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Interview avec Samir Addahre : « Des mesures de protection juridique sont initiées pour défendre notre patrimoine »


Rédigé par Mariem LEMRAJNI Mardi 27 Décembre 2022

Rabat a été propulsée en capitale mondiale pour accueillir la réunion du Comité intergouvernemental pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Dans ce sillage, l'ambassadeur - Délégué Permanent du Royaume, Samir Addahre, répond à nos questions.



- Quel bilan dressez-vous des travaux de la 17ème session du Comité et des missions dont il a la charge ?

- Notre pays a abrité les travaux de la 17ème Session du Comité du Patrimoine Culturel Immatériel de l’UNESCO, dans la ville de Rabat, du 28 novembre au 3 décembre 2022. Il s’agit de la première session du Comité, organisée dans un pays membre, en mode présentiel, après une période difficile due à la pandémie de Covid-19. Cette 17ème Session a connu un grand succès aussi bien sur le plan de l’organisation logistique, du nombre et de la qualité des participants que de par l’importance des décisions prises par le Comité.

Plus de 1200 participants inscrits ont pris part à cette session importante, représentant 132 Etats membres et plus de 100 ONGs et institutions culturelles du monde entier. Cette réunion a été marquée par l’examen de 54 dossiers de candidature ayant abouti à l’inscription de 39 éléments sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, de 04 éléments sur la liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente et de 04 programmes sur le registre des bonnes pratiques de sauvegarde.

Par ailleurs, le Comité a examiné les rapports périodiques des Etats parties sur l’état actuel des éléments inscrits sur les listes du patrimoine culturel immatériel, le programme de renforcement des capacités et de soutien technique ainsi que les résultats de la réflexion globale sur les mécanismes d’inscription sur les listes de la Convention de 2003. Parallèlement aux travaux du Comité, plus de 40 évènements ont été organisés par le Maroc et les autres Etats membres sur différents thèmes liés à la sauvegarde du patrimoine vivant.


- Ces dernières années, le Royaume accélère le chantier de la sauvegarde de son patrimoine culturel. Quels sont les enjeux de ce chantier ?

- Le patrimoine culturel est l’ensemble des sites et monuments historiques bâtis, les pratiques, connaissances et savoir-faire associés à la mémoire collective d’une nation, et qui ont une valeur identitaire essentielle pour les populations et les communautés concernées. Aujourd’hui, ce patrimoine culturel devient un enjeu majeur à l’échelle internationale et appelle, non seulement à un devoir de promotion et de mise en valeur, mais également à une plus forte mobilisation et à une vigilance quant à sa protection et sa préservation.

Dans ce cadre, les autorités marocaines déploient des efforts et des moyens conséquents pour protéger et sauvegarder notre patrimoine national exceptionnel qui représente un héritage millénaire et des traditions sociales ancestrales qui font partie intégrante de l’identité marocaine. Ainsi, diverses actions ont déjà été entreprises pour la restauration des monuments historiques de notre pays. En outre, des mesures de protection juridique ont été initiées pour assurer la protection de notre patrimoine contre toute tentative d’appropriation.


- Couscous, musique, caftan, Zellige… Les polémiques entre le Maroc et l’Algérie se multiplient. Quelle est la source de ces frictions ?

-De par son Histoire, le Maroc est connu par son patrimoine culturel millénaire, riche et diversifié, lié à ses différentes composantes amazighe, arabe, hassanie, juive, andalouse, méditerranéenne et africaine, et représentant toutes les régions du pays.

Au fil du temps, cette richesse culturelle a traversé l’espace et les frontières géographiques pour s’ouvrir à d’autres communautés et populations dans un esprit de partage et de rapprochement culturel. Ceci s’inscrit pleinement dans les valeurs d’ouverture et de solidarité prônées par notre pays, dans le respect de l’identité de chacun et loin de toute appropriation illicite de notre patrimoine culturel et civilisationnel. Ceci dit, on constate un regain d’intérêt, depuis quelques années, par rapport au patrimoine culturel immatériel, qui, en tant que patrimoine vivant, interroge évidemment l’Histoire, la culture, les traditions et l’identité des peuples et des nations. Bien évidemment, dans des contextes politiques parfois tendus, l’instrumentalisation des éléments du patrimoine immatériel est évidente et ça relève plus de la passion que de la raison.

