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Le Conseil de la Concurrence élude les dossiers épineux

11ème session ordinaire


Rédigé par Saâd JAFRI Jeudi 25 Février 2021

Le Conseil de la Concurrence tient ce jeudi, par visioconférence, sa 11ème session ordinaire. Plusieurs points sont à l’ordre du jour, toutefois, bon nombre de dossiers d’actualité n’y seront pas abordés.



Driss Guerraoui, président du Conseil de la concurrence.
Driss Guerraoui, président du Conseil de la concurrence.
Ententes sur les prix des carburants, factures exorbitantes des cliniques, flambée des prix de l’huile de table… sont autant de dossiers épineux qui suscitent l’ire de l’opinion publique nationale, pourtant, ils ne figurent pas au menu de la 11ème session ordinaire de la formation plénière du Conseil de la Concurrence, prévue pour ce jeudi. Outre l’examen et l’approbation des lignes directrices du projet de Rapport Annuel au titre de l’année 2020, cette session a été dédiée à la présentation d’un exposé relatif à l’état d’avancement de la saisine concernant le dossier des jetons de peinture des bâtiments, et ce, dans un contexte où les Marocains attendent de pied ferme le verdict du «grand gendarme de la concurrence» sur des affaires qui les affectent dans leur quotidien.

Pour ne prendre que l’exemple le plus récent, la flambée des prix de l’huile de table de la marque Lesieur-Cristal est dénoncée depuis plus d’une semaine par les internautes. Qualifiant cette hausse «d’injustifiée et inadéquate» avec la présente conjoncture qui a mis la classe moyenne dans la mouise, les cybernautes appellent au boycott, rappelant le mouvement de 2018 qui a visé trois grandes entreprises et dont les séquelles se font toujours ressentir. «Cette hausse des prix impactera fortement le pouvoir d’achat des Marocains, déjà réduit en peau de chagrin par la crise sanitaire», déplore Ouadie Madih, président de la Fédération Nationale des Associations du Consommateur (FNAC), soulignant que les instances d’audit, notamment le Conseil de la Concurrence «devrait intervenir s’il y a une incidence sur le pouvoir d’achat du consommateur».

Cela dit, il convient de noter que Lesieur- Cristal a réagi à l’émoi suscité par la hausse des prix du marché des huiles de table. Dans un communiqué, elle a expliqué que «cette augmentation, qui touche tous les opérateurs, est liée à la flambée des prix des matières premières agricoles à l’international et plus particulièrement celles utilisées pour la fabrication des huiles de table. Depuis mai 2020, le cours du soja a augmenté de 80% et celui du tournesol de 90%». En effet, l’argument mis en avant par l’entreprise tient la route, il n’en demeure pas moins que le factchecking du Conseil de la Concurrence reste de mise. 

L’anarchie dans la prise en charge par les cliniques

Loin de l'agroalimentaire, l’implication du secteur privé dans la prise en charge des cas Covid-19, continue elle aussi de susciter la polémique. Après la grogne sur les factures exorbitantes, l’opinion publique n’exclut pas la possibilité d’une entente anticoncurrentielle entre certaines cliniques privées, qui, malgré l’intervention du régulateur et la mise en place d’une grille qui fixe la tarification de la prise en charge, continuent de générer des factures faramineuses de prise en charge des patients Covid. Lesdites structures ont également suscité la colère de l’opinion publique en imposant des chèques de garantie comme condition préalable de prise en charge de leurs patients. Une pratique que le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, avait qualifiée « d’illégale ». Ainsi, face à ces dépassements documentés, le président de la FNAC soulève le «devoir» du Conseil de la Concurrence à «s’autosaisir en urgence de cette affaire, vérifier la véracité des dires avancés par les patients et donner son verdict».

Un dossier carburant aux oubliettes

Concernant l’épineux dossier de la concurrence sur le marché des hydrocarbures liquides, objet d’attente d’une bonne partie de Marocains depuis près d’une demi-décennie, la décision finale du Conseil demeure en stand-by. En juillet dernier, celui-ci avait soumis deux décisions de sanctions à SM le Roi Mohammed VI. Néanmoins, la manière dont Driss Guerraoui, président du Conseil de la Concurrence, a géré le dossier a été épinglée par plusieurs de ses membres, au point que le Souverain a pris la décision de constituer une commission ad-hoc pour enquêter sur l’affaire. Pour rappel, la première décision, soumise le 23 juillet, appelait à l’application d’une amende calculée à hauteur de 9% du chiffre d’affaires de trois des compagnies de distribution d’hydrocarbures citées dans ce dossier et une amende inférieure aux autres. La deuxième, communiquée le mardi 28 juillet, ramenait ce seuil à 8% du chiffre d’affaires tout en généralisant la sanction à l’ensemble des compagnies concernées.

