Ce 17 juin 2020, le monde a célébré la Journée mondiale de lutte contre la désertification, marquant ainsi une nouvelle étape dans l’histoire d’un défi contemporain majeur. Cette bataille contre l’appauvrissement de la Nature -et donc de l’Homme- ne reflète son sens réel que lorsque le terme « désertification » est correctement assimilé. Dans l’esprit du néophyte, « désertification » signifie souvent « avancée du désert », voire « ensablement ». Si ce raccourci n’est pas tout à fait faux, il n’en demeure pas moins réducteur. La sémantique de l’expression « lutte contre la désertification » dépasse le seul aspect de lutte contre l’avancée d’un éventuel désert qui grignote des espaces boisés ou fertiles. Pour caractériser ce phénomène, il existe d’ailleurs un autre terme : désertisation. Or les spécialistes qui ont dès 1994 travaillé sur l’élaboration de la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (CNULCD) n’ont pas manqué de préciser que les efforts des pays signataires devraient cibler « la dégradation des terres dans les zones arides, semi-arides et subhumides sèches par suite de divers facteurs, parmi lesquels les variations climatiques et les activités humaines ». La désertification apparait dès lors sous son grand jour, celui de la dégradation de la ressource ultime : le sol.
Rationnaliser la production et la consommation
Cette année, la Journée mondiale de lutte contre la désertification s’est faite sous le slogan « Aliments, Fourrage et Fibres : Production et Consommation Durable ». Cette commémoration qui coïncide avec un contexte de crise sanitaire marquée par des défis de la relance économique se focalise justement « sur le changement d’attitude du public envers le principal moteur de la désertification et de la dégradation des terres à savoir : la production et la consommation incessantes de l’humanité ». « Si nous continuons à produire et à consommer comme d’habitude, nous consommerons la capacité de la planète à maintenir la vie jusqu’à ce qu’il ne reste plus que des déchets. Nous devons tous faire de meilleurs choix sur ce que nous mangeons et ce que nous portons pour aider à protéger et restaurer la terre », a annoncé pour l’occasion Ibrahim Thiaw, Secrétaire exécutif de la CNULDC.
Un chantier national transversal et multisectoriel
Pays agricole mais également territoire de biodiversité, à cheval entre un climat méditerranéen et un climat saharien, le Maroc reconnait dans la lutte contre la désertification un enjeu déterminant. Après la ratification de la CNULCD en 1996, le Royaume a élaboré un Programme d’Action Nationale de Lutte Contre la Désertification (PANLCD) en 2001. Conformément aux engagements du pays vis-à-vis de la CNULD, ce premier cadre stratégique permettait au Maroc de commencer à fédérer l’ensemble des stratégies sectorielles et transversales en matière de lutte contre la désertification. La deuxième étape de ce chantier s’est concrétisée lors de l’actualisation du PANLCD en 2013, qui a permis de mettre en place « des outils de prise de décision novateurs par la production de critères et indices et l’identification de 8 écorégions homogènes avec des atouts, des contraintes, des potentiels et des fragilités spécifiques à chacune d’elles ».
Un chantier national transversal et multisectoriel
Pays agricole mais également territoire de biodiversité, à cheval entre un climat méditerranéen et un climat saharien, le Maroc reconnait dans la lutte contre la désertification un enjeu déterminant. Après la ratification de la CNULCD en 1996, le Royaume a élaboré un Programme d’Action Nationale de Lutte Contre la Désertification (PANLCD) en 2001. Conformément aux engagements du pays vis-à-vis de la CNULD, ce premier cadre stratégique permettait au Maroc de commencer à fédérer l’ensemble des stratégies sectorielles et transversales en matière de lutte contre la désertification. La deuxième étape de ce chantier s’est concrétisée lors de l’actualisation du PANLCD en 2013, qui a permis de mettre en place « des outils de prise de décision novateurs par la production de critères et indices et l’identification de 8 écorégions homogènes avec des atouts, des contraintes, des potentiels et des fragilités spécifiques à chacune d’elles ».
Désertification et stratégie « Forêts du Maroc »
Territorialisée et transversale, la lutte contre la désertification est un objectif qui implique plusieurs secteurs et institutions et qui recoud ensemble toutes les stratégies de conservation des sols, des écosystèmes et de la biodiversité. Le chantier de lutte contre la désertification s’articule désormais sous l’égide de la nouvelle stratégie « Forêts du Maroc » qui ambitionne de « rendre les terres des territoires de développement, durables, participatifs, productifs et biodivers » (voir interview avec M. Abserrahim Houmy). Cette nouvelle feuille de route a été « construite autour de quatre axes majeurs: réinventer et structurer l’approche participative, différencier et développer les espaces selon leur vocation, investir et moderniser le cœur du métier et refonder l’institution autour d’agences ». Les divers chantiers de lutte contre la désertification (lutte contre l’ensablement, lutte contre l’érosion, conservation de la biodiversité…) s’y conjuguent avec l’ambition de « passer à la vitesse supérieure » d’ici 2030.
Oussama ABAOUSS
3 questions à Abderrahim Houmy, SG du Département des Eaux et Forêts
Abderrahim Houmy
« Nous avons besoin d’une intégration plus forte »
M. Abderrahim Houmy, Secrétaire Général au Département des Eaux et Forêts répond à nos questions sur la lutte contre la désertification (LCD) à la lumière de la nouvelle stratégie « Forêts du Maroc »
- Quelles sont les nouveautés apportées par la nouvelle stratégie « Forêts du Maroc » dans la lutte contre la désertification ?
