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Entretien avec Yacine FAL : Le Maroc et la BAD s’allient face aux crises


Rédigé par Wolondouka SIDIBE Jeudi 16 Juin 2022

En marge de la réunion de haut niveau du Comité des quinze ministres des Finances (F15) de l’Union Africaine (UA), la Vice-Présidente par intérim chargée du Développement régional, de l’Intégration et de la Prestation de services de la BAD, Mme Yacine FAL, aborde le partenariat d’exception qui existe entre son institution et le Royaume ainsi que la crise Russie-Ukraine, laquelle affecte les économies africaines. Explications.



- En marge de la réunion de haut niveau du comité des quinze ministres des Finances (F15) de l’Union Africaine (UA), vous avez signé des conventions de partenariat avec le Maroc. De quoi s’agit-il ?

- Cette signature de partenariat porte sur deux financements additionnels dans le cadre de projets d’infrastructures par le groupe de Banque africaine de développement au Maroc. Le premier concerne l’Office national des aéroports du Maroc pour l’extension et la modernisation de l’aéroport de Rabat-Salé.

Le deuxième est un financement additionnel, à la suite d’un premier financement, il y a quelques années, accordé pour la construction du complexe portuaire Nador West Med (NWM) à réaliser par la Société Nador West Med (SNWM). Cette convention confirme, par ailleurs, la disponibilité de la BAD à fournir l’appui financier et technique pour soutenir la dynamique des réformes économiques et sociales enclenchées par le Royaume. Elle est aussi la volonté commune pour renforcer davantage les relations de coopération, déjà excellentes, entre le Maroc et la BAD.


- Le Maroc est un partenaire privilégié de la BAD. Comment qualifiez-vous aujourd’hui le Royaume par rapport aux autres Etats du continent ?

- C’est vrai, le Maroc est l’un des premiers clients de la BAD à la fois en termes d’ancienneté et en termes du niveau de coopération. La Banque est impliquée dans plusieurs secteurs. Nous avons été particulièrement présents dans l’eau et l’assainissement notamment dans l’approvisionnement en eau potable dans la région de Marrakech.

La BAD a été aussi le premier contributeur dans le projet Noor Ouarzazate pour le solaire ainsi que Noor Midelt, tout comme dans le ferroviaire mais également dans les programmes de gouvernance. Il en est de même pour le secteur agricole à travers le Plan Maroc Vert ainsi que l’extension du système de la protection sociale et médicale. Nous sommes, in fine, présents dans les grands chantiers socioéconomiques du Maroc.


- En termes de chiffres, que peut-on retenir ?

- Il faut rappeler que depuis 1978 et jusqu’à la fin 2020, plus de 170 opérations dans différents secteurs ont été déployées par la Banque, pour un total de plus de onze milliards de dollars américains. Dans le cadre de ses cinq grandes priorités, dites « High 5 » - « nourrir l’Afrique », « éclairer l’Afrique et l’alimenter en énergie », « industrialiser l’Afrique », « intégrer l’Afrique » et « améliorer la qualité de vie des Africains » -, la Banque soutient le Maroc en contribuant à favoriser les conditions d’une croissance forte, durable et inclusive.

A la fin de l’année 2020, le portefeuille actif de la Banque comptait 36 projets et programmes, représentant plus de 3,8 milliards de dollars américains. Des engagements répartis dans les secteurs de l’énergie (31%), des opérations multisectorielles (22%), du développement social et humain (13%), du secteur privé (13%), de l’eau et de l’assainissement (10%), des transports (9%) et de l’agriculture (2%).


- Vous avez participé à la réunion de haut niveau du comité des quinze ministres des Finances (F15) de l’Union Africaine (UA), tenue du 12 au 13 juin 2022 à Rabat. Quelle est la démarche de la BAD pour le financement de l’organisation panafricaine ?

- Notre participation à la réunion de haut niveau du comité des quinze ministres des Finances (F15) de l’Union africaine (UA) fait suite à la déclaration qui a été faite lors du Sommet des chefs d’Etat au début mars 2022. Cette déclaration a assigné le groupe de BAD, à travers son président, de prendre le leadership dans la mobilisation pour le financement de l’Agenda 2063 pour l’Afrique. C’est pour concrétiser l’opérationnalité de cet engagement que nous avons pris part à cette réunion.


- Enfin, la crise russo-ukrainienne ne peut passer inaperçue. Quelle est l’approche de la BAD pour soutenir les Etats africains ?

- La Banque a approuvé, il y a quelques semaines, une facilité d’urgence en réponse à la crise alimentaire suite aux effets de la crise entre la Russie et l’Ukraine. Cette facilité a pour objet d’appuyer les pays dans l’acquisition des semences et des intrants agricoles afin de renforcer la capacité de production agricole et de répondre, à court terme, aux répercussions de ce conflit. C’est une enveloppe de 1,5 milliard de dollars pour venir en aide aux pays africains afin de soutenir l’agriculture et les chaines de valeurs. Ceci dans l’optique de diminuer, dans un court terme, la dépendance alimentaire que cette crise a largement illustré.

Il faut rappeler que l’éclatement de la crise économique engendrée par la pandémie et la crise ukrainienne sont venus exacerber les défis auxquels fait face le continent africain, qui se trouve, aujourd’hui, face à une spirale inflationniste dont l’échappatoire est difficilement perceptible à court terme.

Cette même crise pourrait, de par sa gravité, remettre en cause la viabilité financière de l’UA, d’où la nécessité d’élaborer un ensemble de règles d’or qui établissent des principes clairs de gestion financière de l’Union, outre, concevoir des stratégies de rétablissement innovantes.




Propos recueillis
par Wolondouka SIDIBE


Bon à savoir
 
A propos des deux conventions, et dans le détail, le premier accord de prêt, de plus de 34 millions d’euros, vient compléter une enveloppe de 75 millions d’euros déjà mobilisée en 2018 pour le projet d’extension et de modernisation de l’aéroport de Rabat-Salé, avec l’objectif de renforcer la compétitivité et l’attractivité de la zone économique Rabat-Salé. Les capacités en fret et passagers devraient ainsi être quadruplées.

De nouvelles lignes vont aussi être ouvertes à partir de Rabat-Salé, pour compléter l’offre de l’aéroport de Casablanca. Le second accord, qui porte sur un financement additionnel de 57 millions d’euros voués à la construction de Nador West Med, complète une première enveloppe de près de 113 millions d’euros octroyée en 2015.

L’objectif est de construire deux terminaux à conteneurs équivalents vingt pieds, d’un poste de chargement vrac spécialisé de quatre millions de tonnes, d’un terminal de marchandises et d’un terminal de produits liquides aux capacités respectives de 33 millions et 14 millions de tonnes. Au fil d’un demi-siècle de partenariat avec le Maroc, la BAD a engagé plus de 12 milliards de dollars dans le pays.