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Interview avec Adiba Bakkour, Professeure à l’UM5 « Les étudiants africains au Maroc excellent plutôt dans les formations techniques »


Rédigé par Safaa KSAANI Dimanche 5 Mars 2023

La lauréate de l’Université Mohammed 5, Adiba Bakkour, a été amenée à côtoyer de nombreux condisciples du continent. Devenue professeure, au bout de quelques années d’études, elle endosse le rôle de porte-voix, en lançant le projet : « Pour une meilleure intégration de l’étudiant africain au Maroc».



L’UM5 a lancé, les 1er et 2 mars à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat, le projet intitulé : « Pour une meilleure intégration de l’étudiant africain au Maroc ». Quels sont les tenants et aboutissants de ce projet ?
Ce projet vise principalement à aider les étudiants du continent qui suivent leur cursus universitaire au Maroc à mieux s’intégrer dans la société, à commencer par leur milieu académique. En tant que professeurs, nous allons accompagner ces étudiants dans leur processus académique en leur offrant des formations de qualité dans diverses disciplines, en vue de faciliter leur insertion socio-professionnelle. Les soft skills sont au cœur des attentions.

Parmi une centaine de projets candidats, ce projet a pu bénéficier d’une subvention de l’UNESCO dans le cadre des projets de participation (PP).
Ce projet est proposé et conçu par l’Association des Lauréats de l’Université Mohammed V de Rabat et adopté par la Présidence de la même Université. La candidature a été faite à travers la Commission Nationale pour l’Education, les Sciences et la Culture

L’idée de ce projet est née de quel constat ?
Nous sommes membres de l’association mais aussi professeurs à la même université. Donc, nous sommes à la fois professeurs et lauréats de l’UM5. Nous côtoyons les étudiants du continent au quotidien. Nous savons très bien que la majorité d’entre eux sont doublement boursiers, de leur pays d’origine et de l’Agence Marocaine de la Coopération Internationale (AMCI). En général, ils sont bien installés au Maroc, et résident principalement à la Cité internationale de Rabat. Mais cela n’empêche que de petits problèmes d’intégration persistent. Nous avons souhaité braquer les projecteurs sur cette réalité.

Quelles sont les activités programmées dans le cadre du projet "Pour une meilleure intégration des étudiants africains au Maroc" ?
Il s’agit de trois activités qui touchent trois volets différents : juridique, académique et socio-culturel. La première activité est sous forme de journées de sensibilisation pour une meilleure intégration. Elles seront animées par les confédérations des associations des étudiants africains à Rabat et par des professeurs spécialisés en droit de l’étranger.
Une Conférence dédiée à l’étudiante africaine est la deuxième activité au menu. Cette conférence vise à renforcer la sensibilité au genre chez les étudiants marocains et étrangers, et à encourager les étudiants à lutter contre la violence et le racisme contre les étudiants étrangers en général, et contre l’étudiante africaine en particulier. Elle sera également l’occasion de raconter des « success stories » des lauréates africaines des universités marocaines, ayant réussi leur carrière professionnelle au Maroc ou dans leur pays d’origine. Cette conférence sera organisée le 16 mai prochain.

Troisièmement, un séminaire de formation en soft skills est programmé.
Ce séminaire, animé par des coachs expérimentés, des experts en langues et en techniques de communication, comprendra des ateliers de Techniques de Communication et de prise de parole en public, enseignement de la langue arabe aux non-arabophones, cycle de projets, esprit entrepreneurial, coaching et développement personnel, approche genre dans le milieu académique, Programmation Neurolinguistique… Ces experts, à travers des ateliers diversifiés, aideront les étudiants africains à renforcer leur niveau linguistique et leurs compétences communicationnelles, constituer un porfolio professionnel pour faciliter l’accès au marché de travail, rédiger un CV, une lettre de motivation, une demande de stage, une fiche de projet, et s’initier aux notions de base de prise de parole en public pour réussir les entretiens d’embauche. Ce séminaire sera organisé le 04 juillet 2023.

Le Maroc est une destination privilégiée d’une bonne partie des étudiants africains. A combien estime-t-on leur nombre ?
Les universités marocaines ont accueilli 9843 étudiants africains, en plus de 1148 étudiants en Formation continue et 8265 dans les établissements de la Formation Professionnelle, au titre de l’année 2021/2022. Au total, 19.000 étudiants africains y sont inscrits. 85% d’entre eux sont boursiers de l’AMCI. Au titre de cette année, 1818 étudiants africains sont inscrits àl’Université Mohammed V de Rabat.
Pour les données de l’année universitaire en cours, nous ne pouvons les obtenir qu’en fin d’année. N’oublions pas qu’une bonne partie des étudiants ne sont pas comptabilisés. Ceux-ci dépendent principalement du secteur privé de l’enseignement supérieur. Il y a beaucoup d’établissements privés qui sont en contact direct avec les parents et les étudiants, donc ils ne passent pas par les consulats ou l’AMCI. Donc, nous n’avons pas de statistiques exactes qui couvrent le volet formation professionnelle et enseignement supérieur privés.

Quels sont les domaines d’études qui les intéressent le plus ?
Ils sont principalement attirés par les domaines techniques. Les études en droit, économie, littérature… sont assurées dans les établissements de  leurs pays. Mais les formations dans les domaines techniques et professionnels, en l’occurrence l’ingénierie, les nouvelles technologies, l’aéronautique, les attirent davantage ici.
Je tiens également à souligner que leur mobilité a beaucoup changé au profit de toutes les régions du Royaume. Auparavant, ces étudiants suivaient leur cursus universitaire principalement dans les grandes villes, tandis qu’aujourd’hui on les trouve à Oujda, Dakhla…

En matière de formation, est-ce que les étudiants marocains et leurs condisciples subsahariens et nord-africains ont reçu la même formation de base avant le parcours universitaire ?
A vrai dire, cela diffère d’un pays à un autre. Il y a des étudiants brillants, il y a d’autres moins bons. Certains d’entre eux n’arrivent pas à s’adapter et abandonnent leurs études. En tant que Professeure ayant enseigné dans différentes écoles d’ingénierie, je peux vous garantir que les étudiants africains excellent dans les formations techniques.

Quelle vision académique porte l'UM5 pour développer une stratégie permettant de trouver des solutions appropriées à l'intégration des étudiants étrangers ?
- L’année universitaire 2022/2023 a été marquée par la mise en application du Plan d’accélération de la transformation de l’écosystème d’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et del’innovation (PACTE ESRI 2030). Il y a une grande partie réservée à la mobilité estudiantine pour les Marocains souhaitant suivre leur parcours académique à l’étranger comme pour les étrangers qui privilégient le Maroc. Plusieurs dispositions sont mises à leur service.

Par ailleurs, quelles sont les possibilités de leur insertion dans le marché de travail ?
Il y a deux types de profils de lauréats. Les excellents trouvent de bonnes opportunités de travail. Exemple en est la success story de Lamine NDIAYE, entrepreneur sénégalais, lauréat de l’Université Mohammed V, qui a créé sa propre startup. Les lauréats qui ne retournent pas à leurs pays d’origine préfèrent rester au Maroc et travailler dans des centres d’appels. C’est ce qui explique en partie leur importante présence dans ces centres. C’est un gâchis pour leur pays qui leur a octroyés des bourses nationales. On ne profite pas réellement de leurs compétences.
Recueillis par Safaa KSAANI








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