- En plus de l’approche technique de la lutte contre la désertification qui a été utilisée jusqu’à maintenant, il y a un élément essentiel qui a été introduit de façon volontariste, c’est l’aspect social, et ce, à travers une implication mieux structurée des usagers de la forêt. L’utilisation des espaces selon leurs vocations permettra également de mieux appréhender cette problématique en tenant compte des fragilités et des atouts de chaque espace. La modernisation du métier de forestier va permettre d’améliorer les techniques utilisées pour mieux lutter contre les différentes formes de la désertification. Il y a enfin l’axe de la refonte de l’institution qui vise l’adaptation des textes juridiques, la transformation des ressources humaines et l’amélioration du cadre du travail dans le secteur.
- Depuis l’actualisation du Programme d’Action National de Lutte Contre la Désertification (PANLCD) en 2013, est ce que le partenariat avec les autres secteurs a réussi ?
Je crois que beaucoup de choses ont fonctionné de par la nature des interventions des secteurs concernés. Dans le programme du Plan Maroc Vert (PMV) par exemple, il y a beaucoup d’actions qui ont contribué de façon significative dans la LCD et notamment les projets de plantation. Mais on ne peut pas prétendre que le PMV est une émanation du PANLCD. Il s’agit plutôt d’une convergence naturelle des efforts. Quand on voit tout ce qui a été fait en matière d’économie d’eau, de gestion des barrages ou d’aménagement des bassins versants, on ne peut que déduire que nous avons atteint aujourd’hui un certain niveau d’intégration. Il y a une convergence de vues et de programmes, mais pour réussir nous avons besoin d’une intégration encore plus forte. C’est un aspect que nous devrons développer encore plus dans les prochaines années.
- Quel est votre vision des efforts de LCD à l’horizon 2030 ?
- On peut noter qu’il y a au Maroc une volonté politique très forte sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi que Dieu L’Assiste, pour mettre à niveau les grands chantiers liés au développement durable. Cette année le Maroc va présenter son premier rapport volontaire sur les ODD. Cela nous engagera davantage pour conjuguer les efforts des différents intervenants et les résultats en 2030 dépendront des réalisations, des programmes et des projets que nous mettrons en œuvre.
M. Abderrahim Houmy, Secrétaire Général au Département des Eaux et Forêts répond à nos questions sur la lutte contre la désertification (LCD) à la lumière de la nouvelle stratégie « Forêts du Maroc »
- Quelles sont les nouveautés apportées par la nouvelle stratégie « Forêts du Maroc » dans la lutte contre la désertification ?
- En plus de l’approche technique de la lutte contre la désertification qui a été utilisée jusqu’à maintenant, il y a un élément essentiel qui a été introduit de façon volontariste, c’est l’aspect social, et ce, à travers une implication mieux structurée des usagers de la forêt. L’utilisation des espaces selon leurs vocations permettra également de mieux appréhender cette problématique en tenant compte des fragilités et des atouts de chaque espace. La modernisation du métier de forestier va permettre d’améliorer les techniques utilisées pour mieux lutter contre les différentes formes de la désertification. Il y a enfin l’axe de la refonte de l’institution qui vise l’adaptation des textes juridiques, la transformation des ressources humaines et l’amélioration du cadre du travail dans le secteur.
- Depuis l’actualisation du Programme d’Action National de Lutte Contre la Désertification (PANLCD) en 2013, est ce que le partenariat avec les autres secteurs a réussi ?
Je crois que beaucoup de choses ont fonctionné de par la nature des interventions des secteurs concernés. Dans le programme du Plan Maroc Vert (PMV) par exemple, il y a beaucoup d’actions qui ont contribué de façon significative dans la LCD et notamment les projets de plantation. Mais on ne peut pas prétendre que le PMV est une émanation du PANLCD. Il s’agit plutôt d’une convergence naturelle des efforts. Quand on voit tout ce qui a été fait en matière d’économie d’eau, de gestion des barrages ou d’aménagement des bassins versants, on ne peut que déduire que nous avons atteint aujourd’hui un certain niveau d’intégration. Il y a une convergence de vues et de programmes, mais pour réussir nous avons besoin d’une intégration encore plus forte. C’est un aspect que nous devrons développer encore plus dans les prochaines années.
- Quel est votre vision des efforts de LCD à l’horizon 2030 ?
- On peut noter qu’il y a au Maroc une volonté politique très forte sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi que Dieu L’Assiste, pour mettre à niveau les grands chantiers liés au développement durable. Cette année le Maroc va présenter son premier rapport volontaire sur les ODD. Cela nous engagera davantage pour conjuguer les efforts des différents intervenants et les résultats en 2030 dépendront des réalisations, des programmes et des projets que nous mettrons en œuvre.
Recueillis par O. A.
Repères
Désertification dans le monde
Selon la Convention des Nations Unies pour la Lutte Contre la Désertification, la dégradation des terres à l’échelle internationale suit une cadence annuelle de près de 12 millions d’hectares. La Fao indique pour sa part que durant les quatre dernières décennies un tiers des terres arables destinées à la production a été altéré, et 40% des terres émergées sont menacées dont 66% sont déjà dégradées affectant ainsi 1,5 milliards de personnes ce qui représente près de 20% de la population mondiale.
Démographie et modes de consommation
A l’origine de la dégradation des terres : la croissance démographique très rapide qui a triplé depuis 1950 (passant de 2,5 à 7,6 milliards actuellement), la hausse des niveaux de consommation couplée avec la mutation des habitudes alimentaires et l’urbanisation accélérée : la part de la population mondiale vivant dans les villes augmentera d’environ 2,5 milliards de personnes d’ici 2050, sachant qu’à l’échelle mondiale, plus de 60% des terres de culture irriguées sont situées aux alentours des zones urbaines.