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Journée mondiale de l’Habitat : Intégrer les nouveaux défis climatiques pour des villes vivables


Rédigé par Oussama ABAOUSS Mercredi 6 Octobre 2021

À l’occasion de la Journée mondiale de l’Habitat, l’ONU insiste sur les enjeux environnementaux que les villes devront anticiper et affronter dans les prochaines décennies.



Dans la Constitution marocaine, l’accès à un logement décent est considéré comme un droit qui garantit la dignité et participe dans la cohésion sociale des citoyens. De ce fait, durant les dernières décennies, les efforts étatiques dans le secteur de l’Habitat se sont focalisés sur la lutte contre l’habitat insalubre (les bidonvilles notamment) et la mise en oeuvre de mesures à même d’encourager la construction de logements accessibles aux catégories sociales les plus vulnérables.

Le 4 octobre, à l’occasion de la Journée mondiale de l’Habitat, les Nations Unies ont mis en exergue un enjeu environnemental lié à l’habitat qui est par ailleurs souvent mis de côté. « Les villes et centres urbains du monde entier sont pris entre deux feux, luttant tout à la fois contre la crise de la Covid-19 et contre les changements climatiques. Ils abritent actuellement 4,5 milliards d’habitantes et d’habitants, chiffre qui devrait presque doubler d’ici à 2050 », contextualise à l’occasion le Secrétaire Général de l’ONU, António Guterres.

Un monde sans carbone

Le thème retenu cette année pour la Journée mondiale de l’Habitat, « Accélérer l’action urbaine pour un monde sans carbone », montre bien que « les villes et centres urbains sont au coeur de l’action climatique menée pour que l’objectif de 1,5 degré Celsius demeure à portée », poursuit la même source qui, par ailleurs, annonce que « d’ici au milieu du siècle, plus de 1,6 milliard de personnes vivant en milieu urbain pourraient avoir à supporter, chaque été, des températures moyennes pouvant atteindre 35 degrés Celsius ».

Rappelant que les trois-quarts des infrastructures qui existeront en 2050 restent à construire, le SG de l’ONU estime que les plans de relance économique nous donnent une chance historique de placer l’action climatique, les énergies renouvelables et le développement durable au centre des stratégies et politiques urbaines. « Si nous voulons atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici à 2050, il est essentiel que les autorités municipales montrent la voie », souligne le Secrétaire Général.

Habitat et décarbonisation

À la perspective des données et prévisions démographiques, environnementales et climatiques, l’enjeu de l’Habitat ne se limite donc plus à construire des logements accessibles, mais à le faire en prenant en considération les évolutions globales qui sont en cours. La voie que l’ONU semble pointer passerait par « l’utilisation de matériaux respectueux de l’environnement et sur des bâtiments à faible consommation énergétique, résilients et alimentés par les énergies renouvelables ».

En suivant ces priorités, les autorités municipales « ont tout à gagner : moins de pollution et de risques climatiques, des emplois plus nombreux et une population en meilleure santé, goûtant davantage de bien-être », promet António Guterres dont le postulat se fonde également sur le fait que les villes représentent environ 75 % de la consommation mondiale d’énergie et émettent plus de 70 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. « La façon dont les villes sont planifiées, construites et gérées est essentielle pour réduire les émissions de carbone et maintenir le réchauffement climatique », confirme un communiqué de l’ONU.

Quid du Maroc ?

Le secteur de l’Habitat au Maroc ne manque pas de faire l’objet d’objectifs alignés sur les recommandations de l’ONU, à travers la stratégie de développement bas carbone 2050 notamment. Ces ambitions se retrouvent dans les énoncés de la vision sectorielle du bâtiment et de celles relatives au transport et à la gestion des déchets.

Ces mêmes objectifs sont également évoqués dans le Nouveau Modèle de Développement qui insiste sur la nécessité de favoriser un aménagement intégré des territoires, d’améliorer l’habitat et le cadre de vie, sans oublier la connectivité et la mobilité. En dépit de cette volonté, la mise en oeuvre de cette transition urbanistique est encore un chantier dans lequel tout reste à faire. C’est dire la taille des défis qui attendent le nouveau gouvernement dont une des missions sera de lancer les premières mises en corrélation entre les ambitions du Royaume et le réel des habitants.

Oussama ABAOUSS

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Journée mondiale de l’Habitat : Intégrer les nouveaux défis climatiques pour des villes vivables

Indicateurs


L’évolution du secteur de l’Habitat au Maroc en quelques chiffres
 
Selon les statistiques du département de l’Habitat et de la Politique de la ville, la production globale des unités d’habitation, au premier semestre 2021, a affiché une hausse de 25,96% par rapport à la même période en 2020. La même source précise que 109.317 logements ont été construits à fin juin 2021, dont 58.292 unités économiques et sociales.

