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La pandémie s’étend, le cinéma se tend

Entretien avec Mohamed Ahed Bensouda


Rédigé par Safaa KSAANI Mardi 1 Décembre 2020

Victime de la crise, le secteur du cinéma est au bord du gouffre. Les réalisateurs et les producteurs essayent de s’adapter à la nouvelle donne sanitaire.



La pandémie s’étend, le cinéma se tend
- Vous êtes actuellement en train de tourner votre nouveau film. Parlez-nous de « Akher Klam » (Dernières paroles), ce drame social qui traite d’une question très sensible dans notre société, celle liée à l’héritage. Avezvous rencontré des difficultés en tournage en cette période marquée par la pandémie ? 
- Le tournage en ces moments difficiles nécessite une conscience professionnelle avant tout. L’ensemble des techniciens et une grande majorité des équipes artistiques, dont les acteurs, sont très prudents. La reprise de la production audiovisuelle est un soulagement qui nous a poussés à être très vigilants, à travailler dans l’extrême respect des gestes barrières, et à penser quotidiennement à la vie sociale de plusieurs artistes qui souffrent financièrement depuis le début du confinement, dans l’absence, bien sûr, d’un plan social dédié à la couverture de l’artiste marocain. Par contre, je ressens une volonté réelle de les aider. Cette volonté de collaboration, qu’on avait perdue avant la pandémie, commence à réapparaître de nouveau. Estce une réaction de pitié envers l’artiste ou une sorte de soutien pour donner un coup de pouce à la création artistique ? C’est ce que j’espère en tout cas. Plusieurs administrations dans les secteurs public et privé ont manifesté leur soutien à notre projet, notamment au sein du plusieurs ministères.

- L’industrie cinématographique est mise à mal par la crise sanitaire. Quel commentaire en faites-vous ?
- La question nécessite un grand débat, des pages entières d’articles de presse et des émissions sans fins à la télévision ! Avant tout, pouvons-nous parler d’une industrie cinématographique au Maroc ? La réponse est non. Nous parlons là d’un cinéma, basé sur l’aide de l’État, intitulé : l’avance sur recettes du Centre Cinématographique Marocain. Donc, un cinéma très sensible, fragile et qui est mis à mal automatiquement par n’importe quelle crise, sanitaire ou sociale. Un cinéma qui voit le nombre de salles diminuer chaque jour, un cinéma qui n’a pas de public, un cinéma loin du divertissement reste, pour moi, un cinéma faible qui ne pourra jamais évoluer dans le sens de l’industrie. Nous devons avoir une vraie volonté politique dans le secteur cinématographique avec un vrai programme à mettre en place. Est-ce une priorité pour nos gouvernements ? Je ne le pense pas.

- Que recommandez-vous pour en finir avec cette crise qui dure ?
- Malheureusement, il y a tout à faire ! Il faut une stratégie à long terme, avec un projet moderne, fait par de vrais professionnels du domaine, et dans tous les secteurs touchant à l’industrie cinématographique. Les exemples sont nombreux, imitons au moins ce que les leaders européens ont mis en œuvre pour installer une industrie cinématographique, leurs bases commencent tout simplement par la formation et se terminent par l’exploitation et la diffusion. 

Recueillis par Safaa KSAANI

Portrait

Un cinéaste au parcours intense
Entre 1985 et 2020, Mohamed Ahed Bensouda a mené une carrière très diversifiée à travers les métiers d’image au cinéma comme à la télévision. Il a été acteur, assistant réalisateur, régisseur général, directeur de production, directeur de casting, scénariste, réalisateur et producteur. Ce cinéaste est à son aise sur différents registres comme le prouve sa filmographie (Hadana, Forces spéciales africaines, A la recherche du pouvoir perdu, Mister senseur, Derrière les portes fermées, Secrets de mille et une... femmes, Le cadeau du baptême, Le prix de l’insouciance…). Des oeuvres qui l’ont imposé comme réalisateur à succès.

Certains de ses films lui ont valu plusieurs Prix nationaux et inrternationaux. Son long métrage « A la recherche du pouvoir perdu » diffusé en 2017 a mérité, entre autres, le Grand Prix Averroes en 2018, Grand Prix Olivier d’Or en 2017, meilleur scénario à Delhi International Film Festival en Inde. Son 2eme long métrage « Derrière les portes fermées », sorti en 2012, a obtenu plusieurs Prix, dont le Prix Special Jury Golden Remi Award aux USA et le Golden Khinjar Award à Oman, en 2014. « Moussem Lemchaoucha », un autre long métrage qui attire l’attention de Jurys de plusieurs festivals. Au Festival du Cinéma de Rotterdam (CINEMAR), il a décroché le Prix de la meilleure réalisation.

Ses deux courts métrages « R’da » et « Le silence violé » ont également été primés.

En plus de la réalisation et de la production de films, Mohamed Ahed Bensouda est membre de la Chambre internationale des recherches cinématographiques et télévisuelles et de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD) à Paris. Entre 1997 et 2002, il a dirigé la première agence d’acteurs au Maroc “Atlas Casting”.

S. K.

Repères

« Akher Klam »
C’est l’histoire d’une femme qui détient un seul et unique bien immobilier, fruit de toute une vie dans la Fonction publique aux côtés de son défunt mari. Après la mort de ce dernier et en l’absence d’un héritier garçon, elle va être confrontée aux rudes épreuves des textes de loi basés sur la charia, relatifs à l’héritage, l’empêchant d’assurer une vie tout juste digne à sa fille unique. Le long métrage est produit par SOREAD 2M et la société de production NADACOM.
La femme, un sujet de prédilection
La création audiovisuelle liée au statut de la femme au Maroc reste le sujet phare du cinéaste Mohamed Ahed Bensouda. Après son film « Derrière les portes fermées», premier au box-office au Maroc en 2014, et son long métrage «À la recherche du pouvoir perdu», traitant de la soumission, le film marocain le plus primé dans les festivals en 2018, ainsi que son dernier documentaire « Hadana» sur la garde d’enfants qui sera disponible à la diffusion fin 2020, produit par le syndicat national des artistes créateurs,« je reviens avec cette nouvelle problématique concernant l’héritage, pour essayer d’ouvrir le débat autour de ce grand chantier qui a besoin d’une vraie réforme »,explique-t-il. 
Le chiffre d’affaires des tournages étrangers a chuté de 50%
Après neuf mois de crise sanitaire qui ont fait baisser le nombre de tournages étrangers, les acteurs et les techniciens de productions cinématographiques étrangères reprennent le chemin du Maroc pour tourner de nouveaux films et séries télévisées ou simplement pour poursuivre des tournages interrompus en mars dernier, selon le DG du CCM, Sarim El Hak Fassi Fihri. Si 2020 ne devrait réaliser que 400 millions de dirhams de chiffres d’affaires contre 800 millions en 2019, le DG se montre optimiste en tablant sur un retour à la normale des investissements étrangers en 2021.








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