Depuis la présentation de ces deux décisions contradictoires, ledit Conseil ne s’est pas prononcé sur cette affaire qui tient en haleine des citoyens, qui n’hésitent pas à monter au créneau pour dénoncer ces fraudes. L’heure est donc à la réactivité.

Saâd JAFRI

3 questions à Ouadie Madih, président de la FNAC

Ouadie Madih
Ouadie Madih
« L’huile est un produit de premiére nécessité, nous condamnons cette augmentation, particulièrement en période de crise sanitaire et économique »

Le président de la Fédération Nationale des Associations des Consommateurs (FNAC) a répondu à nos interrogations à propos de la flambée des prix de certains produits alimentaires et de l’absence de nouveauté quant au dossier des hydrocarbures.

- Depuis quelques jours, les internautes dénoncent une hausse des prix de l’huile de table. Quel rôle pourrait jouer le Conseil de la Concurrence dans ce sens ?

- Comme tous le monde a pu le constater, les internautes grognent sur cette hausse des prix des huiles alimentaires et certains appels au boycott commencent même à apparaître sur les réseaux sociaux. Ce qu’il faut savoir, c’est que bien que le prix de l’huile de table soit libre à la concurrence, il demeure un produit de base qui est nécessaire pour l’ensemble des consommateurs quel que soit le niveau de leur pouvoir d’achat. L’huile est un produit de premiére nécessité, nous condamnons donc cette augmentation, particulièrement en période de crise sanitaire et économique, surtout que le mois de Ramadan approche. Une période où les dépenses en produits alimentaires explosent.

- Concernant l’affaire des cliniques privées, certains établissements poursuivent des pratiques contraires à la déontologie, et parfois illégales. Qu’en dit la loi sur ces pratiques ?

- Certaines cliniques se rendent coupables de manière continue d’actes illégaux, comme l’exigence de chèques de garantie, le noir ou encore le refus de fournir des factures. Elles profitent, ainsi, de la vulnérabilité des familles des patients à des moments critiques. De plus, elles savent d’emblée que le citoyen lambda ne peut ou ne veut pas recourir à la justice, soit par manque de temps ou par manque de moyens. Une situation qui profite à ce type d’établissements qui ne se soucient pas des conséquences légales de ce genre de pratiques. Bien que la loi dit clairement que tout acte qui tend à faire obstacle à la formation des prix par le libre jeu du marché, en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse, constitue une violation de la libre concurrence. La réalité sur le terrain est toute autre et l’impunité pour ces comportements reste de mise. 

- Le dossier des hydrocarbures traîne depuis 5 ans, quels sont les effets de cet attentisme sur le pouvoir d’achat des citoyens ?

- Concernant ce dossier, on attend toujours les conclusions du comité de suivi nommé par le Souverain. En attendant, le prix des hydrocarbures a enregistré une baisse notable lors de la période de confinement, ce qui a soulagé les consommateurs. Une tendance qui s’est inversée dernièrement avec des prix à la pompe qui avoisinent les 9 DH par litre pour le gasoil à Casablanca. Une situation qui fait craindre une nouvelle flambée des prix en l’abscence de contrôle, tant que les autorités de surveillance du marché ne font pas bouger les choses. Un immobilisme qui fait miroiter un retour à la hausse des prix enregistrée en 2018.
 
Recueillis par S. J.

Repères

Lesieur-Cristal se justifie !
En réaction à la grogne des internautes, Lesieur-Cristal a indiqué dans un communiqué qu’elle a réussi à constituer des stocks de matières premières pour éviter tout risque de pénurie. Ces stocks lui ont permis de retarder le plus possible la répercussion de la hausse des cours mondiaux auprès des consommateurs marocains. «La flambée des cours des matières premières agricoles s’accentuant durablement, Lesieur-Cristal a été contrainte d’en répercuter une partie dans ses prix, à l’instar de tous les opérateurs du marché», précise l’entreprise avant d’ajouter qu’elle continuera à faire son maximum pour amortir l’impact de la volatilité des cours des matières premières.
La réclamation des membres du Conseil de la Concurrence
Le Souverain a également reçu, le 28 juillet 2020, une fiche émanant de plusieurs membres du Conseil dans laquelle ces derniers relèvent que « la gestion de ce dossier a été caractérisée par des transgressions de procédure et des agissements de la part du président qui entachent la qualité et l’impartialité de la décision prise par le Conseil ». A cet égard, les signataires évoquent les griefs suivants : - Communication dommageable à l’examen de l’affaire et à la crédibilité du Conseil ; - Passage forcé au vote avant que le débat ne soit clos ; - Interprétation tronquée et violation de l’article 39 de la loi relative à la liberté des prix et de la concurrence ; - Opacité de la procédure d’instruction, marquée par un partage sélectif des documents ; - Non satisfaction des requêtes des membres en vue d’un examen équilibré des arguments avancés par les sociétés ; - Comportement du président qui laisse penser qu’il agit sur instructions ou selon un agenda personnel.








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