- « Sound of Berberia » est un projet cinématographique qui vous tient à cœur. D’où est-elle née cette idée ?
- Il s'agit d'un voyage, ou plutôt d'un rêve qui n'a jamais pu se réaliser. Déjà, il y a 20 ans, j'étudiais le cinéma à Madrid et mon cousin étudiait la musique. Nous avions le rêve de parcourir le Nord de l'Afrique, moi avec ma caméra et lui avec sa guitare pour découvrir les différentes sonorités amazighes, de tribu en tribu, de pays en pays. À l'époque, il était possible de faire ce voyage ; il n'y avait pas de conflits géopolitiques et la région était très sûre. Peu à peu, la situation a changé : la rébellion touareg, Al-Qaïda au Maghreb s'est installée dans la région, le Printemps démocratique en Tunisie, en Libye, en Égypte... Notre rêve s'est dissipé. Sans le vouloir, j'ai commencé à écrire un scénario de fiction sur un voyage ou un documentaire que nous n'avons jamais pu faire.
- Le son amazigh au Maroc est-il différent de celui du reste du continent africain ? Où réside la richesse de la musique berbère ?
- Je pense que le Maroc est le pays le plus amazighophone d'Afrique du Nord. La musique amazighe est exceptionnellement variée, enracinée dans une forte base africaine. Tout comme la culture marocaine, elle a su fusionner avec les différentes cultures avec lesquelles nous avons coexisté tout au long de l'Histoire, méditerranéenne, arabe et européenne. C'est dans cette capacité de fusion et de réinterprétation que réside sa force, sans pour autant négliger sa base africaine, le rythme et le culte de la nature. Il est difficile de l'expliquer avec des mots, cela se comprend mieux dans le film.
- Quel état des lieux pourriez-vous dresser sur l’essor de la culture amazighe au Maroc ?
- Je pense qu'actuellement, il y a un essor de la culture amazighe, surtout parmi la jeunesse. Ce qui se reflète dans tous les aspects culturels, grâce aux derniers changements qui ont été apportés et qui sont en cours au niveau politique. Il y a comme une sorte de réconciliation avec son identité, alors qu’il y a quelques décennies auparavant, cela était mal vu et il y avait comme un mépris envers tout ce qui est Amazighe. On ne peut pas renier cette culture qui est la base et un pilier de l'identité marocaine.
- Par ailleurs, le cinéma amazighophone avance doucement mais sûrement. Le succès est-il au rendez-vous ?
- Malheureusement, le cinéma marocain, en général, et le cinéma amazigh, en particulier, dépendent largement des subventions et des aides publiques. Ces subventions sont nécessaires car un pays sans cinéma est un pays sans image. Produire un film marocain n'est pas rentable, c'est un sacrifice, une odyssée.
Faire un film en amazigh et sur la culture amazigh est une question de survie. Il y a à peine une trentaine de cinémas dans tout le Maroc, répartis entre les quatre ou cinq plus grandes villes du pays. Pourquoi les gens ne vont-ils pas au cinéma ? Pourquoi les entrepreneurs n'investissent-ils pas dans les salles de cinéma ? Cela peut donner beaucoup à réfléchir.
Cependant, cette situation n'est pas une raison pour reculer. Au contraire, il faut se réconcilier avec le public, lui donner des raisons d'aller au cinéma, qui reste un temple où l'on vit une expérience totalement différente de regarder un film à la télévision ou sur une tablette.
Après tout ce que nous avons traversé pour mener à bien ce film, je suis très curieux et enthousiaste de voir comment se passera sa sortie en salles. C'est un film très particulier, avec un langage cinématographique très audacieux et captivant, avec beaucoup de rythme, de musique, de paysages, d'amour, de guerre... Je pense qu'il plaira au grand public et surtout aux jeunes.