Durant cette même période, on compte à 113.495 le nombre d’unités mises en chantier (dont 40.562 logements sociaux), enregistrant une croissance de 9,33% par rapport aux six premiers mois de l’année 2020. Concernant l’habitat menaçant ruine, le ministère souligne que 35.818 bâtisses ont été conventionnées à fin 2020. Celles-ci concernent 68.890 foyers.

Le ministère explique par ailleurs qu’à fin 2020, plus de 1,2 million de ménages issus des quartiers sous-équipés ont vu « leurs conditions de vie s’améliorer ». Sur le volet des investissements directs étrangers à l’immobilier, ils sont en baisse de 15,94%, enregistrant 5,950 MMDH en 2020 contre 7,078 MMDH en 2019.

 

Habitat insalubre


Failles et échecs de la politique « Villes sans bidonvilles »
 
Stratégie initialement très ambitieuse, la politique « Villes sans bidonvilles » a finalement eu du mal à atteindre ses objectifs malgré plusieurs années de mise en oeuvre. Alors qu’elle prévoyait d’éliminer les bidonvilles en 2010, dans toutes les villes du Royaume ou au moins de rendre ce « phénomène marginal », la stratégie est encore très loin de venir à bout du problème de l’habitat insalubre.

Le constat a été confirmé par la Cour des Comptes qui, en juin 2020, a pointé des objectifs du programme villes sans bidonvilles « revus plus d’une fois, et désormais dépassés en raison de l’augmentation du nombre de familles vivant dans des bidonvilles ».

En juin 2021, le sujet a été évoqué lors d’une séance plénière hebdomadaire tenue à la Chambre des Représentants. Réagissant aux questions des députés, la ministre de l’Aménagement du Territoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville, Nouzha Bouchareb, a précisé que « 301.914 familles ont bénéficié du programme national « Villes sans bidonvilles » à fin 2020, soit près de 66% des familles concernées après mise à jour de ce programme ».

Bien que le programme ait dépassé le nombre de familles censées être dénombrées, la ministre a concédé que les familles programmées pour bénéficier du programme s’élèvent encore à 281.000 familles selon le dernier recensement, « dont 152.000 familles qui n’ont pas été recensées et ont été ajoutées dans 26 villes » et près de « 70.000 familles concernées par des unités achevées ou en cours de réalisation ».

 

3 questions à Abdesselam Chlieh, professionnel du bâtiment


« Les acquéreurs de la classe moyenne ont été obligés d’opter pour des logements sociaux »

 
Professionnel du bâtiment depuis plus de trois décennies, Abdesselam Chlieh nous livre sa perspective sur l’évolution du secteur de l’Habitat au Maroc.

 
- Quel est votre point de vue sur l’évolution du secteur de l’Habitat durant ces deux dernières décennies ?

- Il y a eu certainement des efforts considérables consentis pour que les catégories les plus démunies puissent avoir accès au logement. Cela s’est matérialisé par des mesures faites pour encourager la construction de logements économiques : logement à faible valeur immobilière totale (140.000 dirhams) et logement social (250.000 dirhams).

C’est une orientation qui se comprend au vu des enjeux sociaux qui existent dans notre pays. Je pense que les efforts étatiques qui ont été mis en place pour ce segment ont globalement donné leur fruit. En revanche, le problème se pose pour les logements destinés à la classe moyenne (entre 500.000 et 700.000 dirhams). Pour cette catégorie intermédiaire, l’offre actuellement disponible n’est pas suffisante.


- Quelles ont été les conséquences de la faible offre pour les logements intermédiaires ?

- À défaut de trouver le logement qui convient à leurs budgets dans les quartiers où ils auraient idéalement voulu s’installer, les acquéreurs de la classe moyenne ont été obligés d’opter pour des logements sociaux, souvent dans des quartiers périphériques. Cela a finalement provoqué une ghettoïsation de certaines catégories sociales.

À partir de 2013, les autorités concernées avaient évoqué la nécessité de trouver des solutions pour combler ce manque d’offre pour la classe moyenne. L’idée était de pouvoir proposer des appartements de 6000 dirhams le m² (bâtis) pour des superficies entre 80 et 100m². Cela dit, malgré les tentatives qu’il y a eu, la situation n’a pas vraiment changé parce que le problème qui conditionne tout, c’est le foncier.


- Quelles sont, selon vous, les solutions éventuelles pour améliorer l’accès au logement, notamment pour la classe moyenne ?


- Je pense que la solution passe par un changement de perspective dans la politique d’urbanisation, surtout pour les villes nouvelles. Il est également possible d’agir à travers des dispositions qui permettraient aux primo-acquéreurs de bénéficier de crédits immobiliers à très faibles intérêts. Ce genre de mesures a fait ses preuves ailleurs dans le monde et a démontré qu’elles peuvent non seulement améliorer l’accès au logement, mais aussi impulser l’économie locale.
 

Recueillis par O. A.


 








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