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International

Egypte : La livre en chute libre, l’inflation monte en flèche


Rédigé par L'Opinion Mercredi 11 Janvier 2023

Retraits bancaires limités, avec des dollars qui manquent et des ménages qui ne peuvent plus remplir leurs paniers, le rationnement s’impose. L'inflation atteint 22% mais le pain qui coutait une livre est désormais à trois.



L ’ Égypte continue de lutter contre une inflation galopante dans un contexte de chute spectaculaire de sa monnaie, alors que de nombreux Égyptiens doivent faire face à des hausses de prix, a déclaré mardi le Bureau des statistiques du pays. L’Agence centrale pour la mobilisation et les statistiques, gérée par l’État, a publié des chiffres montrant que l’inflation annuelle était de 21,9% le mois dernier, contre 19,2% en novembre. Ce chiffre est à comparer aux 6,5% de décembre 2021, avant que l’inflation ne s’envole en 2022, suite au déclenchement de la guerre en Ukraine qui a ébranlé l’économie mondiale.

En Égypte, les prix ont augmenté dans de nombreux secteurs, des produits alimentaires aux services médicaux en passant par le logement et le mobilier. Les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 4% en moyenne en décembre, les fruits et les produits laitiers étant en tête de liste avec des pics de 7,6% et 6,4%, respectivement. La hausse de l’inflation a fait peser un lourd fardeau sur les consommateurs, en particulier sur les ménages à faibles revenus. Près de 30% des Égyptiens vivent dans la pauvre[1]té, selon les chiffres officiels.

La majeure partie de la population égyptienne, qui compte plus de 104 millions d’habitants, a souffert de la hausse des prix depuis que le gouvernement s’est lancé dans un ambitieux programme de réformes en 2016 pour remanier l’économie malmenée du pays.

Des mesures d’austérité douloureuses
 
Ce programme comprenait des mesures d’austérité douloureuses comme la mise à flot de la livre égyptienne et la réduction des subventions pour le carburant, l’eau et l’électricité. L’économie a également été durement touchée par la pandémie de coronavirus, ainsi que par les retombées de la guerre en Ukraine. L’Égypte est le premier importateur de blé au monde, la plupart de ses importations provenant traditionnellement d’Europe de l’Est.

Lundi, le président Abdel Fattah el-Sissi a qualifié la situation de «très difficile», exhortant la population à faire confiance à son administration. Le gouvernement a cherché à réduire les dépenses de l’État, a interrompu la mise en œuvre de nouveaux projets coûteux qui consomment des devises étrangères et a ordonné aux organismes publics de prendre des mesures d’austérité.

Les décisions prises ces derniers mois par la Banque centrale du pays de relever son principal taux d’intérêt et de dévaluer la livre égyptienne ont déclenché un choc économique qui a touché des millions de personnes dont les économies étaient réduites par la hausse du coût de la vie. Ces mesures visaient à lutter contre l’inflation croissante et à répondre aux exigences du Fonds monétaire international pour un prêt de sauvetage dans un contexte de pénurie de devises étrangères.

Le mois dernier, la Banque centrale a annoncé son intention de ramener l’inflation à environ 7% d’ici le quatrième trimestre de 2024, bien qu’elle n’ait pas précisé comment y parvenir au vu des tendances actuelles. Le FMI a approuvé le plan de soutien de trois milliards de dollars pour l’Égypte après une série de réformes, notamment la dévaluation de la monnaie qui a vu la livre perdre plus de 40% de sa valeur par rapport au dollar depuis mars 2022. La monnaie américaine s’échangeait mardi à 27,5 livres pour 1 dollar.
 

Un endettement étranglant 
 
Avec seulement 33,5 milliards de dollars - dont 28 sous forme de dépôts des alliés du Golfe - et une dette extérieure qui a plus que triplé en 10 ans pour atteindre 150 milliards d’euros, l’Egypte est pris à la gorge. En mars, puis en octobre, Le Caire a dévalué sa monnaie. Mercredi, la livre a encore perdu plus de 8%. En moins de dix mois, elle aura chuté de près de 70%.

Et pour les experts, tous les voyants sont passés au rouge quand deux banques publiques ont annoncé mercredi délivrer des certificats de dépôt avec 25% d’intérêt sur un an. Malgré tout, l’Egypte reste l’un des cinq pays les plus à risque de ne pas rembourser la dette extérieure selon Moody’s. Et les trois milliards de dollars du nouveau prêt du FMI pèsent peu: le seul service de la dette pour 2022-2023 s’élève à 42 milliards. Le ministre des Transports, Kamel al-Wazir, a proposé une solution: faire payer le train en dollars aux touristes.

«Il me faut des dollars pour payer les trains importés. Cela arrange les touristes et moi aussi», expliquait récemment Kamel al-Wazir. Mais pour dégager plus d’argent, l’Etat veut privatiser tous azimuts. A tel point que l’opinion publique s’inquiète que l’Egypte perde sa souveraineté sur son joyau: le canal de Suez. Il n’est «pas à vendre» a martelé le régime, mais le président Abdel Fattah al-Sissi, lui, aimerait piocher dans ses revenus - pour créer un fond qu’il gèrera lui-même. Pour Stephan Roll, du German Institute for International and Security Affairs, l’Egypte s’endette pour «consolider (son) régime autoritaire».

«L’armée, sur laquelle Sissi se repose, est le premier bénéficiaire: l’endettement extérieur protège ses revenus et ses biens et finance des méga-projets qui lui rapportent gros» puisque la plupart des grands travaux sont confiés au génie militaire, ajoute-t-il. Loin des villes nouvelles et des trains électriques rutilants, Rehab voulait seulement acheter un manteau à sa fille pour l’hiver. «Mais à 1.000 livres, j’ai dû renoncer», dit-elle, les yeux embués.

 








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