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Covid long : lorsque le coronavirus devient maladie chronique


Rédigé par Siham Mdiji Samedi 22 Mai 2021

Le Covid-19 continue à se propager à travers le monde et ne semble pas vouloir nous quitter de sitôt. Malgré leur rémission, plusieurs patients ayant contracté le virus font toujours face à ce que l’on appelle le « Covid long ». Eclairage.



Une partie des personnes infectées par le Covid-19 développent des formes légères à modérées de la maladie et réussissent à guérir sans la nécessité d’une hospitalisation. Le reste se trouve dans la plupart des cas contraints de se rendre à l’hôpital suite à des complications pulmonaires ou à un manque accru d’oxygène. Ce qui nécessite souvent un traitement intensif qui n’est que le début d’une longue convalescence. Les séquelles post-Covid ne sont donc pas à négliger, car elles surviennent même dans les formes minimes de l’infection. 

Le temps passe, mais les symptômes restent

Depuis le premier cas signalé à Wuhan, en Chine, le 31 décembre 2019, le Covid-19 ne discrimine pas selon le milieu social, le sexe ni l’âge. Ce qui fait que personne n’est à l’abri, y compris les jeunes de moins de la trentaine, sportifs et en bonne santé. Des mois après leur guérison, confirmée par un test PCR, ces derniers se rendent compte de plusieurs séquelles qui bouleversent leur quotidien. Malgré le fait que des personnes ont pu se remettre au bout d’une semaine de l’infection, leur santé n’est jamais totalement recouvrée.

« En se basant sur plusieurs études, une bonne partie de patients continue de souffrir de certaines séquelles, essentiellement de la fatigue, des céphalées, des signes neuropsychiatriques, à savoir des problèmes de concentration, d’attention, de sommeil ou d’anxiété, ainsi que des manifestations neurologiques au niveau des membres supérieurs et inférieurs », a déclaré Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en politiques et systèmes de santé. Selon notre interlocuteur, la fatigue, la toux et la perte de l’odorat, connue également sous le nom d’« anosmie post-infectieuse » ou encore « une anosmie post-virale », sont des symptômes à prendre en compte.

Une vie sans odeur

Par ailleurs, une étude présentée à la 73e réunion annuelle de l’American Academy of Neurology en avril 2021 et menée par le Dr Johannes Frasnelli de l’Université du Québec, révèle que conséquemment à ce trouble neurosensoriel, l’odorat est l’une des premières fonctions que l’on risque de perdre au bout du début la maladie et l’une des plus difficiles à récupérer. En effet, les fonctions olfactives prennent jusqu’à 5 mois pour se rétablir à 100%. L’étude susmentionnée a été effectuée sur 813 travailleurs testés positifs cinq mois après leur diagnostic afin d’évaluer leur sens du goût et de l’odorat. Il s’est avéré que 580 personnes souffraient d’une anosmie, dont 297 participants (soit 51%) n’avaient pas réussi à intégralement la retrouver durant la même période. Sur une échelle de 0 à 10, les participants classaient leur odorat à 7 sur 10 après l’infection, contre 9 sur 10 avant d’avoir contracté la maladie. D’où l’intérêt du « training olfactif » qui est un traitement simple et facile à pratiquer chez soi, dans le but de récupérer les capacités olfactives perdues. Il suffit à ce propos de sentir quotidiennement des huiles essentielles qui permettront au cerveau de renouer avec les sensations déclenchées par les odeurs.

Le « Covid long » inquiète

Six patients hospitalisés sur dix souffrent encore d’au moins un symptôme après six mois, c’est du moins ce que relèvent les résultats d’une étude française sur les « Covid longs », résultats publiés lundi 10 mai dans la revue spécialisée Clinical Microbiology and Infection. Cette dernière a indiqué que 10 à 15 % des patients signalaient un « Covid long », dont les symptômes dépassent un mois. Ceux-ci persistent « plus fréquemment chez ceux admis en réanimation, mais, pour l’heure, on ne sait pas si c’est la maladie ou la réanimation qui favorisent cette persistance », a souligné Jade Ghosn, coordinateur de l’étude et professeur au sein du service des maladies infectieuses et tropicales de l’Hôpital Bichat Claude-Bernard AP-HP. Un constat qui nous a été confirmé par M. Hamdi qui a en outre affirmé que « les études demeurent contradictoires du fait que les recherches sont toujours en cours pour bien cerner les effets du virus », notant qu’«au début, nous croyons que ces symptômes sont dus à l’isolement et à la longue durée passée à l’hôpital, loin de ses proches, ou même à cause des traitements que les patients recevaient à cause du coma artificiel nécessaire pour les intuber et bénéficier de la respiration artificielle », mais les études ont prouvé le contraire.

