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Evaluation des cadres: Outil efficace pour mieux aiguiller les politiques publiques dédiées à l'emploi


Rédigé par Mina Elkhodari Mardi 21 Février 2023

Bien qu’elle ne soit pas encore suffisamment instaurée dans le processus de mise en place des politiques publiques, la démarche d’évaluation des programmes dans le domaine de l’emploi ouvre de nouvelles perspectives de développement pour les organismes publics tels que l’ANAPEC.



Dans un contexte marqué par de grandes réformes sociales, notamment dans les secteurs clés de développement, les politiques publiques nécessitent, plus que jamais, d’être passées à la loupe. C’est dans ce sens que s’inscrit l’initiative d’appui à l’évaluation rigoureuse de l’impact des programmes d’employabilité et d’inclusion économique relevant du programme de coopération «Compact II», conclu entre le gouvernement du Royaume et celui des Etats-Unis, dont les résultats ont été présentés, le 20 février, par l’Agence Millennium Challenge Account-Morocco (MCA-Morocco) et le Lab de l’Emploi Maroc.

Evaluation des politiques : une action à multiples défis

Si les défis liés à l’employabilité et à l’inclusion économique s’avèrent de plus en plus importants, ceux liés à l’évaluation des actions déployées en appui à l’emploi ne sont pas moins interpellants. C’est du moins ce qui ressort de l’étude de terrain de MCA, selon laquelle «malgré le grand intérêt des partenaires pour comprendre l’efficacité de leurs programmes, cette opération est confrontée à de nombreuses difficultés internes et externes».

Il s’agit, d’après Florencia Devoto, directrice du Lab de l’Emploi Maroc, au-delà du contexte de mise en œuvre de cette opération marquée par la pandémie de Covid-19, de difficultés liées à l’insuffisance des fonds consacrés à l’évaluation des politiques publiques dans le Royaume ou aussi d’accès au financement auprès de bailleurs de fonds internationaux.
Outre cela, la procédure administrative constitue un autre frein aux initiatives d’évaluation d’impact dans la mesure où elle risque de retarder l’opération de collecte des données nécessaires et d’entraver, par conséquent, la progression du projet d’évaluation.

Pour faire face à ce défi qui, d’ailleurs, s’impose dans plusieurs secteurs d’activité, le Lab Maroc appelle à renforcer la coopération pour la mise en place de données solides, en mesure d’optimiser les résultats de telles initiatives, mais aussi de veiller sur la qualité des données, ainsi que sur le respect des considérations éthiques.

Il est également question, d’après la même source, de veiller à la généralisation des comités d’éthique et d’examen institutionnel pour les chercheurs.

ANAPEC : un gisement d’opportunités encore à explorer

Considérée comme leader public pour la promotion de l’emploi, l’Agence Nationale de Promotion de l’Emploi et des Compétences (ANAPEC)  met à la disposition des employeurs et des chercheurs d’emploi un large éventail de services, notamment la présélection de candidats, l'accompagnement administratif pour les contrats subventionnés et le financement de programmes de formation.

Outre ce grand champ d’intervention, le marché de l’emploi présente encore des opportunités que l’ANAPEC devrait saisir pour à la fois optimiser les résultats de ses partenaires et réduire les frictions sur le marché du travail liées, notamment, à l’inadaptation des compétences et à la faible qualité de l’emploi.

C’est, d’ailleurs, le constat révélé par une enquête baseline menée entre juin et septembre 2022 par le Lab Maroc en collaboration avec l'ANAPEC auprès de 8099 employeurs. Celle-ci a montré que 35% des employeurs interrogés témoignent des besoins en matière de recrutement, mais ne sont pas en mesure de préciser le type de métier souhaité, ni les informations associées au processus de recrutement. De même, 35% des entreprises déclarent avoir des besoins en formation, mais ne sont pas en mesure de les définir clairement. Autre constat frappant : 62% des employeurs témoignent d’une réelle inadéquation entre leurs besoins et les compétences des candidats.

Sur le terrain, un tiers des entreprises de l’échantillon déclarent n'avoir jamais bénéficié d'un service de l'ANAPEC et 84% ont montré un intérêt particulier à ses services. Ce qui représente, selon Bruno Crépon, professeur à l’ENSAE-Ecole Polytechnique, un grand manque à gagner pour l’ANAPEC dans l’extension de son impact sur le marché national. A la clé, une démarche basée sur communication autour des services offerts par l’Agence auprès des employeurs. «Les conseillers de l’ANAPEC contactent les employeurs de manière proactive pour leur expliquer les services de l’Agence, les soutenir dans le processus d’identification de leurs besoins et leur fournir les conseils adéquats», explique Pr Bruno Crépon, ajoutant que 4000 employeurs, soit 50% de l’échantillon étudié, sont contactés immédiatement.
 

3 questions à Houda Barakate: « La formation axée sur la demande fait ses preuves au Maroc »

Houda Barakate, directrice générale de la fondation Education for Employment (EFE), présente au symposium de MCA et du Lab Maroc, a répondu à nos questions sur les principales conclusions de l’initiative d’évaluation du programme de formation axée sur la demande.

- Comme définissez-vous une formation professionnelle axée sur la demande ?

- A l’ère du gap énorme entre les compétences des candidats et les besoins réels du recruteur, les formations axées sur la demande consistent en la préparation des chercheurs d’emploi au marché du travail et à la prise de poste. La démarche consiste à identifier les besoins des recruteurs en matière de compétences, à préparer un programme de formation intensifié de courte durée dans des secteurs tels l’offshoring, le coding, l’industrie, la bureautique… mais aussi d’un programme de formation en soft skills avec l’encadrement et le suivi des observateurs du marché de l’emploi.

- Parmi les conclusions de l’étude d’évaluation de l’impact de l’action d’EFE figure la formation sectorielle comme alternative rentable aux formations traditionnelles. Cette vision est-elle facile à mettre en place dans le contexte marocain ?

- C’est un modèle qui a fait ses preuves aux Etats-Unis et depuis 2018 au Maroc. Aujourd’hui, l’ambition est devenue encore plus grande, celle de dupliquer la formation d’EFE dans le curricula des Universités publiques du Royaume, un projet que  nous avons mise en place avec l’OFPPT pour deux années consécutives.
En attendant, nous avons créé des clubs d’étudiants au sein des Universités pour former leurs collègues à la prise de poste avec l’encadrement et le suivi d’EFE.

-Quel bilan tirez-vous des 5 ans d’application de ce programme ?

-A ce jour, EFE a accompagné un total de 6900 jeunes avec des formations en ligne sur l’employabilité ou encore des formations techniques sur place avec un taux d’insertion de 75% dans plusieurs secteurs. Nous avons également réussi à accompagner des entrepreneurs dans le milieu rural pour les aider à structurer leur activité. Nous travaillons, aujourd’hui, sur le développement d’un catalogue de formation qui s’impose dans le secteur IT, un des secteurs qui présentent des opportunités importantes aux chercheurs d’emploi.