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Les oubliés du Royaume : entre amnésie gouvernementale et peur de l’inconnu

Etat d’urgence sanitaire


Rédigé par Hajar LEBABI Mercredi 13 Mai 2020

Le Royaume a permis le rapatriement de plusieurs étrangers vers leur pays. Ce qui attise davantage l’incompréhension et la colère qui entoure le dossier des Marocains bloqués à l’étranger, oubliés par les autorités.



Les oubliés du Royaume : entre amnésie gouvernementale et peur de l’inconnu
A ce jour, le gouvernement a facilité le retour de 84.449 étrangers qui sont restés bloqués dans le pays, sur 532 vols de rapatriement extraordinaires, ont indiqué des sources diplomatiques à l’agence de presse espagnole Efe. En même temps, le pays n’autorise pas le retour de 27.850 compatriotes répartis dans le monde.

Alors que le ministère des Affaires étrangères a offert toute la coopération nécessaire pour organiser ces vols, aucune proximité n’a été maintenue avec ses propres ressortissants qui ont été surpris par la fermeture de la frontière loin de chez eux, du Mexique à la Russie. Plusieurs Marocains sont bloqués en Ukraine, en République dominicaine, au Sénégal, en Turquie, en Espagne ou aux États-Unis. Leur nombre semble en constante augmentation. Si le 23 avril le ministre des Affaires étrangères, Naser Bourita, a annoncé devant le Parlement qu’il y avait 22.500 cas, le Chef du gouvernement, Saâdeddine El Othmani a élevé ce chiffre, la semaine dernière, à 27.850 cas.

Les ambassades marocaines à l’étranger ont aidé certains des plus vulnérables en payant un logement ou des repas, parfois en espèces. Cela n’a pas pour autant calmé les esprits des personnes concernées, qui souhaitent simplement pouvoir rentrer dans leur pays, quitte à être soumises à une période de quarantaine.

Tout pour être rapatrié

Ces Marocains ont formé des groupes WhatsApp, créé des pages Facebook et enregistré une vidéo émouvante sur YouTube intitulée «les Oubliés du Maroc». Sur cette vidéo, des étudiants, mères de familles ou encore des personnes malades, regrettent le fait que leur pays ait pris une mesure aussi drastique avec ses citoyens lorsque des rapatriements ont été effectués de partout dans le monde.

Ce groupe a tenu, ce lundi, des sit-in devant les consulats marocains. Les participants ont partagé des photos de leurs actions devant les consulats d’Istanbul, d’Algésiras, d’Alger ou de Paris. En France, ces manifestants ont été condamnés à une amende de 135 euros chacun pour non-respect des mesures de confinement, comme il a été déclaré par l’un des participants à Efe.

Plusieurs pays arabes et africains comme la Tunisie qui vient de rapatrier 157 de ses ressortissants du Maroc, ainsi que l’Égypte, l’Algérie ou le Sénégal, en plus des monarchies pétrolières du Golfe, ont mené des opérations de rapatriement de leurs citoyens. Le Maroc est donc devenu une sorte d’exception mondiale.

L’explication fournie par les autorités est liée à des mesures strictes de protection sanitaire, qui ont permis au Maroc d’avoir une faible propagation du Coronavirus, avec une courbe de croissance très lente.

A partir du 10 mars, le Maroc a commencé à fermer son espace aérien pour les vols commerciaux internationaux, avant de le clôturer presque définitivement à compter du 20 mars, date de l’entrée en vigueur de l’état d’urgence sanitaire. Cette mesure a surpris des dizaines de milliers de personnes en voyage touristique, en famille ou en voyage d’affaires.

En parallèle, le pays a discrètement autorisé un système de rapatriement des étrangers coincés sur don sol via des vols plus ou moins réguliers en partance de deux aéroports seulement (Casablanca et Marrakech). Le gouvernement n’a jamais communiqué publiquement sur ces vols, sans doute afin d’éviter les attroupements massifs de candidats au retour chez eux dans les aéroports. Mais les chancelleries étrangères basées au Maroc ne s’en sont pas privées lorsqu’il fallait se féliciter d’une opération réussie ou d’annoncer le calendrier des vols.  

Hajar LEBABI

3 questions à Wadie KERZAZI

Wadie KERZAZI
Wadie KERZAZI
«S’il faut attendre la fin du confinement, est-ce qu’il y’a vraiment un soutien des autorités ?»
 
Wadie Kerzazi, conseiller commercial dont les parents sont restés bloqués en France se bat pour donner plus de visibilité à cette communauté. Il partage avec nous leur calvaire.

-Vos parents sont bloqués à Lyon, comment vivent-ils cette situation ?
Mes parents sont bloqués depuis 2 mois en France. Moralement, ils sont fatigués et s’impatientent de rentrer. Il n’y a pas de visibilité et personne n’est là pour les accompagner. Ils ne peuvent pas même visiter un médecin s’ils tombent malades. Peut-être que cela va changer avec le déconfinement, mais, la situation reste très pesante. Il y’a également des gens dans des situations pires que celle de mes parents. Comme des personnes hébergées dans de grandes salles de sport à Melilla.

-Est-ce que les autorités du pays soutiennent ces personnes bloquées ?
Mohamed Basri, l’Ambassadeur et Directeur des Affaires Consulaires et Sociales auprès du ministère des Affaires Etrangères, a déclaré que sur les 25 800 personnes bloquées, environ 6000 ont été prises en charge. Cette prise en charge pourrait comprendre de la nourriture ou des soins médicaux. Ceci dit, ce chiffre représente un faible pourcentage comparé à tous les marocains bloqués à l’étranger. Les gens sont pourtant en véritable détresse. 

-Après le sit-in, y’a-t-il eu une réaction des autorités concernées ?
Selon les informations que nous avons récoltées de différentes personnes bloquées à l’étranger, aucune réponse n’a été donnée ni des consulats ni des ambassades dans les différents pays. Les personnes en France ont récolté des amendes. En Turquie, il n’y avait que la police qui sortait pour donner quelques informations. Malheureusement, il n’y a aucun retour de la part des autorités du pays. D’ailleurs, c’est ce que sollicitent ces personnes. Ils aimeraient savoir s’il y’a une date précise et un plan d’action prévu pour les rapatrier. S’il faut attendre la fin du confinement et l’ouverture des frontières, est-ce qu’il y’a vraiment un soutien des autorités ? A ce moment, ces personnes pourront rentrer sans que les autorités n’interviennent, mais, ils garderont toujours ce sentiment d’être délaissés.

Receuillis par H. L








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