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Eau potable : Comment l’ONEE assure l’approvisionnement dans un contexte de grave stress hydrique


Rédigé par Saâd JAFRI Mardi 15 Novembre 2022

Stations de dessalement, tarification de l’eau, gestion des ressources hydriques… Abderrahim El Hafidi, directeur général de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE), a exposé les efforts fournis par le Royaume pour éviter le scénario catastrophe.



500 m3 est le volume annuel d’eau douce par habitant au Maroc. Pour mieux comprendre la gravité de la situation, durant les années soixante, ce volume était cinq fois plus élevé qu’aujourd’hui. Le changement climatique, conjugué au déficit pluviométrique et à la consommation galopante des ressources hydriques, a fait entrer le pays dans une situation de stress hydrique structurel et, selon les estimations de la Banque Mondiale, si ce rythme se poursuit pendant les trente prochaines années, le Maroc perdra plus de 80% de ses ressources en eau douce.

Invité au plateau de l’émission «Confidences de presse» de 2M, Abderrahim El Hafidi, directeur général de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE), a exposé les efforts fournis par sa Direction pour faire face à la situation. «Le Royaume dispose aujourd’hui de quelque 149 barrages, alors que 20 autres sont en cours de construction», a-t-il indiqué, notant que ces infrastructures sont un facteur de résilience du moment que leur capacité de stockage s’élève à environ 20 MM m3, qui s’ajoutent à environ 5 MM m3 d’eaux souterraines.

Afin de booster cette capacité de stockage, le gouvernement travaille sur l’accélération du rythme de construction de petits barrages et de bassins collinaires dans différentes régions du Royaume, comme l’a bien précisé, dernièrement, Nizar Baraka, ministre de l’Equipement et de l’Eau, tout en notant que malgré la diminution du réservoir hydrique national, les besoins d’approvisionnement en eau potable ont été comblés grâce au dessalement de l’eau de mer et à la limitation des cultures hydrivores.

Les projets de dessalement vont bon train

«Le gouvernement a eu recours à des barrages 100% agricoles pour approvisionner le Royaume en eau potable», a affirmé le patron de l’ONEE, qui a donné l’exemple des raccordements des barrages pour subvenir aux besoins des différentes régions. «Nous avons raccordé le barrage d’El Guerdane à l’une des stations de traitement de l’Office pour approvisionner le Grand Agadir en eau potable, le temps que les projets de dessalement deviennent opérationnels», a détaillé El Hafidi, tout en évoquant le manque de visibilité sur les aléas climatiques.

Ceci dit, il a indiqué que la capacité de production de l’Office s’élève à 7 M m3/J, soit près du double de la consommation nationale. Malgré le contexte difficile, les indicateurs sont toujours au vert, selon les déclarations du responsable, qui rassure également sur la qualité des infrastructures. Cependant, El Hafidi alerte sur le fait que 97% de l’eau produite provient des eaux de surface et des nappes, alors que seuls 3% proviennent du processus de dessalement. Le Maroc dispose d’un littoral qui s’étend sur 3.500 km, chose qu’il faudrait exploiter, tranche-t-il, rappelant que le Royaume a été pionnier dans le dessalement de l’eau de mer.

«La première station a été construite à Boujdour en 1977, pour un coût de production de 50 DH le m3, faute de technologies. Aujourd’hui, le coût de production ne dépasse pas 6 à 7 DH le m3», explique le directeur général, donnant l’exemple des stations d’Agadir et d’Al Hoceima, où une technologie américaine qui permet de réutiliser une bonne partie de l’énergie utilisée dans la production de l’eau a été introduite. «Cette technologie nous a ainsi permis de baisser le coût de l’électricité utilisée dans ce processus industriel de 35%», précise-t-on.

Dans ce sillage, il est à noter que le pays dispose de 9 stations de dessalement d’une production globale de 147 millions de m3 par an et, selon le ministère de tutelle, une vingtaine d’autres seront réalisées à l’horizon 2030 pour une production de plus de 720.000 m3 par jour. L’Exécutif veut faire en sorte que 50% au minimum des eaux potables consommées proviennent de ce processus.

Le directeur général de l’ONEE a, par ailleurs, déclaré que le projet de réalisation d’une station de dessalement de l’eau de mer à Casablanca, dont la capacité de production est estimée à 300 millions de m3 par an, «va bon train». «Les trois grands consortiums ont été retenus et ils sont en concurrence pour nous présenter la meilleure technologie possible, avec des coûts concurrentiels», a-t-il indiqué, soulignant qu’ils ont jusqu’au 22 décembre 2022 pour présenter leur offre de sorte que le projet puisse démarrer vers la fin de 2026.

Pour rappel, le marché relatif à l’étude de mise en place du projet a été attribué en août 2018 à la société NOVEC pour une enveloppe de près de 4 MDH, tandis que le marché d’étude d’adduction d’eau traitée dudit projet a été attribué en février dernier à la société ADI pour une enveloppe de près de 1,5 million de dirhams avec un délai d’exécution fixé à 11 mois. Les travaux topographiques et parcellaires ont été attribués à la société Topo - Gérance pour une enveloppe de 489.600 dirhams et un délai d’exécution de 13 mois. Le marché relatif à l’assistance technique a été attribué à la société CID pour près de 9,48 MDH, pour un délai d’exécution de 60 mois. 
 
Le Maroc dispose de 9 stations de dessalement d’une production globale de 147 millions de m3 par an.

Revoir les coûts de production

Par ailleurs, Abderrahim El Hafidi a souligné l’importance de revoir le coût de production de l’eau. «Le calcul actuel ne prend pas en considération les coûts de stockage au niveau des barrages, le coût de la réalisation et de la maintenance de ces barrages», a-t-il déploré, précisant que le coût moyen de production du m3 d’eau par l’Office s’élève à 15 DH, alors que le prix payé par le consommateur varie entre 2,5 et 3 DH/m3 pour les première et seconde tranches. «Le coût supporté par l’Etat est énorme», dit-il.

Un constat partagé également par la Commission pour le Nouveau Modèle de Développement (CNMD), qui avait indiqué dans son rapport que la tarification de l’eau potable, industrielle ou d’irrigation, ne traduit pas le coût réel de la ressource et ne favorise pas le recours aux ressources alternatives. «85% des citoyens marocains se situent dans les deux premières tranches de consommation», il faut donc une réflexion profonde sur la question de la tarification, laisse entendre El Hafidi.

Afin de mettre en place une tarification qui reflète la valeur réelle de la ressource et incite à la rationalisation des usages et à la gestion de sa rareté, le NMD avait recommandé une «augmentation progressive des tarifs de l’eau à l’ensemble des usagers, particuliers et agriculteurs, pour assurer la rémunération des services de mobilisation». L’Etat devra néanmoins se charger directement de la subvention des tranches de consommation «sociales» pour les citoyens à faible revenu. Décision sensible et potentiellement impopulaire, mais nécessaire en ces temps de sécheresse.




Saâd JAFRI

Eau potable : Comment l’ONEE assure l’approvisionnement dans un contexte de grave stress hydrique








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