En conclusion, M. Hamdi a fait savoir que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ainsi que toutes les autorités de santé scientifiques dans le monde recommandent de prendre en charge correctement ces patients afin qu’ils reprennent une vie normale. Un tiers de ces patients n’ont pas été capables de reprendre le travail six mois après l’hospitalisation.

Siham MDIJI

Des anticorps huit mois après l’infection

Selon une étude réalisée par le prestigieux hôpital San Raffaele de Milan en collaboration avec l’Institut Supérieur de la Santé (ISS), l’organisme conseillant le gouvernement en matière de santé publique, les anticorps neutralisant le Covid restent dans le sang pendant au moins huit mois après une infection.

Ce constat est valable « indépendamment de la gravité de la maladie, de l’âge des patients ou de la présence d’autres pathologies », a indiqué la même source. « La présence des anticorps, bien qu’elle se réduise dans le temps, s’avère très persistante : huit mois après le diagnostic, seulement trois patients sur les 162 suivis (dont 29 sont décédés) n’étaient plus positifs au test de détection de ces anticorps, ont expliqué dans un communiqué conjoint le San Raffaele et l’ISS. En outre, la présence précoce de ces anticorps est « fondamentale pour combattre l’infection avec succès. Ceux qui ne réussissent pas à les produire dans les premiers quinze jours après la contagion risquent davantage de développer des formes graves de Covid-19 ».

3 questions à Tayeb Hamdi

« La moitié des patients gardent des séquelles après six semaines post-maladie »

Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en politiques et systèmes de santé, a répondu à nos questions sur les séquelles du Covid-19.

- Plusieurs patients du Covid-19 souffrent de séquelles après leur guérison, même ceux qui ne développent pas des cas critiques, notamment les jeunes. Pouvez-vous nous citer les principales séquelles dont souffrent ces derniers ?

- Plusieurs séquelles sont observées chez les patients ayant déjà été infectés par le Sars-Cov-2, dont la fatigue, la dyspnée, les douleurs thoraciques, les troubles digestifs et neuropsychiatriques, les signes cardiaques, etc., Le virus, certes, touche beaucoup les poumons, le coeur et les reins, mais aussi le cerveau. Toutefois, nous ne pouvons pas lister de manière exhaustive les lésions causées par le Covid, mais plusieurs hypothèses sont envisageables.

- Des patients parviennent mal à récupérer complètement l’odorat, quelles sont les causes, à votre avis ? Y a-t-il un traitement qu’ils peuvent suivre pour remédier à cela ?

- Effectivement, de nombreuses personnes ont du mal à récupérer leurs capacités olfactives même après des mois de leur guérison. La raison est généralement due au fait que le virus persiste au fond des cavités nasales et dans le système nerveux olfactif. Une étude, récemment publiée, a par ailleurs révélé que pour augmenter les chances de récupération de l’odorat, il faut parfumer notre mycose, et ce, en sentant des odeurs quatre fois par jour. Ce qui est une technique de rééducation olfactive.

- On entend parler de patients Covid-19 longs, quelles sont les raisons qui expliquent ce phénomène ?

- Avec le recul, nous avons plus de connaissances sur ce qu’on appelle le Covid long ou le Covid persistant, dont on parle quand il y a persistance de symptômes des mois après l’infection. Ces derniers touchent de façon plus globale les personnes qui ont développé des formes graves de la maladie, et même celles qui ont souffert d’infections relativement bénignes. La moitié des patients gardent des séquelles après six semaines post-Covid, tandis que 10% en souffrent encore après 6 mois.