- Il s'agit d'un voyage, ou plutôt d'un rêve qui n'a jamais pu se réaliser. Déjà, il y a 20 ans, j'étudiais le cinéma à Madrid et mon cousin étudiait la musique. Nous avions le rêve de parcourir le Nord de l'Afrique, moi avec ma caméra et lui avec sa guitare pour découvrir les différentes sonorités amazighes, de tribu en tribu, de pays en pays. À l'époque, il était possible de faire ce voyage ; il n'y avait pas de conflits géopolitiques et la région était très sûre. Peu à peu, la situation a changé : la rébellion touareg, Al-Qaïda au Maghreb s'est installée dans la région, le Printemps démocratique en Tunisie, en Libye, en Égypte... Notre rêve s'est dissipé. Sans le vouloir, j'ai commencé à écrire un scénario de fiction sur un voyage ou un documentaire que nous n'avons jamais pu faire.
- Le son amazigh au Maroc est-il différent de celui du reste du continent africain ? Où réside la richesse de la musique berbère ?
- Je pense que le Maroc est le pays le plus amazighophone d'Afrique du Nord. La musique amazighe est exceptionnellement variée, enracinée dans une forte base africaine. Tout comme la culture marocaine, elle a su fusionner avec les différentes cultures avec lesquelles nous avons coexisté tout au long de l'Histoire, méditerranéenne, arabe et européenne. C'est dans cette capacité de fusion et de réinterprétation que réside sa force, sans pour autant négliger sa base africaine, le rythme et le culte de la nature. Il est difficile de l'expliquer avec des mots, cela se comprend mieux dans le film.
- Quel état des lieux pourriez-vous dresser sur l’essor de la culture amazighe au Maroc ?
- Je pense qu'actuellement, il y a un essor de la culture amazighe, surtout parmi la jeunesse. Ce qui se reflète dans tous les aspects culturels, grâce aux derniers changements qui ont été apportés et qui sont en cours au niveau politique. Il y a comme une sorte de réconciliation avec son identité, alors qu’il y a quelques décennies auparavant, cela était mal vu et il y avait comme un mépris envers tout ce qui est Amazighe. On ne peut pas renier cette culture qui est la base et un pilier de l'identité marocaine.
- Par ailleurs, le cinéma amazighophone avance doucement mais sûrement. Le succès est-il au rendez-vous ?
- Malheureusement, le cinéma marocain, en général, et le cinéma amazigh, en particulier, dépendent largement des subventions et des aides publiques. Ces subventions sont nécessaires car un pays sans cinéma est un pays sans image. Produire un film marocain n'est pas rentable, c'est un sacrifice, une odyssée.
Faire un film en amazigh et sur la culture amazigh est une question de survie. Il y a à peine une trentaine de cinémas dans tout le Maroc, répartis entre les quatre ou cinq plus grandes villes du pays. Pourquoi les gens ne vont-ils pas au cinéma ? Pourquoi les entrepreneurs n'investissent-ils pas dans les salles de cinéma ? Cela peut donner beaucoup à réfléchir.
Cependant, cette situation n'est pas une raison pour reculer. Au contraire, il faut se réconcilier avec le public, lui donner des raisons d'aller au cinéma, qui reste un temple où l'on vit une expérience totalement différente de regarder un film à la télévision ou sur une tablette.
Après tout ce que nous avons traversé pour mener à bien ce film, je suis très curieux et enthousiaste de voir comment se passera sa sortie en salles. C'est un film très particulier, avec un langage cinématographique très audacieux et captivant, avec beaucoup de rythme, de musique, de paysages, d'amour, de guerre... Je pense qu'il plaira au grand public et surtout aux jeunes.
