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Interview exclusive avec Lord Ahmad : « Rien n’empêche le Maroc d’intégrer un jour le Commonwealth s’il en a la volonté »


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mardi 2 Août 2022

En marge de sa visite au Maroc, Lord Ahmad, ministre britannique chargé des relations avec l’Afrique du Nord et le Commonwealth, nous a accordé une interview exclusive. Par son enthousiaste, le ministre explique comment son pays entend se rapprocher du Maroc, un pays important dans la politique de « Global Britain ». Entretien.



Lord Ahmad , Ministre britannique chargé des relations avec l’Afrique du Nord et le Commonwealth. Photo : Mehdi El Moussahim
Lord Ahmad , Ministre britannique chargé des relations avec l’Afrique du Nord et le Commonwealth. Photo : Mehdi El Moussahim
- Vous avez axé votre visite sur la transition énergétique et la « green finance », pourquoi cet intérêt si particulier ?

- Permettez-moi de rappeler que je suis enchanté d’effectuer ma première visite au Maroc qui couvre plusieurs aspects des relations bilatérales entre les deux pays. Je m’en réjouis d’autant plus que nous célébrons le troisième centenaire du premier traité commercial signé entre nos deux pays. Vu l’importance de la transition écologique et du développement durable, je pense qu’il est absolument nécessaire d’avoir une action coordonnée avec des pays ayant un potentiel aussi fort que le Maroc.

Aussi, nous jugeons nécessaire de travailler ensemble sur des sujets de grande importance comme l’énergie, l’inflation, la crise alimentaire dont l’Afrique est menacée. La rencontre que j’ai eue avec la ministre de la Transition énergétique, Mme Benali, a été l’occasion d’avoir un échange fructueux sur les possibilités de travailler ensemble et d’échanger les expertises pour renforcer la coopération bilatérale.

En ce qui concerne la souveraineté énergétique, le Maroc, permettez-moi de le souligner, paraît avoir globalement un mix énergétique de plus en plus inclusif en s’éloignant peu à peu des énergies fossiles. Pour continuer dans cet élan, comme nous aussi au Royaume-Uni, nous voulons accélérer la transition écologique.

Pour cette raison, nous explorons, avec nos partenaires marocains, les possibilités d’utiliser davantage l’hydrogène vert, l’énergie solaire et éolienne. Il existe, à mon avis, d’immenses opportunités à saisir aussi bien onshore qu’offshore.


- Concernant l’éducation, vous vous êtes entretenu avec le ministre Abdellatif Miraoui sur la coopération universitaire, force est de constater que les jeunes marocains sont de plus en plus attirés par l’anglais, on dit même que votre gouvernement veut saisir cette occasion pour « angliciser » l’enseignement supérieur au Maroc à travers les universités britanniques, qu’en pensez-vous ?

- C’est un sujet qui m’est cher. Il est certain que le Maroc est riche de sa jeunesse et je me félicite de l’intérêt que les nouvelles générations portent pour notre langue, celle de la mondialisation. Le Royaume Uni est en mesure d’offrir une offre éducative de qualité à travers ses universités, l’une des meilleures au monde. Nous avons tâché dernièrement d’accueillir plus d’étudiants marocains au Royaume-Uni, ils sont un millier maintenant et nous souhaitons en accueillir davantage dans les années qui viennent et pourquoi pas le doubler, voir même le tripler.

Rien ne nous en empêche étant donné les opportunités qui existent. Nous oeuvrons également à faire venir les campus des universités britanniques au Maroc, ce que nous avons réussi à faire avec « Coventry Business School », dont l’ouverture est prévue au début de l’automne prochain. Première université britannique à s’installer au Maroc. Comme l’éducation est un domaine fondamental, notre gouvernement a l’ambition de travailler étroitement avec le Maroc.


- Peut-on voir un jour le Maroc intégrer le Commonwealth, à l’instar des pays qui l’ont fait sans être historiquement liés à la Grande Bretagne ?

-Je vous assure que cette décision n’est pas de mon ressort, mais je puis vous dire que le Commonwealth a accueilli, ces dernières années, de nouveaux pays, passant ainsi de 52 à 56 Etats-membres. Pour répondre à votre question sans équivoque, je dirai oui, le Maroc est le bienvenu. S’il en a la volonté, il peut nous rejoindre pour peu qu’il présente sa candidature et suive la procédure d’adhésion.

À mes yeux, rien n’empêche une telle adhésion sachant que la présidence tournante du Commonwealth est occupée par le Rwanda, un pays qui n’a jamais fait partie de l’Empire britannique. Il y a beaucoup d’avantages à adhérer à une telle Organisation, à savoir les programmes de solidarité, des avantages commerciaux, etc. En manifestant autant d’appétence pour l’anglais, le Maroc affiche sa volonté de se rapprocher du monde anglosaxon et des pays du Commonwealth. Ceci permettra une meilleure compréhension.