A cet égard, il convient de souligner que les éléments du patrimoine immatériel sont juridiquement et légalement bien encadrés. En tout cas, pour ce qui concerne l’UNESCO, on constate que souvent les gens, par méconnaissance, traduisent ces passions par des désaccords : « ça m’appartient, ça ne m’appartient pas ». Il y a des processus historiques et culturels qui font que des éléments du patrimoine soient souvent partagés. Mais à partir du moment où la raison ne prévaut pas, on assiste à ce genre de frictions.

Il y a évidemment des éléments de patrimoine qui appartiennent à des peuples et à des nations parce qu’ils sont le fruit de processus historiques, culturels, identitaires et traditionnels, et qui sont parfaitement bien encadrés légalement et juridiquement. On peut également retrouver, parfois, des éléments dans plusieurs pays, exercés par des communautés dans différents pays. Et c’est pour cela que l’on assiste, aujourd’hui, à une augmentation des dossiers de candidature multinationaux. Ce phénomène reflète une prise de conscience raisonnable qu’il y a des éléments qui sont partagés et que, par conséquent, il y a lieu de présenter des dossiers communs.

Ne l’oublions jamais, la culture est un formidable levier de rapprochement entre les peuples. Il est évident qu’aujourd’hui, la culture peut réussir là où, parfois malheureusement, la politique échoue. Cette portée stratégique de la culture est de plus en plus, fort heureusement, intégrée par les multiples acteurs de la diplomatie.

 
Le Maroc est l’un des pays arabes et africains qui ont le plus grand nombre de sites et d’éléments culturels inscrits au patrimoine de l’UNESCO


- Le patrimoine et la culture sont les atouts les plus attractifs de la destination Maroc. Quelle est l’approche adoptée par le Royaume pour mieux valoriser ces atouts ?

- Le Maroc est l’un des pays arabes et africains qui ont le plus grand nombre de sites et d’éléments culturels inscrits au patrimoine de l’UNESCO. En effet, notre pays compte, aujourd’hui, 9 sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial et 12 éléments sur la liste du patrimoine culturel immatériel. Les autorités marocaines, notamment le ministère en charge de la Culture, consacrent d’importants moyens pour promouvoir et mettre en valeur notre patrimoine culturel qui est un marqueur essentiel de notre identité et une composante importante de notre mémoire collective.

A ce titre, plusieurs activités sont organisées au niveau national et international, sous forme de conférences, colloques, festivals, expositions, visites guidées et ateliers de formation.


- A quel point la mise en place du Centre national pour le patrimoine immatériel pourrait-elle aider à fédérer les efforts pour assurer sa protection ?

- La création du Centre national pour le patrimoine immatériel a été annoncée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, dans Son message adressé à la 17ème session du Comité du Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO, tenue à Rabat. Il s’agit d’une initiative royale de grande importance qui reflète l’intérêt particulier que la plus Haute Autorité de notre pays attache au patrimoine culturel national.

Cette institution participera à la sensibilisation et à la formation autour de notre patrimoine, sa préservation, sa valorisation et son rayonnement à l’international. Elle servira, également, à consolider davantage le travail entrepris concernant l’inventaire et la labellisation du patrimoine national. Elle permettra, en outre, de mettre en valeur et de protéger les savoir-faire matériels et immatériels nationaux, dans les différents domaines du patrimoine.


- Quelle forme d’action le Maroc doit-il déployer au sein des instances concernées pour assurer au mieux la protection et la promotion de son patrimoine ? Le numérique est-il une solution prometteuse ?

- Pays de grande culture, le Maroc agit à travers le monde, par le biais de ses différents représentants et institutions compétentes, auprès des instances internationales et régionales telles que l’UNESCO, l’ISESCO, l’ALESCO et la Francophonie, pour défendre et faire connaître à l’international les différentes composantes de son patrimoine.

Pour ce qui est de l’UNESCO, il sied de rappeler que le Maroc a ratifié, dès octobre 1975, la Convention relative au patrimoine mondial (Convention de 1972) et, depuis juillet 2006, celle concernant le patrimoine culturel immatériel (Convention de 2003). Notre pays adhère donc à l’esprit de ces deux traités internationaux et demeure attaché aux valeurs y afférentes visant notamment la préservation et la sauvegarde du patrimoine culturel.

Le Maroc reste mobilisé, à travers sa délégation permanente, pour assurer l’examen et le suivi des dossiers liés aux éléments du patrimoine national, inscrits ou en attente d’inscription sur les différentes listes de l’UNESCO relatives au patrimoine culturel. Aussi, nous travaillons de concert avec les organes et les experts de cette Organisation internationale sur les plans de sauvegarde, de formation et de préparation des dossiers d’inscription des éléments du patrimoine national.





Recueillis par Mariem LEMRAJNI








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