âgé pour prendre ma retraite. Et puis, je ne peux pas mourir maintenant parce que les fleurs sont trop chères en ce moment. Je ne mourrai que quand les prix auront baissé. » Il faut croire qu’ils ont fini par baisser, ce 23 avril.
Anis HAJJAM