Encadré
Crowdfunding : Tournage achevé haut la main
« Sound of Berberia » est un road-movie, mais ce n’est pas le sujet du film. « J'ai été obligé d'écrire un scénario de fiction d'un voyage, ou plutôt d'un rêve que je n'ai jamais pu réaliser. En 2003, alors que j'étais étudiant en cinéma à Madrid, je voulais prendre ma caméra accompagné de mon cousin Kino et sa guitare et voyager à travers l'Afrique du Nord à la recherche du son Amazigh, mais les conflits armés nous ont empêchés de réaliser ce rêve », nous confie le réalisateur du film, Tarik El Idrissi.
Le cinéaste a choisi un mode de narration très conventionnel : tourner dans l’ordre chronologique. « J'ai obligé la production à tourner en continuité temporelle afin que les acteurs soient plus crédibles face à la caméra. Nous avons presque toujours filmé caméra à la main et avec une lumière naturelle pour avoir une sensation réaliste », nous explique-t-il.
Le Crowdfunding (financement participatif) leur était d’une grande aide pour achever le film car, en 2017, ils ont fini le tournage avec beaucoup de dettes. « Il nous restait encore quelques scènes à tourner, 15 morceaux musicaux à produire, le montage et la post-production. Nous avons dû lancer une campagne de Crowdfunding pour finaliser le film, la première au Maroc. C'est un projet très risqué, un film d'auteur et nous considérons qu'il entre également dans la catégorie des films indépendants », fait-il remarquer.
Au niveau de la musique, l’élément phare de ce film, « il y a des des morceaux composés par nous-mêmes, des chansons connues de grands musiciens, comme Tinariwen et Idir, interprétées par d'autres personnes, des enregistrements en direct, et une grande surprise à la fin du film. Il y a aussi un travail sonore très complexe, qui a demandé beaucoup de temps. Ce n'est pas seulement un film sur la musique, c'est un film sur le son, celui-ci est le vrai protagoniste », résume notre interlocuteur. Enfin, le réalisateur donne rendez-vous aux cinéphiles le 19 mai au cinéma La Renaissance à Rabat.
« Sound of Berberia » est un road-movie, mais ce n’est pas le sujet du film. « J'ai été obligé d'écrire un scénario de fiction d'un voyage, ou plutôt d'un rêve que je n'ai jamais pu réaliser. En 2003, alors que j'étais étudiant en cinéma à Madrid, je voulais prendre ma caméra accompagné de mon cousin Kino et sa guitare et voyager à travers l'Afrique du Nord à la recherche du son Amazigh, mais les conflits armés nous ont empêchés de réaliser ce rêve », nous confie le réalisateur du film, Tarik El Idrissi.
Le cinéaste a choisi un mode de narration très conventionnel : tourner dans l’ordre chronologique. « J'ai obligé la production à tourner en continuité temporelle afin que les acteurs soient plus crédibles face à la caméra. Nous avons presque toujours filmé caméra à la main et avec une lumière naturelle pour avoir une sensation réaliste », nous explique-t-il.
Le Crowdfunding (financement participatif) leur était d’une grande aide pour achever le film car, en 2017, ils ont fini le tournage avec beaucoup de dettes. « Il nous restait encore quelques scènes à tourner, 15 morceaux musicaux à produire, le montage et la post-production. Nous avons dû lancer une campagne de Crowdfunding pour finaliser le film, la première au Maroc. C'est un projet très risqué, un film d'auteur et nous considérons qu'il entre également dans la catégorie des films indépendants », fait-il remarquer.
Au niveau de la musique, l’élément phare de ce film, « il y a des des morceaux composés par nous-mêmes, des chansons connues de grands musiciens, comme Tinariwen et Idir, interprétées par d'autres personnes, des enregistrements en direct, et une grande surprise à la fin du film. Il y a aussi un travail sonore très complexe, qui a demandé beaucoup de temps. Ce n'est pas seulement un film sur la musique, c'est un film sur le son, celui-ci est le vrai protagoniste », résume notre interlocuteur. Enfin, le réalisateur donne rendez-vous aux cinéphiles le 19 mai au cinéma La Renaissance à Rabat.