- Durant les deux dernières décennies, le Maroc a entrepris de nombreuses initiatives pour réduire le taux de criminalité. Comment évaluez-vous cette expérience marocaine ?
- Le Maroc a tracé un parcours significatif dans sa quête incessante de démantèlement des réseaux criminels. De même, il a adhéré à la majorité des conventions internationales contre la criminalité transnationale organisée et les protocoles s’y rapportant.
Notre pays a adopté ainsi une stratégie nationale qui embrasse les dimensions internationales. Les différentes opérations de démantèlement pilotées prouvent qu’il y a effectivement une véritable prise de conscience et une réponse aux menaces du crime transnational, d’autant plus que notre pays est à la croisée de beaucoup de flux, avec tous ce que ceux-ci apportent comme défis.
Le Maroc, à l’instar des autres pays de la région, connaît, certes, les mêmes défis, mais il a une réponse institutionnalisée qui, à notre humble avis, reste robuste. D’ailleurs, dans le cadre de la coopération Sud-Sud, nous sommes souvent sollicités, pour proposer des experts marocains qui peuvent animer des formations au profit de plusieurs pays africains.
Avec les pays européens, aussi, la coopération se fait parfaitement et d’une manière très fluide selon les opérations rapportées par les autorités. Ainsi, les opérations de sécurité menées conjointement entre les autorités marocaines et leurs homologues internationales et relayées par la presse, prouvent d’ailleurs l’efficacité des outils de coopération.
- Quels sont les défis les plus pressants auxquels le Maroc est confronté en matière de lutte contre la criminalité ?
- Un défi important et omniprésent auquel nous devons tous répondre est le caractère transnational et digital des crimes. Le digital est devenu ainsi une nouvelle arme de crime, même une pierre angulaire de la criminalité. Ceci étant dit, le changement rapide des modes opératoires des criminels pose un énorme défi pour le Royaume et la communauté internationale.
Face à l'essor fulgurant de réseaux criminels toujours plus sophistiqués, intimement impliqués dans des flux internationaux, le Maroc a mis en place une réponse concertée et adaptée à cette problématique et se voit contraint de la mettre à jour en fonction des mutations rapides. Le caractère transnational a toujours été et il reste prévalent, la digitalisation croissante des crimes impose, par ailleurs, une vigilance accrue et une coopération renforcée à l'échelle internationale.
- Quelles sont les mesures prises par votre institution pour soutenir les efforts de l’État dans la lutte contre la criminalité ?
- Face à l’ensemble de ces menaces, l’ONUDC,en partenariat avec les institutions, organise des activités d’assistance technique pour renforcer les mesures prises par l’Etat pour faire face à ces phénomènes. Notre institution œuvre activement à travers des collaborations stratégiques avec tous les départements concernés par l’application de la loi, allant de la justice à la police judiciaire, en passant par la magistrature et la gendarmerie royale.
Nous déployons, par exemple, des formations adaptées aux besoins exprimés, partageant les bonnes pratiques et les expériences internationales pour renforcer les capacités et les compétences nécessaires à la lutte contre la criminalité et ses nouvelles formes. Nous pouvons également élaborer des recherches et des enquêtes avec les autorités marocaines, notamment en fonction de la question soulevée ou du besoin de l’information qui se fait. Nous supportons également les actions entreprises par les instances et commissions nationales pour opérationnaliser leurs mécanismes de lutte contre les crimes et mettre en œuvre les politiques menées en la matière.
- La délinquance juvénile est en hausse au Maroc, posant de véritables défis de développement au pays. Quels sont les programmes spécifiques mis en place pour lutter contre ce fléau ?
- Nous nous attachons à prévenir la délinquance, en élaborant des programmes spécifiques destinés, notamment, à la jeunesse qui est un vecteur de transformation sociale et de résilience. A l’échelle globale, nous avons conçu une panoplie de programmes spécifiques visant à sensibiliser et à alerter la jeunesse face aux dangers de la criminalité et aux formes les plus diverses et les plus graves qu’elle peut revêtir.
Notre engagement s'étend au-delà des frontières nationales, comme en témoigne notre récente participation au hackathon anti-corruption, organisé au Qatar, où le Maroc a brillé par sa présence et s’est classé parmi les trois premiers. De telles initiatives témoignent ainsi de notre volonté de promouvoir une culture de responsabilité et d'intégrité chez les jeunes générations.
- Quel rôle joue l'ONUDC dans la promotion de la justice et de l'État de droit au Maroc ?
- L'ONUDC s'engage pleinement à soutenir les efforts de réforme et de modernisation entrepris par le Maroc pour renforcer son système judiciaire et édifier une société où la justice est accessible à tous. Notre collaboration repose sur la fourniture d'un appui technique, ainsi que sur le partage des meilleures pratiques et des leçons apprises à l'échelle internationale. Nous encourageons également le renforcement des partenariats régionaux et la coopération internationale, essentiels à la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée.
Coup de projecteur sur l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime
L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) est l’organe du Secrétariat des Nations Unies en charge de la lutte contre le trafic illicite des stupéfiants et la criminalité organisée. Il est né en 1997 de la fusion du Programme des Nations Unies pour le Contrôle International des Drogues (PNUCID) et du Centre pour la prévention de la criminalité internationale (CIPC). La mission de l’ONUDC est d’assister les États membres dans la réalisation de l’objectif de sécurité et de justice pour tous en rendant le monde plus sûr face à la criminalité, à la drogue et au terrorisme. Les activités de l’ONUDC reposent sur trois piliers : la coopération technique sur le terrain, l’ONUDC élabore et met en œuvre des programmes-pays, des programmes régionaux ainsi que des programmes thématiques, ainsi que la recherche et le travail analytique, l’ONUDC publie, en effet, un rapport annuel sur la drogue ainsi que des rapports régionaux sur la drogue et le crime. L’ONUDC assure également le secrétariat des trois conventions internationales en matière de contrôle des drogues, ainsi que des conventions de Palerme contre la criminalité transnationale organisée et de Mérida contre la corruption, mais aussi l’élaboration de normes et standards, notamment en matière de justice pénale.