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Élections / Chambre des Conseillers : Retour sur l’Histoire et les enjeux méconnus du « Sénat » marocain


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mardi 5 Octobre 2021

Après l’élection de la représentation nationale, la deuxième Chambre s’apprête à renouveler ses membres, dans une élection aussi particulière que décisive. Retour sur l’histoire du « Sénat marocain ».



« Cette Chambre représente les métiers, ce que vous n’avez pas », disait feu Hassan II à un journaliste français au début des années 1960, pour désigner la particularité de la Chambre des Conseillers et l’architecture institutionnelle marocaine, qui bien qu’inspirée du droit public occidental, se distingue par l’ingéniosité de sa structuration juridique et institutionnelle.

La deuxième Chambre s’apprête à renouveler ses membres après le double scrutin législatif et local du 8 septembre qui a marqué la scène politique marocaine, laquelle s’est départie d’un bipartisme prétentieusement autoproclamé en 2016, pour s’ouvrir sur un équilibrage multipartite ayant accouché d’une alliance gouvernementale forte et limitée à trois formations (RNI, PAM et Istiqlal).

Mardi 5 octobre, les grands électeurs se sont réunis pour élire les 120 Conseillers qui siégeront dans la deuxième Chambre pendant six ans, la durée fixée par la Constitution du Royaume. Les différentes corporations et Chambres professionnelles ont d’ores et déjà établi leurs listes respectives de candidats. Compte tenu de la victoire du trio de la majorité dans les élections locales et régionales, les commentateurs s’attendent à un résultat pas loin de celui du 8 septembre. Toutefois, il ne s’agit que de pronostics.

Le Maroc représenté autrement

Le fait que nos « sénateurs » soient élus au suffrage indirect complique la compréhension de l’organisation du scrutin. Pourtant, le fonctionnement est régi et défini clairement par l’article 63 de la loi suprême, complétée par la loi organique n° 28-11 relative à la Chambre des Conseillers.

En effet, la Chambre a vocation à représenter les territoires, les métiers et les corps intermédiaires de la Nation, tout comme les syndicats et le Patronat. Plus de quarte collèges électoraux se réunissent pour élire les nouveaux Conseillers. 60% des Conseillers (72 membres) représentent les collectivités territoriales, 20% proviennent des Chambres professionnelles, 20% des centrales syndicales et 8% du Patronat. L’appartenance aux collèges électoraux est conditionnée par l’inscription sur les listes électorales générales. L’élection se tient soit par le scrutin proportionnel (par liste), soit par un scrutin uninominal majoritaire, selon les cas.

Un atout institutionnel

Depuis 1963, date de la proclamation de la première Constitution du Royaume après l’indépendance, le bicamérisme (régime des deux Chambres) fut une finalité concrétisée dans l’architecture institutionnelle. Toutefois, ce régime n’a pas duré et a fini par être abrogé en 1970.

Pour cause, la conjoncture difficile de l’époque, les scissions et les oppositions qu’a connues la classe politique ont fini par avoir raison du « Sénat marocain ». Le régime des deux Chambres a aussitôt laissé place au Parlement monocaméral, après l’adoption de la Constitution de 1970. Un système qui durera jusqu’en 1996, où les Conseillers ont refait leur apparition après la réforme constitutionnelle. Le contexte de l’époque, marqué par une ouverture politique, favorisait cela.

Dans un pays qui a renoué avec le bicamérisme au milieu des années 90, la Chambre des Conseilleurs est tout aussi puissante que celle des Représentants. Parfois, elle joue un rôle décisif dans la genèse des lois et le contrôle du gouvernement.

Tout projet ou proposition de loi votée par les députés passe ensuite sous la loupe des Conseillers qui, en vertu de ce processus, disposent de la capacité d’enrichir et de corriger la législation. Les lois des Finances élaborées chaque année sont une occasion de constater la touche des Conseillers qui, naturellement, changent, par les amendements qu’ils proposent, le fond du budget du Royaume.

Le plus important ici c’est qu’on assiste à chaque fois à une sorte de lutte des classes passionnante, en voyant les représentants des patrons et des salariés s’affronter sur les lois qui touchent à leurs statuts respectifs.


Anass MACHLOUKH

 

3 questions à Mohammed Bouden



« Il est fort possible que le scénario des élections législatives se reproduise »

 
Mohammed Bouden, politologue, a répondu à nos questions sur les enjeux de l’élection des membres de la Chambre des Conseillers et le déroulement du scrutin.


- Après le scrutin législatif, la Chambre des Conseillers s’apprête à renouveler ses membres, une élection particulière compte tenu du contexte actuel : qu’est-ce qui distingue cette élection de celles des années précédentes ?

 - En effet, cette élection est particulière puisqu’elle intervient dans un contexte nouveau après la réussite de la tenue des élections législatives et locales, tenues au même jour pour la première fois. Cette élection devrait donner lieu à une nouvelle représentation des territoires et des métiers, qui soit en mesure d’assumer son rôle à l’ère du Nouveau Modèle de Développement, sachant que la Constitution a dévolu à la deuxième Chambre des compétences importantes en matière de législation et de contrôle du gouvernement.



- La présidence de la deuxième Chambre revenait par coutume à l’opposition parlementaire, peut-on assister à un scénario différent cette année ?

- Il fut de coutume, dans les dernières années, que le siège du président de la Chambre soit octroyé à un parti appartenant à l’opposition. Il serait difficile de dire que cette coutume perdurerait aujourd’hui, compte tenu des résultats des élections régionales et locales qui ont confirmé la suprématie du trio qui forme la majorité. Pour autant, ce qui est sûr pour le moment, c’est que les 3/4 des membres de la Chambre des Conseillers viendront des partis politiques.


- Peut-on assister à une alliance tripartite des partis de la majorité dans cette élection ?

- Quoiqu’incertaine, parce qu’il n’y avait pas de communication officielle, l’alliance entre les trois partis pourrait intervenir dans la constitution des corps des grands électeurs des collectivités territoriales, des Conseils régionaux et des Chambres professionnelles. Or, à mon avis, il est improbable qu’ils puissent faire la même chose en ce qui concerne le corps électoral réservé aux syndicats.

 
Propos recueillis
par Anass MACHLOUKH


 








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