- Il est incontestable que l’Accord d’association de 2019 a donné un sursaut aux relations maroco-britanniques. Londres cherche à trouver de nouveaux alliés commerciaux après le Brexit dans le cadre de la politique du « Global Britain », quelle place y occupe le Maroc ?

- Je crois que 2019 a été une année décisive dans l’Histoire de nos relations bilatérales, la pandémie nous a empêché malencontreusement d’accomplir beaucoup de choses que nous aurions pu faire et commercer plus. Mais, en tout cas, nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère, celle d’un véritable partenariat multidimensionnel. Ma présence ici au Maroc est l’exemple de l’importance qu’attache notre gouvernement à votre pays. Le partenariat dont je vous parle a tendance à grandir. Nous allons coopérer avec nos amis marocains dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, la lutte contre le réchauffement climatique, l’investissement « vert » et le commerce.


-Toujours dans le cadre du « Global Britain », le Maroc y est présenté comme une porte d’entrée en Afrique pour les capitaux et les investissements britanniques ?

- C’est une question à laquelle il est dur de répondre avec une simple confirmation. Je puis vous dire qu’il existe des opportunités dans ce sens. Vous savez, en Business, quand vous voulez investir dans un pays, vous vous intéressez à sa situation politique et économico-sociale. Le Maroc présente toutes les conditions à même de rassurer un investisseur étranger. Le pays est stable, sûr, dynamique avec des pistes menant au marché africain et des opportunités d’investissement dans plusieurs secteurs. Donc, tout est là. Le Maroc jouit également d’une bonne image auprès des Britanniques et du gouvernement.


- Concernant la coopération sécuritaire, vous attachez beaucoup d’importance à la lutte contre le terrorisme. Le Maroc, pionnier dans ce domaine, a abrité le Sommet de la Coalition mondiale contre Daech, quelle évaluation en faites-vous ?

- Daech a autant sali l’image de l’islam qu’elle a détruit la vie de beaucoup de gens. La collaboration entre plusieurs pays de différentes confessions est très importante. D’où la vitalité de la coalition mondiale, dont le Sommet s’est tenu à Marrakech. Je trouve que nos deux pays ont tendance à coopérer plus amplement dans le cadre de la coalition en ce qui concerne les menaces terroristes que présente Daech et ses alliés aussi bien au Moyen-Orient qu’au Sahel. Ceci est une priorité pour nous. Raison pour laquelle j’aurais participé personnellement au Sommet de Marrakech si je n’avais été atteint du Covid-19.


- Concernant la coopération religieuse, vous avez rencontré les membres de la Rabita Mohammedia des Oulémas, peut-on s’attendre à une coopération dans le domaine religieux et notamment la formation des imams ?

- La formation des imams est d’une importance cruciale. Nous avons des collaborations avec plusieurs partenaires internationaux tels que l’Université Al Azhar. J’ai eu l’occasion d’aborder ce sujet avec le Secrétaire général Ahmed Abbadi, et nous demeurons ouverts à une coopération étroite entre nos deux pays. Mais au-delà de l’exercice du culte, j’estime que nous pouvons travailler également sur le dialogue interreligieux et la tolérance confessionnelle pour une meilleure compréhension. Toujours est-il que la question des imams reste importante mais elle doit faire partie d’une coopération plus globale.




Recueillis par Anass MACHLOUKH

Maroc-Royaume-Uni


Une relation historique, renouvelée par un partenariat d’avenir
 
Depuis 2019, les relations entre le Maroc et le Royaume-Uni ont connu un sursaut sans précédent suite à la signature de l’accord d’association qui a manifestement changé la perception du Maroc par le gouvernement britannique, en quête de nouveaux partenaires commerciaux après le divorce dur avec l’Europe. Jadis, les relations se réduisaient aux amabilités entre les familles régnantes.

Aujourd’hui, les relations entre Rabat et Londres s’appuient sur un partenariat solide et tellement prometteur que le 10 Downing Street parie sur la langue anglaise pour renforcer sa présence au « portail de l’Afrique ».

Lors de sa visite au Maroc où il a rencontré les membres du gouvernement et les représentants du secteur financier, Lord Ahmad de Wimbledon est venu raffermir le nouveau partenariat basé sur la nouvelle politique du « Global Britain », où le Maroc occupe une place importante. Coopération sécuritaire, commerce, investissement, « Green Finance », et éducation, Londres met le paquet complet et semble ne voir aucun obstacle à l’adhésion du Maroc au Commonwealth !